..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

vendredi 19 septembre 2014

Courrier des lecteurs (3)



Ce courrier m’est arrivé il y a déjà quelques mois. Il semble aujourd’hui que pour Nicolas le temps des hésitations soit passé et qu’il n’ait pas tenu grand compte de mes conseils. L’avenir dira s’il a eu raison…

Cher Monsieur,
Je me trouve à ce qu’il faut bien appeler un tournant de mon existence et j’hésite sur la direction à prendre. Vous sachant de bon conseil, j’aimerais avoir votre avis sur la question qui se pose à moi.

Le C.V. ci-joint vous apprendra qu’après une ascension rapide au service de mes concitoyens,  j’ai été appelé à remplir de hautes fonctions électives. Hélas, un concurrent, usant de la calomnie et de promesses irréalistes, est parvenu à s’emparer d’un poste qu’il s’est bien vite révélé totalement inapte à occuper. La réaction de la population ne s’est pas fait attendre et il est vite devenu l’objet de la colère et des railleries des braves gens. Il n’est plus guère soutenu que par une poignée d’inconditionnels, laquelle continue de fondre comme neige au soleil avec tous les dommages que cela entraîne pour sa fonction.

Mon sens du devoir comme l’amitié de mes nombreux partisans me poussent à entrer de nouveau dans l’arène politique malgré la promesse solennelle que j’avais faite à tous de ne plus m’en mêler. Prendre la tête de l’opposition serait renoncer en partie à la vie confortable qu’un riche mariage me permet de mener. D’un autre côté, l’oisiveté me pèse comme m’affligent les ravages infligés au pays par la politique de mon successeur. Je dois également vous signaler que certains de mes collaborateurs d’antan semblent vouloir me remplacer dans un rôle que leur talent et leur inexpérience les rend incapables de tenir.

Voilà où j’en suis. Devrais-je écouter la voix du devoir ou les sirènes d’une vie paisible ? Tel est mon dilemme.

Cordialement,

Nicolas S.

Cher Nicolas,

Je comprends à quel point la période que vous traversez peut être inconfortable. Un homme de votre énergie ne saurait demeurer oisif. Sans que vous le disiez, on sent que se trouver vivre aux crochets d’une femme si douce et aimante soit-elle, ne convient pas à votre mental de chef. D’un autre côté, le souvenir d’une gloire passée peut, comme le dit Don Diègue, s’avérer cruel. Êtes-vous certain que n’entre dans votre désir de retourner à la vie publique aucun désir de revanche ? Que ce soit ou non le  cas, je ne saurais trop vous déconseiller de regarder la vie dans le rétroviseur. Le passé étant le passé, vous ne sauriez y trouver votre avenir.

N’existerait-il pas une troisième voie sur laquelle vous engager qui vous permettrait d’éviter les vicissitudes de la vie politique comme l’ennui d’un trop calme bonheur ? Je suis persuadé que si vous vous trouviez un nouveau domaine d’activité votre talent vous permettrait bien vite d’y exceller et ainsi de tirer un trait sur les temps révolus. Un homme qui comme vous, ayant débuté comme simple cantonnier à la commune de Saint-Julien-sur –Bouzine a été capable d’accéder au poste de garde-champêtre avant d’en devenir le maire, ne saurait que réussir, quelle que soit l’activité qu’il choisira.

Avec mon fervent soutien,

Jacques Étienne

Tradition ?



