..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

dimanche 12 octobre 2014

Jock, chien de choc (1)



A la demande générale de trois commentateurs, je vais évoquer de nouveau Jock, ce chien de choc que nous rencontrâmes alors qu’il donnait libre cours à son côté joueur avec les poules  du regrettable Père Milien.

S’il fallait définir en quelques qualificatifs cette calamité faite chien, les plus appropriés seraient goinfre, farceur, affectueux  et épris de liberté.

La goinfrerie de Jock était sans bornes. Alors qu’il n’était encore qu’un chiot, nous allâmes dans la Vienne tuer le cochon.  Peu méfiants, nous fîmes l’erreur au retour de ne pas l’attacher hors de portée des sacs contenant la viande et la charcuterie tirées du suidé. Le malheureux, probablement tenaillé par la faim, vu qu’il ne venait de dévorer qu’une seule énorme gamelle de pâtée parvint, avec discrétion à extraire du boudin d’un sac et à en engloutir un morceau de presque un mètre. Nous en fûmes plus sidérés que chagrins.

Un jour que notre voisin attendait sa famille pour le déjeuner, il mit son rosbif à refroidir sur le rebord de sa fenêtre. Mal lui en prit car Jock avisant la pièce de viande décida d’ajouter ce supplément carné à son régime et nul n’en trouva trace.

Il arriva qu’ayant trouvé  une odeur bizarre à un canard ayant trop longtemps séjourné dans le congélateur, je décidai d’en faire cadeau au chien après l’avoir fait bouillir dans une marmite à l’extérieur  afin d’éviter que ses arômes n’empuantissent la maison. C’est alors que j’assistai à une scène étonnante :  Jock, impatient, les larmes aux yeux, entamait  son repas en arrachant des lambeaux de chair au canard toujours plongé dans l’eau bouillant à gros bouillons.

Lors d’une fugue (car il fuguait, le bougre mais nous y reviendrons)   ceux qui le recueillirent nous racontèrent qu’une fois dominée la crainte que leur inspira la présence du molosse mollement allongé sur le pas de leur porte, le voyant affectueux et inoffensif, ils lui proposèrent une bonne gamelle. Il l’engloutit avec un appétit qui rendait difficile d’imaginer qu’il venait d’en dévorer une avant de s’enfuir de chez nous. Craignant que la pauvre bête abandonnée ne souffre de famine après une longue errance, ils lui en offrirent une autre, plus grande qu’il s’empressa de faire disparaître avec la même célérité, ce qui les confirma dans l’idée que Jock avait dû connaître une longue période de privations.

Facétieux en diable, il l’était, ainsi lors d’une de ses nombreuses escapades, s’empara-t-il du bâton dont s’aidait pour marcher une pauvre vieille, laissant celle-ci, incapable de se déplacer, au milieu d’un chemin peu fréquenté jusqu’à ce qu’un passant vint à son aide…

Bien que nous le sortions afin qu’il fit ses besoins, M. Jock, à notre insu, avait trouvé un autre moyen de se soulager. De la terrasse de l’appartement que nous occupions alors à Amboise, il sautait prestement sur le toit du voisin, et y déposait ses énormes étrons  qui de là roulaient dans la gouttière et finirent par la boucher. Nous apprîmes ce manège lorsque nous vîmes un homme outré sonner à notre porte, un seau à la main.  Il nous expliqua, le visage empourpré de rage, qu’inquiet de voir des infiltrations de liquide brun souiller la blancheur immaculée du plafond de son couloir, il était allé inspecter ses gouttière et qu’horreur il en avait extrait DEUX PLEINS GRANDS SEAUX de merde de chien. Il avait tenu à nous en apporter un comme preuve de la véracité de ses dires. Je dois avouer que j’eus bien du mal à dominer le fou-rire que me provoqua la scène. J’y parvins cependant et lui proposai de l’indemniser,  de clore d’un haut grillage l’accès à son toit. Sa rage tomba ainsi et il repartit avec son seau sans pour autant m'en restituer le contenu …

