Toute culture est véhiculée par une langue, pour l’Angleterre,
il s’agit de l’Anglais. Bien qu’appartenant au groupe germanique cet idiome
fut, pour les causes historiques que nous avons évoquées, très influencée par le français qui y demeura
langue de culture jusqu’au milieu du XIVe siècle et y survécut bien plus tard
dans le domaine juridique. Elle produisit une riche littérature dite Anglo-normande.
Bien qu’environ cinquante pour cent de ses mots soient d’origine française ou
latine, l’Anglais demeure largement incompréhensible et surtout imprononçable. En
bien des lieux, l’accent local n’a rien à voir avec celui que l’on enseigne en
nos écoles. Il n’y a donc aucune raison valable, sauf pour les espions allemands durant la dernière guerre, de tenter de le parler comme la reine. Sans
compter que, si la nature ne vous a pas dotée d’un sens de l’humour apte à
provoquer leur rire, votre accent français vous permettra de déclencher l’hilarité
de vos interlocuteurs anglais. Cette langue est devenue, via l’Empire
britannique et la relève qu’assurèrent les USA, LA Langue Mondiale. Un de ses grands
avantages est qu’il est assez facile de la parler très mal.
La littérature anglaise est si riche et a donné au monde tant
de grands écrivains si bien connus de tous que je ne vous ferai pas l’injure de
les citer. Pareil pour la musique, la peinture, la danse, la poésie, l’architecture,
la peinture et le cinéma. Mais ce qui rend la culture de ce peuple encore plus
étonnante c’est son mode de vie. La
cuisine anglaise est remarquable. TRÈS remarquable. Comme bien d’autres
cuisines, elle aurait pu choisir d’être simplement savoureuse, elle a choisi d’être
exceptionnelle par ses cuissons, ses sauces, ses mariages d’ingrédients. Il se
trouve qu’elle est rarement du goût des étrangers. Il semblerait même qu’elle
ne soit pas de celui des autochtones si
on considère le nombre de restaurants plus ou moins exotiques vendant des plats
à emporter qu’on y trouve partout. Curieusement, ouvrir un restaurant anglais
ailleurs qu’au pays n’apporte à son propriétaire qu’une clientèle de
compatriotes, et encore…
La nourriture n’est pas la seule caractéristique originale
de ce peuple. Il est fréquent qu’on y boive, à toute heure du jour et de la
nuit, des quantités industrielles de thé au lait. Curieusement, dans des débits
de boisson appelés Pubs (alors que le Public Bar, ne constitue que la plus populeuse des diverses salles de l’établissement),
les hommes se saoulent en ingurgitant quantité de pintes de bières diverses
tandis que leurs charmantes compagnes s’arsouillent aux spiritueux. Parmi les heureux mariages de boissons
pratiqués, le Pernod-Coca est le plus surprenant.
Au niveau des loisirs, on y joue, tout vêtu de blanc, aux
boules (sur herbe) ou au cricket. Ce dernier sport constitue une énigme totale pour
qui n’en connaît pas les règles complexes. En dehors de son pays d’origine il n’est
d’ailleurs pratiqué que dans ses ex-colonies et dominions (probablement parce que les traités menant à l’indépendance
imposaient sa pratique).
Appartenir à une nation qui assura sa puissance par la
maîtrise des océans laisse des traces. Aussi voit-on, même au cœur de l’hiver
des rangées de voitures garées face à la mer, sous la pluie, et dont les
occupants fixent les flots tout en mangeant un sandwich arrosé de thé au lait.
Le printemps venu, l’Anglais et l’Anglaise sortent leurs tenues estivales même
quand la température permettrait de supporter une grosse laine. Ils aiment fleurir
leurs jardinets, décorer leur maison et régulièrement repeindre de couleurs vives tout ce qui est
susceptible d’être repeint. Les intérieurs sont rendus confortables par d’épaisses
moquettes et de profonds fauteuils et sofas où l’on s’assoit, mug de thé au
lait à la main, pour contempler un radiateur électrique imitant si bien un feu
de charbon qu’un aveugle s’y laisserait prendre.
L’Anglais apparaît jusqu’ici comme un être discret, pondéré,
ouvert à l’autre et pacifique et pourtant chacun sait que le hooliganisme fait
des ravages en ce pays, que les jeunes s’y adonnent à de honteuses beuveries,
que le Sun, journal le plus lu, mène de temps à autre des campagnes
anti-françaises d’une rare violence (si dans les articles injurieux de ce journal,
on remplaçait « français » par «noir », « musulman »
ou « juif » il se verrait immédiatement interdit). Comment s’expliquent
de telles incohérences ? C’est très
simple : comme parmi les chasseurs, il existe de bons et de mauvais
Anglais. Fréquentez de préférence les bons.
Du point de vue économique l’Angleterre est un pays plutôt
riche. Elle tire ses principales ressources de la finance, des assurances, des
services, de la vente de souvenirs royaux et de gisements de pétrole et de gaz qui la
dispensent provisoirement d’avoir des idées. L’agriculture et l’élevage ne sont pas les deux mamelles de
Britannia, mais produisent quand même
quelques denrées. L’industrie automobile fabrique de très jolies voitures comme
les Rolls, les Bentley, les Jaguar, les Range Rover mais aussi des Nissan ;
l’an dernier, elle a produit plus de véhicules que la française alors qu’il y a
quelques décennies elle était en voie de disparition. Bien que M. Sarkozy n’y
ait jamais été au pouvoir, l’économie anglaise a été très durement frappée par
la crise de 2008 mais en dépit du fait que M. Hollande n’y soit pas aux
manettes, elle prévoit pour cette année une croissance encore plus forte (+
2.7%) que celle de l’an dernier.
Résumons-nous. Un voyage en Angleterre est-il envisageable
sinon souhaitable ? Ça dépend. Si vous êtes gourmand, et n’aimez ni le
chinois, ni l’indien, ni le tex-mex, ni le KFC, ni le Macdo, etc. : non.
Si vous cherchez un dépaysement total, si ne rien comprendre à ce qu’on vous
dit vous repose, si un prix astronomique des cigarettes ne vous fait risquer
aucun infarctus, si vous avez un goût immodéré pour le thé au lait et/ou la
bière tiède, si votre curiosité vous incite à goûter aux savoir-faire érotiques
des filles ou des fils d’Albion, si vous ne sauriez concevoir une belle journée
sans pluie, pourquoi pas ? Trois
conseils cependant :
1) Montrez vous prudent car traverser une rue peut s’avérer
dangereux vu que, du fait de la conduite à gauche, les véhicules arrivent d’où on les attend le
moins.
2) Pour faire plaisir aux Anglais et si vous êtes de sexe (ou de genre)
masculin, adoptez la tenue du Français typique : béret, marinière,
baguette sous le bras et, si vous visez la perfection, des tresses d’oignons
autour du cou et une bouteille de rouge à la main. Une moustache s’impose
également.
3) Faites l’effort de toujours prononcer « ze ou zi» l’article
« the » : votre popularité se verra ainsi assurée.
Vu que les
autochtones auront toujours tendance à vous regarder avec une certaine
condescendance voire à vous trouver ridicule, autant justifier leurs préjugés…