J’ai, d’une oreille distraite et de façon intermittente plus ou moins suivi la conférence de presse de M. Hollande. Une chose m’a frappée : à un moment, le président s’est mis à parler de l’histoire et de la tradition françaises. Entendre le représentant le plus éminent d’un parti (oui, je sais, il est théoriquement président de tous les Français, mais avec 13% de soutien, cette fiction devient de moins en moins crédible) qui, à moins que je ne m’abuse, me semble ennemi de tout ce qui peut rappeler les traditions et l’histoire séculaires de notre pays s’en dire le défenseur m’a laissé pantois. Il a continué, pour donner un exemple de son inscription dans le respect de nos principes nationaux, par rappeler le sacrifice des troupes coloniales lors des derniers conflits mondiaux et réaffirmer la légitimité ainsi acquise par leurs descendants  à s’intégrer à notre communauté nationale. Raisonnement qui me paraît spécieux car une participation plus ou moins volontaire d’ancêtres à la libération d’un territoire ne constitue aucunement  un titre suffisant pour appartenir à une quelconque nation. En ce cas, Anglais, Américains, Canadiens, Australiens, Polonais, Tchécoslovaques, Grecs et Norvégiens auraient également ce privilège suite à leur participation au débarquement de Normandie. En fait, les deux questions ne sont aucunement liées : c’est le droit du sol et lui seul qui offre la nationalité française aux enfants d’étrangers nés en France. Des enfants d’Allemands ayant combattu la France et nés sur son sol ont le même droit à devenir Français.

Le problème est que lorsque M. Hollande parle de tradition et d’histoire, il n’en retient qu’une partie largement fantasmée. Pour lui, la France n’a de traditions que celles des droits de l’homme, du « progrès » et de l’ « ouverture sur l’autre » et son histoire ne commence qu’en 1789, et encore en en effaçant les périodes ne s’inscrivant pas dans le droit fil de la « Grande Révolution » (et en se couvrant la tête de cendres au souvenir de politiques pourtant républicaines comme fut la colonisation). Si on ne retient que les trois éléments de tradition précédemment cités, la porte est ouverte à toutes les entreprises de destruction de ce qui a construit notre identité nationale (excusez l’obscénité du terme) française. Une « tradition de progrès » autorise à mettre cul par-dessus tête tout ce qui a pu être patiemment mis en place afin de donner une certaine unité à la nation. Que s’y établissent le communautarisme, le multiculturalisme ne pose pas problème : le pays n’est qu’un territoire. Curieusement, ce territoire qui n’est en sa majeure partie que le résultat d’une multiséculaire politique de conquêtes et d’annexions menée avec des hauts et des bas par nos rois, s’inscrirait selon notre chef d’État, dans des frontières intangibles. C’est du moins ce qu’on peut en conclure quand ce dernier a décrit les tendances sécessionnistes de certains comme un danger menaçant l’Europe (qu’on peut le soupçonner de vouloir supranationale).

En résumé, pour M. Hollande (en admettant qu’il soit cohérent) la France n’est qu’un territoire aux frontières immuables, ne pouvant survivre que dans le cadre de l’Union Européenne et où la « tradition de progrès et d’ouverture à l’autre»  permettrait de remettre en question tout ce qu’elle a hérité de sa longue histoire et d’accueillir sans nécessairement les assimiler ceux  qui désireraient s’y  installer. Pas grand-chose, en somme…

Je ne suis pas certain de m’inscrire dans ce qu’il nomme « tradition ». J’en ai même une tout autre conception…

jeudi 18 septembre 2014

Des « petites phrases »



Un nouveau scandale secoue notre république : un certain M. Macron, ministre de l’économie de son état,  aurait osé prononcer, parlant de la société GAD,  la phrase suivante : « Il y a dans cette société une majorité de femmes et il y en a qui sont pour beaucoup illettrées.» Passons sur la forme qui n’est pas des plus correctes : au lieu de « et il y en a qui sont pour beaucoup illettrées » il eût mieux fait de dire « dont beaucoup  sont illettrées » mais on lui demande d’être meilleur économiste que rhétoricien, non ?  Et évidemment de droite comme de gauche, tout le monde de crier « Haro sur le ministre ! ».  Rendez-vous compte : un soi-disant socialiste qui traite les ouvrières d’illettrées ! On aura tout vu ! Quelle morgue ! Quel irrespect !