Notre voisin dont les talents de rôtisseur furent évoqués plus haut, aimait beaucoup Jock, il lui apprenait des tours et avait une relative autorité sur lui. Certains soirs, ce célibataire arrivait, bouteilles sous les bras, pour nous offrir l’apéro. Nous le gardions à dîner et lorsqu’il y avait des frites au menu, il s’amusait à s’en mettre une dans la bouche et invitait le chien à venir s’en emparer. Tout se passait très bien à la plus grande satisfaction de Jock et du voisin jusqu’au jour où, emporté par l’enthousiasme, le chien mordit non seulement la frite mais le nez de notre bon voisin qui se mit à saigner abondamment….

samedi 11 octobre 2014

Commentez sans modération !



La modération n’est pas un des traits dominant de mon caractère ou de mon comportement.  On ne se refait pas, surtout à mon âge.

Un triste personnage dont la vie doit être d’un vide sidéral et l’équilibre mental plus que précaire tente pourtant depuis quelques jours de me pousser à installer la modération des commentaires en multipliant des interventions stériles  puis en redéposant toujours le même commentaire inepte après que je l’ai supprimé.  Dans la totale stérilité des son esprit dérangé a du naître l’idée que  son comportement obsessionnel viendrait à bout de ma patience. Il se trompe.  Je suis bien plus têtu qu’il ne saurait être maniaque.

Depuis trois ans qu’existe ce blog, une harmonie s’y est instaurée. Des commentateurs y viennent régulièrement donner leur avis sur tel ou tel point et je les en remercie.  Dire que c’est un lieu de débat serait exagéré,  vu que nous ne sommes pas ici sur un forum. En général, les intervenants partagent peu ou prou mes opinions sur la piéride, la Mongolie, la culture du flageolet ou la remarquable efficience de notre excellent gouvernement. C’est pourquoi il est m’est arrivé d’en rencontrer certains qui sont devenus des amis tandis que j’échange par mails avec d’autres.

En conséquence,  je me refuse à laisser détruire le climat bon enfant qui a toujours été de mise ici par un personnage qui ne semble pouvoir exister qu’en semant la zizanie et dont on se demande de quelle nature peut bien être la satisfaction qu’il en tire.

Je me contenterai donc de supprimer systématiquement ses interventions. Comme je ne passe pas mes journées devant l’écran, il arrivera forcément que celles-ci demeurent des heures avant de se voir effacées.  N’y prêtez aucune attention.

Là-dessus, je retourne au jardin, finir d’installer la centaine de plans de fraisiers qui au printemps prochain  fourniront à foison de savoureuses baies.

Bonne journée à tous et prompt rétablissement à M. « Léon ».

vendredi 10 octobre 2014

Patrick Modiano



Ainsi M. Modiano vient à la surprise générale de se voir attribuer le prix Nobel de littérature. Ce n’est pas rien. Le voici l’égal des Tomas Tranströmer, Wisława Szymborska, Mo Yan pour ne citer que les plus prestigieux lauréats de ces dernières années !

Ce qui rend la surprise moindre, c’est qu’il a écrit des livres. Il eût été plus étonnant qu’il se fût vu attribuer le Nobel de Médecine, de physique ou de macramé-pâte-à-modeler.

Mais je me montre moqueur. C’est d’autant plus condamnable que j’ai été, un temps fut, un lecteur enthousiaste du grand Patrick. La Place de l’étoile me l’avait révélé et j’ai encore dans ma bibliothèque treize de ses romans, soit pratiquement tout ce qu’il a écrit entre  1968 et le début des années quatre-vingt dix. J’aimais son style limpide, l’étrange ambiance qu’il savait créer  avec ses personnages énigmatique évoluant dans un monde interlope et sur lesquels planait l’ombre d’un passé trouble. De plus, au fil de leurs déambulation, à condition de se munir d’un plan de Paris, on pouvait, comme le souligna ironiquement je-ne-sais-plus-quel-critique, devenir incollable sur le VIIIe arrondissement. Ce qui est utile à qui rêve de devenir chauffeur de taxi.

