La fin brutale d'Alfred votre porc
de compagnie vous laisse désemparé. Les excellents souvenirs qu'il
vous a laissés (Pâtés, rillettes, jambons, rôtis, côtelettes,
boudin, andouillette, lard, etc.) atténuent votre peine mais ne
sauraient combler le grand vide affectif que crée en vous son
absence. Vous aimeriez qu'un nouvel ami vienne ramener gaîté et
animation dans votre foyer. Seulement, les nombreuses qualités
d'Alfred vous ont rendu exigeant quant à celles qu'il devrait
posséder : dynamisme, joie de vivre, goût prononcé pour se
vautrer dans la boue, etc. De plus, être comestible serait un must.
Nous avons votre bestiau : le capybara !
Le capi-quoi, me demanderez-vous ?
La bête est en effet peu ou mal connue et c'est injuste car ses
mérites sont nombreux, nous y reviendrons. Il est d'autre part
détenteur d'un record mondial, celui du plus gros rongeur. Imaginez
une sorte de cochon d'Inde de plus d'un mètre de long, de soixante
centimètres de haut et pesant plus de cinquante kilos. Mais plutôt
qu'imaginer je vous propose d'admirer :
Magnifique, non ? Mais attention
avant d'en acheter un à l'animalerie la plus proche, permettez moi
de vous indiquer quelques prérequis à son adoption. Apprenez (fans
rire, f'il vous plaît, avoir un feveu sur la langue n'a rien
d'amusant) ce qu'en écrivait le naturaliste français Pierre
Barrère en 1741 : « Le cabiai (NDLR :
pseudonyme qu'utilise notre ami sur les réseaux sociaux) qu'on
nomme auſſi
Cabionara, eſt un animal amphibie qui habite ordinairement dans les
marécages ; il vit de poiſſon,
de fruits, de cannes à ſucre ; il eſt
délicieux à manger » . Si vous ne disposez pas d'un
vaste espace chauffé abritant une mare poissonneuse de bonne taille,
oubliez-le ! Il faut de plus que les lieux soient herbus et
plantés de canne à sucre (son nom dérive d'ailleurs du tupi
kapi'wara (« mangeur d'herbe »)). Si vous remplissez ces
conditions, cessez d'hésiter.
Les mœurs de cet animal sont très
douces. Il vit, au bord des cours d'eau, en groupes au sein desquels
certains s'occupent des petits tandis que les autres vont se
baigner, se nourrir ou s'enduire de boue. Il arrive que leur
accouplement, qui mènera la femelle à accoucher de deux à huit
capybarounets qu 'elle élèvera dans la crainte de Dieu (et
accessoirement des caïmans) et l'amour des rongeurs, ait lieu dans
l'eau après un cérémonial complexe. C'est d'ailleurs suite à
l'observation de ce phénomène que Léonce Bernotet lança en 1904
la mode des bains de minuit. Animal généralement pacifique, ses
incisives, larges de deux centimètres, peuvent infliger de cruelles
blessures à qui l'attaquerait. Il sait, comme le démontre la photo
qui suit, se montrer affectueux même avec les chats auxquels il
pardonne la cruauté et la lâcheté dont ils font montre envers
d'autres rongeurs de taille plus réduite.
Pour résumer, ce sympathique animal
saura amener à toute la maisonnée joie et tendresse. Reste le
délicat problème des vacances. Si de plus en plus d'hôtels et
d'hébergements divers acceptent les capybaras, rares encore sont
ceux qui sont à même de leur offrir les équipements nécessaires à
leur bien être, notamment sur la Côte d'Azur et même en Bretagne.
Vous verrez-vous contraint à condamner à une désespérantes
solitude ou à l'inconfort votre ami à quatre pattes ? Pour éviter ce
crève-cœur, de multiples solutions existent. Sans en faire la liste
exhaustive, je vous en communiquerai quelques unes : Le capybara
à l'orange, le carpaccio de capybara aux baies rouges, le rôti de
capybara à la moutarde et au miel, l'émincé de capybara aux dattes
et aux raisins, le sauté de capybara en cocotte etc. Ainsi, par sa
succulence comme il l'aura fait par son amitié, votre ami continuera
d'embellir votre existence.