Les eût-il qualifiées de grosses pouffiasses ou de tueuses en série qu’on eût pu parler d’injure (et accessoirement de calomnie) mais que je sache, être taxé d’illettrisme évoque certes un handicap mais ne constitue pas nécessairement une insulte. Il se peut qu’il ne s’agisse que d’un constat. Toute recherche sur Google avec les mots « Illettrisme GAD » vous mène à des articles où est signalé qu’il existe parmi le personnel de cette entreprise d’abattage un taux élevé d’illettrisme : 20 %. Ce n’est pas rien si l’INSEE estime le taux moyen chez les 16-60 ans à 9,5%.  Et quoi d’étonnant à cela si on tient compte de ce que ce taux est bien supérieur en milieu rural (Il dépasserait les 20%) et du fait que, quoi qu’on en dise, il est moins nécessaire de maîtriser l’écrit pour travailler dans un abattoir que pour devenir professeur de Lettres ou critique littéraire.

Le pire, dans cette histoire, c’est que l’on a retiré la phrase, voire le mot, de son contexte. M. Macron prenait les ouvrières illettrées de GAD  comme un simple exemple de personnes qui bénéficieraient d’une réforme du permis de conduire qui en abaisserait le coût et en réduirait les délais. Mais en un temps où la dénonciation des « petites phrases » et autres « dérapages »  constitue l’alpha et l’oméga de l’argumentation politique comment s’étonner  de ce « scandale » ? 

Je ne viens pas ici défendre un ministre socialiste dont la récente nomination interdit qu’on puisse porter un quelconque jugement sur son action et ses éventuels résultats. Je déplore simplement l’habitude qu’ont prise les media de monter en épingle de soi-disant écarts de langage en ignorant volontairement le contexte dans lequel ils ont été prononcés et qui font l’âne pour avoir du buzz. Ce que je déplore encore plus, c’est que tant de gens leur emboitent le pas. Il faut dire que scandaliser sur un mot est plus aisé qu’argumenter et qu’il est plus facile de se souvenir d’une phrase ou d’un mot que d’un raisonnement logique. Le pouvoir de nuire en est décuplé. Tel mot, telle phrase, restent durablement attachés à telle ou telle personne.

Les socialistes ont largement utilisé cette technique pour discréditer leurs adversaires. Ils ne peuvent donc pas s’étonner qu’elle soit aujourd’hui utilisée contre eux. Mais quand le berger répond à la bergère de la même désolante manière, on ne peut que déplorer la vulgarité de l’un comme de l’autre.

Dernière Minute : M. Edwy Plenel, qui décidément ne saurait en rater une, a déclaré ce matin sur la RSC™, alors qu’il était venu causer dans le poste de son dernier opus Pour les musulmans, a cru voir dans la phrase du ministre une attaque de la soi-disant élite contre les Bretons, « premiers immigrés de l’intérieur ». En tant que fils d’immigrés de l’intérieur et petit-fils de paysans illettrés et sans terre, je me demande si ce monsieur est vraiment stupide ou s’il fait semblant. Quel que soit le cas, on ne peut qu’être frappé par l’excellence du niveau atteint.

mercredi 17 septembre 2014

L’amour n’est plus dans le pré…



…et c’est bien dommage !  Car l’interruption de cette émission de M6 me pose question : Qu’est-ce que je vais faire le lundi soir quand il n’y a rien d’intéressant à regarder ? Je pourrais bien sûr m’adonner aux joies de la lecture mais ces derniers temps les livres que je tente de lire ou de relire me tombent des mains tant ils m’ennuient. Dans le meilleur des cas, j’arrive à en lire quelques pages chaque jour avant de tomber de sommeil et finalement de les abandonner définitivement.