Ce qui provoqua ma lassitude, c’est le curieux sentiment de déjà vu que finirent par provoquer en moi la lecture des derniers romans que je lus de lui. Je l’ai déjà dit, en matière de littérature, je suis atteint d’amnésie. Un livre si beau soit-il, ne laisse en mon esprit quasiment aucune trace. Nom des personnages, intrigue  s’évaporent au point qu’un esprit malin pourrait me soupçonner de n’avoir jamais rien lu. Accessoirement, je ferais bien piètre figure dans les salons où on cause littérature. Il m’arrivait même d’acheter un livre que je possédais et avais déjà lu et de ne me rendre compte de mon étourderie qu’en le rangeant à côté de son jumeau. 

Avec Modiano, j’eus l’impression contraire : alors que j’entamais son dernier roman paru, j’avais le sentiment de l’avoir déjà lu. Sensation ressentie  auparavant avec les écrits de Pierre Benoit et Françoise Sagan. J’en vins à la conclusion qu’en fait, il n’avait écrit qu’un roman qu’il déclinait à l’infini  en en changeant le nom des personnages et en modifiant légèrement leur itinéraire à travers le VIIIe. Je cessai donc de le lire.

Mon jugement est probablement outré. Surtout que cet unique roman perpétuellement remâché est de qualité.

Toutefois, il y a une chose qui ne me lasse jamais chez cet auteur : ses interviews. Son élocution hésitante, ses phrases jamais terminées, ses perpétuelles corrections d’assertions non émises, le labyrinthisme de sa pensée que cela révèle, me réjouissent. Je me demande l’effet que les inévitables interviews que lui imposera  la presse étrangère aura sur des auditeurs non-avertis et plains d’avance les courageux traducteurs qui lui serviront de truchement et dont l’aptitude professionnelle se trouvera à jamais remise en cause…

jeudi 9 octobre 2014

De la cécité en France



J’ai aperçu l’autre jour une pub à la télé déclarant qu’il existait en France 2 millions d’aveugles et de mal voyants. Je suppose qu’il s’agissait de sensibiliser les braves gens au problème ou de les faire cracher à quelque charitable bassinet. Ce chiffre m’a étonné par sa faiblesse. J’avais l’impression qu’il était autrement plus important.

En mai 2012, ils furent  18 millions à ne pas voir qu’en choisissant Hollande, ils fonçaient dans le mur. Ils sont encore 13%  à faire confiance à ce monsieur. Selon un sondage de 2011 14% jugeaient positif l’impact de l’immigration sur le pays et 28% pensaient qu’elle faisait de la France un endroit plus agréable ou vivre tandis qu’ils étaient un peu moins (24%) à déclarer qu’elle était bonne pour l’économie du pays et que 20% ne trouvait pas ses effectifs trop importants. Certains de ces résultats sont un rien contradictoires mais peut-on en vouloir à des aveugles ou malvoyants de ne pas avoir une vision bien cohérente et nette des choses ?

On me dira que ces malvoyants sont très minoritaires, que leur faible nombre montre à quel point le clergé multiculturaliste (politiciens « intellectuels », media), malgré tout le zèle qu’il y met,  prêche dans le désert  et que tout cela  est bien rassurant. C’est une façon de voir. Car tant que des majorités quelconques se prononceront en faveur de partis ou de personnes qui, pour ne pas froisser, afin de récolter une partie de leurs votes, continueront de prendre en compte les attentes des aveugles et malvoyants, tant qu’elles mettront en tête du hit parade des politiciens populaires un Juppé dont l’attitude vis-à-vis du multiculturalisme est pour le moins ambigüe (il le dénonce tout en insistant sur l’importance de l’ « Islam de France ») rien ne changera et  un multiculturalisme de fait continuera de se développer avec tous les dangers qu’on lui connaît.

mercredi 8 octobre 2014

Lisez Price !



