En France, on réfléchit et à force de réfléchir, on arrive à
une conclusion. Et ma conclusion c’est que le moment de « réflexion »
qui précède les scrutins est une mesure inutile. Il est interdit de faire la moindre
propagande pour tel (le) ou tel (le) candidat la veille et le jour de l’élection. Ce qui veut dire que, ces deux jours durant,
les media se taisent et les meetings sont bannis. Les blogueurs se sentent
contraints à en faire autant, ou peut-être y sont-ils invités. Hélas, cette
période de quiétude officielle est inefficace car malgré ces louables
dispositions l’électeur n’est pas TOTALEMENT à l’abri des influences.
Penser que les discours des politiques et les articles,
émissions et reportages des media sont les seuls moyens d’influencer est
illusoire. On pourrait même dire que, si ces braves gens croient tenir ce
monopole, ils se mettent le doigt dans l’œil jusqu’au coude, voire l’omoplate. Car on peut, à condition d’être influençable,
changer d’avis au dernier moment suite à
une conversation privée ou à un événement quelconque. Par exemple, au cours de l’apéro, votre
beau-frère vous déclare son intention de voter Front de Gauche, comme vous vous
y apprêtiez. En entendant ces mots, votre sang ne fait qu’un tour : vous n’allez
tout de même pas voter comme ce triste con ! Du coup, le Rassemblement Bleu Marine compte
un électeur de plus. Ou encore, tandis
que vous vous dirigez guilleret vers votre bureau de vote avec la ferme
intention de reconduire par votre suffrage le maire sortant et son équipe vous vous
apercevez que les bancs publics de l’avenue Charles De Gaulle ont été, vous n’en
croyez pas vos yeux, repeints en vert anglais. Quelle confiance accorder à des
gens capables de telles fautes de goût ? Et voilà l’opposition assurée d’un
nouveau soutien !
En admettant qu’aucune conversation ou événement ne vienne
troubler la sérénité de votre réflexion, le fait que des articles, billets,
reportages aient été réalisés l’avant-veille du jour fatidique où tout bon
citoyen s’empresse d’aller remplir son devoir civique ne veut pas dire que vous
ne les découvrirez pas la veille où le jour même du scrutin. Par exemple, afin
d’aider votre progéniture à rédiger son exposé sur le genre, vous tapez les
mots clés suivants sur votre clavier « fat lesbians having fun with huge
dildo » et, mystères de Google, voilà que vous vous retrouvez sur le site
de M. Mélenchon. Vous lisez son dernier billet et votre religion est faite :
Vous voterez FDG ! Imaginons encore
que le rythme trépidant de votre vie ne vous ait pas laissé le loisir de lire
les professions de foi des candidats à votre mairie. Vous comptez voter
Chombier et pour raffermir vos convictions, vous relisez la sienne et que découvrez-vous ? Le
point vingt-et-un de son programme qui jusque là vous séduisait préconise l’organisation,
tous les dix-huit juin, une fête du chapeau rigolo où tout citoyen sera incité
à rivaliser d’inventivité en matière de couvre-chef. Une honte ! Une si ridicule manifestation, le lendemain de la journée mondiale du la
lentille du Puy ? C’est décidé : vous voterez Mâchu !
Pour que rien ne vienne influencer l’électeur, il faudrait qu’il
se retrouvât, du vendredi minuit au moment où il atteint l’isoloir, isolé de
tout contact de quelque nature que ce soit. C’est totalement impossible. Et puis au fond qu’importe ? Si les gens
sont des girouettes sensibles à la moindre brise, qu’y peut-on ? Je serais assez d’avis que comme en
Angleterre la campagne n’ait pour limite que la fin du scrutin. La prolonger plus avant étant,
reconnaissons-le, abusif.