La Manche libre
est un hebdomadaire local de qualité. Je l’achète pour le programme télé et
parce qu’il procure à ma compagne des moments de saine et enrichissante lecture.
C’est elle qui a attiré mon attention sur les mésaventures d’un amateur de
bonbons en la bonne ville de Granville.
Or donc, celui que le journaliste décrit comme un « individu
de 44 ans » se présente un beau soir de mai au commissariat de la cité manchoise. Il
trouve porte close. Qu’à cela ne tienne, l’homme n’est pas de ceux que le
moindre obstacle décourage. Il sonne donc avec ardeur jusqu’à ce que des
policiers viennent s’informer de sa quête. Et c’est là que les choses se gâtent
entre notre homme et les représentants de la loi. Ces derniers, êtres frustes,
ont-ils jugé inadaptées les demandes du brave garçon ? Ignoraient-ils qu’en plus d’assurer la paix publique certains
de leurs collègues assuraient l’approvisionnement en bonbons de leurs concitoyens
en manque ? Tentèrent-ils de l’éconduire
sans lui céder la moindre friandise ? Toujours est-il que le ton dut monter car notre
héros submergé par une juste colère, finit par proférer des insultes, saisir un
policier au col et cracher au visage d’un autre. Les fonctionnaires parvinrent
cependant à le maîtriser et à l’emmener à l’hôpital afin de lui faire subir un
test d’alcoolémie. On se demande bien
pourquoi ? Malheureusement, le test dut s’avérer positif car le brave
citoyen termina sa nuit en cellule de dégrisement.
Le 31 juillet, c’est devant le tribunal de Coutances que l’on
demandera au consommateur éconduit de répondre d’un comportement jugé étrange.
Un peu confus, il déclarera ne se souvenir de rien mais, ne mettant pas en
doute les dires des serviteurs de l’état, il présentera des excuses. Il expliquera ses véhémentes demandes de
confiseries par le fait qu’à Lyon il avait coutume de se fournir en bonbons au
distributeur installé dans le commissariat. Ainsi, c’est simplement parce que d’une province à l’autre les commissariats
offrent des services différents que le destin de cet homme a basculé.
Le tribunal a-t-il recommandé au commissaire de Granvile d’équiper
ses locaux d’un distributeur de friandises ? Il semblerait que non et ce
fut notre homme qu’on blâma et
sanctionna. Quatre mois de prison avec sursis et une mise à l’épreuve de deux
ans avec obligation de soins lui furent infligés. Sans compter une interdiction
de fréquenter les débits de boisson !
Chaque semaine quelques faits du même tonneau sont relatés dans cet excellent périodique.
Devrait-on en conclure qu’à la différence du reste de la France qui se vit
naguère qualifiée dans un livre à succès d’ « Orange mécanique »
le département de la Manche mériterait plutôt le surnom de « Pomme
éthylique » ?