Je viens de finir Price, roman de Steve Tesich, l’auteur de Karoo dont j’ai parlé ici. Comme diraient l’infatigable nymphomane ou le quasi impuissant quand ils aperçoivent le bout du tunnel menant à l’orgasme : « Ça vient quand on n’y croyait plus ! »

J’ai exprimé mon peu d’appétence pour la lecture ces temps derniers.  J’ai été incapable d’apprécier quoi que ce soit, mises à part leurs vertus soporifiques,  dans les derniers ouvrages que j’ai tenté de  lire et bien vite abandonnés. J’hésitais à faire l’emplette de Price, le roman nouvellement paru de Steve Tesich aux éditions Monsieur Toussaint Louverture. Et puis, ma fille se demandant quoi m’offrir pour mon récent anniversaire, je me suis dit : Pourquoi pas Price ?

Le livre m’est arrivé voilà trois jours et je l’ai dévoré. Alors que je peinais à lire plus de quelques pages avant qu’un livre ne me tombe des mains, j’en lus avec ravissement près de cent-cinquante par jour anxieux que j’étais d’en connaître la suite et effrayé du vide où sa fin me laisserait.

De quoi s’agit-il ? De l’été 1961 que traverse Daniel Price, adolescent de 18 ans (le titre original est Summer crossing) qui, emporté par une passion folle pour l’énigmatique, belle et déroutante Rachel, abandonnera un monde fait de copains « inséparables », de sport, d’une famille rongée de sourdes rancœurs avant de finalement quitter sa banlieue de Chicago pour Dieu sait où.  La recette est simple : Vous prenez un père mourant hanté par le sourire qu’il n’a pas su faire naître aux lèvres de sa femme, vous y ajoutez une fille fantasque qui souffle le chaud et le froid sur les braises d’un amour qui se rêve fusionnel, une mère monténégrine belle et sage, un supposé père que sa fille soutiendrait à bout de bras, des copains qui évoluent chacun à leur manière et qu’obtenez-vous ?  Une bouse infâme si vous n’avez le talent diabolique de Steve Tesich.

Parce qu’ici, comme dans toute œuvre littéraire, l’intrigue n’est rien. Tout est dans le talent de l’auteur à nous entraîner dans le monde qu’il crée, à nous faire partager les émotions et sentiments de personnages que son art parvient à faire quitter le monde de la fiction pour leur donner, l’espace d’une lecture, une existence tangible, émouvante, sinon vraie du moins vraisemblable. De ça je donnerai un exemple. Au tout début du roman, Daniel Price, alors qu’il vient de perdre une compétition de lutte voit s’éloigner la voiture de son entraîneur qui l’a déposé à un carrefour ou aboutit la rue où sa vie basculera. Tesich précise : « Son feu arrière gauche était cassé ». Détail superfétatoire : nous ne sommes pas dans un polar : que le feu arrière gauche soit cassé  n’a aucune importance. On n’en parlera jamais plus. Seulement, en le mentionnant, Tesich ancre son récit dans le vraisemblable, nous entraîne, illusionniste qu’il est, à croire en la réalité de sa fiction. Ça, c’est de l’art et du beau !

Alors, chef-d’œuvre ? Pas Chef-d’œuvre ? Je n’en sais rien et je m’en fous. Ce livre a su faire naître en moi une foule d’émotions. N’étant amateur ni de tableaux d’honneur ni de hit parades,  je dirai simplement que j’ai passé à sa lecture d’excellentes heures et que je ne saurais trop encourager ceux qui m’accordent un peu de jugement et de goût à le lire.