Depuis le départ de Mme Taubira du
ministère de la justice, la scène comico-politique connaissait une
crise grave. Bien sûr, il nous restait Mmes Royal et
Vallaud-Belkacem ainsi que M. Cazeneuve. Mais, soyons lucides, si leurs
efforts pour nous distraire sont méritoires leurs résultats sont
mitigés. Les éternelles tergiversations et autres promesses de
« remises à plat » de l'une, la réforme du collège et
les études de genre de l'autre, l'interdiction de manifester à
Calais sous prétexte de risque de trouble à l'ordre public du
dernier (comme si un calme olympien régnait dans la cité!) sont des
tentatives louables, certes, mais tout au plus font-elles s'esquisser
de pâles sourires. Il nous fallait quelque chose de plus fort.
Vous en aviez rêvé, la CGT vous
l'offre ! En ce mardi 4 février de l'an quatre de la
moi-présidence, ce syndicat, par solidarité avec les « Goodyear »
condamnés, organise une grève du métro. Bafouant le droit
imprescriptible que toute personne ou tout groupe a de séquestrer
son prochain, une justice de classe a en effet osé infliger des
peines de prison à des gens qui ont agi, avec le succès qu'on a pu
constater, pour le bien commun. Il était urgent que l'on marquât le
coup. Seulement, à part à la SNCF ou à la RATP, malgré une lente
érosion, les bastions du syndicat cryptocommuniste se font rares et
son pouvoir de nuisance se réduit, ce qui nuit à sa capacité de
destruction de l'emploi. C'est donc la RATP qui s'est dévouée.
L'idée est excellente et gagnerait à
se généraliser. En effet, ce ne sont pas les occasions de se
solidariser avec les malheurs d'autrui qui manquent. On pourrait donc
envisager que plutôt que d'organiser, avec un succès parfois
mitigé, des grèves là où se posent les problèmes, ces dernières
se trouvent centralisées soit à la RATP, soit à la SNCF où elles
connaissent d'autant plus de succès qu'il est aisé de bloquer le
système en mobilisant une partie des conducteurs tandis que les
autres personnels pointent consciencieusement. Des licenciements dans
les conserveries de sardines ? Grève à la RATP ! Une
remarque désagréable adressé par un cadre à un employé du gaz ?
Grève à la SNCF ! On pourrait multiplier les exemples.
Et puis à l'heure de la
mondialisation, ne pourrait-on pas envisager que la CGT centralise
dans ses bastions toutes les revendications de la planète ? Les
« Durex » de Qingdao souhaiteraient une petite
augmentation ? On bloque le RER B ! Des licenciements à
Detroit chez General Motors ? Plus de TGV 15 jours durant !
L'heure est à la spécialisation, se concentrer sur son cœur de
métier est d'actualité, or dans quel domaine ces entreprises
excellent-elles sinon dans celui de l'arrêt de travail ? La
grève d'aujourd'hui n'est qu'un premier pas dans la bonne direction.
Et puis ne boudons pas notre plaisir :
voir de braves Parisiens de gauche contraints de marcher des heures
sous la pluie sans que leur conscience politique leur permette d'oser
critiquer la cause de leurs déboires est d'un comique irrésistible.