Il a été un moment dit qu’Andreas Lubitz, copilote chez
Germanwings de son état, aurait voulu un peu comme Érostrate laisser un nom
dans l’histoire. Il me semble avoir entendu quelque part que cette déclaration
aurait été infirmée. Mais qu’importe ? Ce qui compte c’est le
résultat : on ne parle que de lui et on envisage les mesures susceptibles
d’empêcher que se reproduise un tel événement. Pour certains, la solution
serait qu’il y ait en permanence deux personnes dans le cockpit. Pour d’autres
que l’on y installe des toilettes. Pour ce qui est d’être à deux dans les
toilettes du cockpit, c’est encore en discussion. Tout cela est bel et bon mais
qu’est-ce qui nous garantit que le malade mental en crise n’assommerait pas la
deuxième personne ou ne parviendrait pas
à enfermer son collègue dans les toilettes avant de précipiter son avion dans
un endroit propice à sa désintégration ?
Notre époque est friande de règlements et de précautions censés
éviter toute catastrophe voire tout risque. Je me demande si, après l’incendie
du Temple d’Artémise à Éphèse par ce fou d’Érostrate, les autorités compétentes
avaient renforcé les dispositifs de sécurité autour des six merveilles du monde
restantes au cas où cet acte insensé aurait fait des émules prêts à passer les
jardins suspendus de Babylone au Round-up*, à découper la statue chryséléphantine
de Zeus en petits bouts pour les revendre aux puces, à mettre le feu à la
pyramide de Gizeh (pas évident, ça), à saccager la statuaire du Mausolée
d’Halicarnasse à coups de burin, à couper une jambe au colosse de Rhodes pour
qu’il s’effondre ou à faire exploser le phare d’Alexandrie grâce à un procédé
innovant (la poudre n’ayant été inventée par les chinois que bien plus tard)…
On est en droit d’en douter, ne serait-ce que parce que la date de
l’établissement de la liste de ces merveilles est incertaine et qu’elle n’était
probablement pas clairement et définitivement établie à l’époque de l’incendie.
Une chose est certaine : la manie réglementaire
supposée nous garantir une sécurité absolue est récente. On peut en effet
penser que si chaque événement exceptionnel avait provoqué la mise en
application de mesures pérennes visant à en prévenir la reproduction il y a fort à parier que
leur nombre serait incalculable et leur connaissance humainement impossible.
N’importe comment, même si nous parvenions à nous prémunir contre les
catastrophes exceptionnelles et somme toute peu meurtrières, il n’en demeure
pas moins que les plus importantes, comme celles provoquées par les chutes de
météorites géants et à un moindre degré les guerres, invasions et autres
gigantesques tsunamis se contrefichent des règlements et des précautions qu’on
pourrait tenter de leur opposer…
*Si on n’a plus droit à un anachronisme de temps à autre, à
quoi bon vivre ?