La jeunesse est l’âge des excès. Je le sais d’autant mieux
que je suis très longtemps resté jeune. Il arrive qu’en ces temps immatures où
l’on découvre un monde que les aînés vous décrivent comme injuste tout en se
gardant bien de vouloir le changer, on adopte des positions extrémistes. Avec le temps vient en général plus de mesure.
Il arrive qu’on s’accroche à ses idéaux de jeunesse, mais, si l’on continue de
déclarer être prêt à mourir pour ses idées, on y pousse plutôt les jeunes et quant à soi, on préférerait, comme disait
Brassens, que ce soit de mort lente.
Reprocher ses « errances » de jeunesse à un
quasi-septuagénaire comme le fit hier M. Valls à M. Goasguen me semble
ridicule. Je suis d’autant plus à l’aise pour l’affirmer que naguère je m’étais
montré un peu ironique dans un commentaire sur un billet de
Corto qui blâmait Jean Zay pour un poème qu’il écrivit à vingt ans.
Pour en revenir à l’ « affaire Valls-Goasguen »
dont bruissent nos media et qui menace la séance des questions au gouvernement de
se voir boycotter par les parlementaires UMP, elle met plus qu’autre chose en
évidence la différence existant entre l’attitude de la droite et la gauche face
à leurs extrêmes respectives. Un ministre reproche à un député d’avoir été en
son jeune âge proche voire membre d’un mouvement d’extrême droite. C’est
ressenti comme une grave insulte. Le contraire ne le serait pas. Il est
acceptable de ce côté-là d’avoir un temps non seulement flirté avec le trotskisme mais d’y avoir pleinement
adhéré. On sait pourtant à quel point l’ « entrisme » a été
pratiqué par cette tendance du marxisme afin de noyauter les organisations modérées.
Cette différence découle en fait du refus permanent, de la part de la
gauche modérée, à renoncer à toute alliance avec ses extrêmes. Comme je n’ai
cessé de le souligner récemment, le communisme, en dépit des dizaines de
millions de victimes qu’il compte à son actif, est considéré comme plus maladroit
que criminel. En revanche, fascisme et
nazisme allègrement amalgamés, le sont, comme tout mouvement susceptible d’être
assimilé par amalgame à ces mouvements même s’ils ne reprennent aucunement les
programmes des régimes autoritaires des années trente ou quarante et ne
sauraient prôner l’avènement d’un « homme nouveau ». Tout « conservateur » (comme si le
fin du fin était de ne rien conserver), tout « réactionnaire » (comme
si refuser certaines évolutions sociétales équivalait à un désir de retour au
temps du bon Charlemagne) se voit donc taxé de fascisme.
Ces amalgames comme cette tolérance pour l’extrême gauche ont
tellement bien pénétré les mentalités que la soi-disant droite les partage et en
vient à omettre de fustiger l’alliance gauche-extrême gauche, à refuser d’envisager
une possible alliance avec ceux qui sont à sa droite, à parfois blâmer ceux qui en son sein se
montrent un peu radicaux et à considérer comme inadmissible et offensante toute allusion à une possible
adhésion passée d’un des siens à un mouvement radical. Avec pour effet final de
faciliter l’accession et le maintien au pouvoir d’une gauche souvent
minoritaire.
La solution serait-elle de s’ingénier à diaboliser l’extrême
gauche ou d’envisager des alliances avec
l’extrême droite ? A moins bien
entendu qu’on ne se résigne à être gouvernés par une gauche de laquelle une
partie non négligeable de la soi-disant droite se sent assez proche que ce soit au niveau de l’interventionnisme
étatique ou des questions sociétales ?
Libre à vous de répondre…