Pour ceux qui débarqueraient de la planète Mars après un séjour d’une décennie, je préciserai qu’il s’agit d’une émission de téléréalité où des agriculteurs (et trices) viennent chercher l’âme sœur. Au début de l’année on propose aux téléspectateurs (et trices) un portrait des candidats à la passion. Ceux qui ressentent, suite à cette diffusion, le désir irrépressible de les rencontrer leur écrivent une missive, de préférence enflammée. Les agriculteurs (ou trices) lisent leur courrier et sélectionnent les prétendants (ou dantes) qui leur plaisent le plus et les invitent à un speed-dating  suite auquel ils choisissent leurs deux préférés (ou rées) qui viennent à la ferme pour un séjour d’une semaine afin de se mieux connaître. Suit un choix entre les deux personnes concernées (au cas où, bien entendu, aucune n’est déjà partie) et si celle (ou celui) qui est choisi en est d’accord, le paysan (ou la sanne) vont en ville découvrir l’ « univers » de leur chéri (ou rie). S’ils continuent de s’entendre comme cul et chemise, ils partent pour un week-end de rêve à Romorantin, Châteauroux, Hénin-Beaumont ou tout autre endroit également fascinant. La saison se termine par un bilan où tous les participants se retrouvent pour faire le point sur ce que leur a apporté leur participation. Certains arrivent en compagnie de celle (ou celui) qui avait fait l’objet de leur choix, d’autres avec un (ou une) autre, certains arrivent brocouilles comme chasseur en Bouchonnois. Ils ont commencé une vie commune, des projets de mariage, ressenti de bien amères déceptions mais sont quand même assez contents de leur coup vu qu’ils sont tous devenus copains comme cochons.

Bien entendu, tout cela est entièrement bidonné. Il s’agit d’un show et, comme disait Béart, « dans le spectacle, y’a pas de miracles ». On sélectionne les agriculteurs comme pour n’importe quel panel : il faut un (ou à la rigueur deux) beaux gosses, une fille du genre pas facile à traire, un gros bouseux au cœur gros comme ça, un rigolo (ou une lotte) etc.… Suivant la catégorie à laquelle on appartient, le volume du courrier varie énormément (curieusement, le beau gosse en reçoit généralement plus que le gros plouc, quelque soit son hypertrophie cardiaque). Les motivations profondes des candidats (et dates) à l’amour rural varient. Certains semblent surtout être là histoire de passer à la télé tandis que d’autres paraissent (pourquoi pas ?) sincères. Plus on a de courrier, plus on peut sélectionner de prétendants (ou dantes) au speed-dating. Ainsi, le beau gosse de service voit-il arriver des cohortes de jeunes femmes canons tandis que son gros péquenaud de collègue a bien du mal à en faire venir deux. On se demande d’ailleurs ce qui se passerait si un candidat (ou une date) ne recevait aucun courrier : louerait-on des prétendants ? Tenterait-on de convaincre, faute de mieux, une prétendante du beau gosse  de revoir ses ambitions à la baisse ? La présentatrice annoncerait-elle à Marcel que, faute de combattantes l’aventure s’arrête là ?  Ils font leur cuisine comme ils veulent…

Ensuite, il s’agit d’un montage où on nous montre ce que l’on veut. Je suppose qu’au cours des diverses étapes de l’ « aventure » on ne filme pas tout et que de ce qui est filmé on ne conserve que ce qui est susceptible de plaire aux téléspectateurs (scène tendre, franche engueulade, moments de tensions, etc.). Du coup, certains (ou taines) apparaissent plus abrutis que nature, extrêmement sympathique (et on comprend mal pourquoi plutôt que de fondre à la perspective de folâtreries rurales leurs prétendants (ou dantes) les envoient paître).  De même certains revirements sont curieux : le prétendant (ou la dante) énamouré comme chien en rut ne donne aucune suite ou file à l’anglaise sans qu’on comprenne bien pourquoi. Ce qui est bien troublant…

Mais me direz-vous, si vous considérez que tout cela est bidonné et pas très cohérent, pourquoi perdez-vous votre temps à regarder cette ânerie ? Eh bien, parce qu’il n’y a aucune raison pour que je n’exerce pas mes droits imprescriptible à regarder  de la daube et aux passe-temps futiles. Parce que c’est quand même pas trop mal ficelé, qu’on maintient un certain suspens,  et qu’en plus de « quelque chose de Tennessee » j’ai en moi un peu reste de midinette que d’éventuelles belles histoires peut émouvoir. Et aussi parce que le lundi soir ça m’évite les dilemmes.