J’ai suffisamment écrit sur la piéride
pour ne pas y revenir. Seulement, cette ivrognesse maléfique a des cousins
noctambules qui n’ont rien à lui envier en termes de nocivité, je veux parler
de ceux qu’il est convenu de nommer « papillons de nuit ».
Cet animal ne sait pas ce qu’il veut. Alors qu’il est
supposé être adapté à la vie nocturne, il n’a qu’une obsession : s’approcher
de toute source de lumière. A moins bien
entendu, et je n’en serais qu’à moitié étonné, que son but réel soit de pourrir
la vie des humains par son importune présence. Car il ne faut pas l’oublier l’humain est,
avec le ver luisant, la seule créature à fournir de la lumière une fois l’astre
solaire couché.
Pas plus tard qu’hier soir, le soleil de plomb du Sud-Manche
ayant rendu, comme bien souvent, la
chaleur lourde, je décidai de laisser ma fenêtre ouverte afin de laisser entrer
un peu de fraîcheur tandis que je m’adonnais à de saines lectures. Et ça n’a
pas raté : une bande de ces malfaisant s’est introduite, sans que nul ne l’y
invite sous mon toit, et s’est mis à mener autour des lanternes japonaises un raffut
du diable. Et vas-y que je me cogne, recogne et rerecogne ! Allez, dans ces conditions, vous concentrer sur les aventures d’une
femme, qu’elle soit d’état ou pas…
Chez une créature nocturne, ce goût de la lumière est
paradoxal. On est d’ailleurs en droit de se demander ce que faisaient ces
créatures inconsistantes du temps où les hommes ne leur offraient pas, comme
aujourd’hui, d’innombrables et intenses sources de lumière. Se
contentaient-elles de tourner comme des folles autour des femelles lampyres exacerbant la juste
jalousie de leurs mâles ? Papillonnaient-elles aux alentours du sommet de
tout mât en regrettant que l’homme mît tant de temps à inventer le lampadaire ?
Ce qui rend l’animal encore plus bête qu’inutile et importun,
c’est que sa manie de la lumière n’est tempérée par aucune prudence. Ainsi au
temps déjà anciens de la lampe à pétrole et à celui plus récent du lampadaire à
halogène n’était-il pas rare de voir ces crétins venir s’y bruler les ailes avant
de s’y incinérer le corps laissant derrière elles une odeur nauséabonde de chitine
brulée parvenant, par-delà la mort, à continuer d’ennuyer l’humain.
Décidément, rien ne semble plaider en faveur de ces tristes
insectes. Un physique disgracieux, des habitudes alimentaires répugnantes (ils
se nourriraient de fruits en décomposition, de cadavres, de fumier, de
sécrétions végétales etc. !) ne font que renforcer le dégoût qu’inspire à
tout être sensé sa regrettable existence. Certains lui
attribuent des fonctions écosystémiques :
Ils seraient pollinisateurs et constitueraient une source importante de
nourriture pour les insectivores nocturnes comme les araignées et les chauves-souris ! Comme s’il était positif d’aider ces
dégoûtantes bestioles à subsister !