J’ai cru déceler, au fil de commentaires, certaines
réticences de Pangloss quant à mon
attitude vis-à-vis de quelques animaux
ou bestioles. Je me suis rendu sur son blog, y ai visionné toutes les (très
belles, soit dit en passant) photos de sa rubrique « Animaux
familiers et autres » et cela a provoqué une tempête sous mon pauvre
crâne, me plongeant dans un océan de réflexions diverses.
Contrairement au personnage joué par Philippe Noiret dans Coup de torchon, mes réflexions m’ont
amené à une conclusion claire : on
peut très bien vivre dans un endroit isolé sans pour autant être un fanatique
de ce qu’il est convenu d’appeler la nature.
Aimer la campagne n’a pas pour corolaire d’aimer la nature.
Car comme la ville et les espaces périurbains, la campagne n’a rien de naturel.
Elle a été aménagée, modelée, on pourrait même aller jusqu’à dire qu’elle a été
fabriquée par les efforts de générations et de générations d’hommes afin de
devenir un endroit vivable et productif. On a asséché les marais, défriché les
forêts, planté des haies, aménagé des chemins ce qui a probablement dérangé
voire éradiqué bien des sympathiques grenouilles, loups, ours, sangliers ou autres moustiques. Il s’agissait de mettre la « nature »
au service de l’homme, pas de faire joli, même si le résultat de ces travaux
rendait les campagnes agréables à l’œil.
Je m’inscris davantage dans cette logique que dans celle qui consisterait à
maintenir les choses dans un état « naturel » rêvé plus ou moins
éternel.
Si je plante des choux, c’est pour les manger et non pour
engraisser des larves de piérides. Si j’élevais poules, poulets, oies ou
canards, ce serait pour me nourrir et
non pour que renards ou hérissons se repaissent d’eux ou de leurs produits. C’est
d’ailleurs la difficulté de la mettre à l’abri des prédateurs qui m’a fait
renoncer à mon projet de basse-cour.
Il a fallu des siècles pour éradiquer loups et ours de nos
belles montagnes (seuls endroits où ils subsistaient après avoir été exterminés
en plaine). Ce n’était pas par méchanceté ni à cause de légendes qui tendaient
à faire de ces doux animaux de redoutables prédateurs de petits chaperons
rouges et de mères-grands mais parce que leur présence était difficilement
compatible avec l’élevage de moutons en altitude. Maintenant on les
réintroduit, on les protège, on les bichonne au nom de la biodiversité. Au nom
de cette valeur insigne on stoppe la construction de routes qui traverseraient
une mare où le cancrelat à crête mordorée, animal rare et essentiel, vient s’abreuver.
Tout ça est bel et bon, mais découle d’une conception moderne des rapports
entre l’homme et la nature. Si nos ancêtres avaient eu la même, nous serions
bien moins nombreux et moins bien nourris dans le meilleur des cas et dans le
pire notre espèce aurait disparu.
Trouver un équilibre entre agriculture, élevage et
biodiversité est délicat mais souhaitable. Faire de la biodiversité et du maintien en l’état de
la soi-disant « nature » une fin en soi ne me paraît pas très raisonnable.