Pour rivaliser avec le Rrom, je ne vois guère que le
sans-papiers : même amour de la France, même ardeur au travail, même désir
effréné de s’intégrer, même volonté de voir ses enfants s’élever socialement
grâce à l’ascenseur que constitue l’école
républicaine.
Ces nobles aspirations que l’on aimerait voir partagées par
nombre de nos concitoyens un rien fainéants, assistés, rétifs à tout savoir ne
leur valent cependant pas toujours l’estime qu’ils méritent. Ainsi certains
mettent-ils en doute la sincérité de ces braves gens et voient en eux des
parasites seulement attirés par les
avantages matériels qu’ils pourraient éventuellement retirer de leur présence
dans notre beau pays. D’autres, j’en
frémis, vont jusqu’à mettre en doute leur profonde honnêteté voire même leur
goût du labeur et leur amour des choses de l’esprit. Comment peut-on être
injuste à ce point ?
Ce rejet frileux va jusqu’à pousser quelques extrémistes à
ne point se réjouir de leur enrichissante présence dans leur voisinage
immédiat. Ainsi voit-on un ministre de l’Intérieur Socialiste poursuivre leur
expulsion et des municipalités réclamer (et obtenir !) l’évacuation de
leurs pimpants campements. Tout cela par basse démagogie afin de s’attirer la
sympathie de nauséabonds dépourvus de
tout discernement. Dans le fond, ces derniers sont les plus à plaindre :
même s’ils n’en ont pas une claire conscience c’est pourtant eux qui passeront
à côté de tous les bienfaits qu’une telle présence leur aurait apportés.
Dieu merci, la France n’est pas peuplée que d’inconscients
aveugles. Il existe encore des gens capables de réaliser où est leur intérêt. C’est pourquoi, vu le peu d’entrain
que mettent le gouvernement et les
collectivités locales à offrir à ces braves gens le coquet pavillon et le
jardin fleuri où tous leurs talents pourraient éclore et fructifier, je pense
qu’est venu le temps de l’action individuelle.
Pourquoi ceux qui
pensent comme moi et disposent de quelques pièces dont ils ne se servent pas n’y
recueilleraient-ils pas une famille de Rroms ?
Il ne s’agirait aucunement d’une bonne action inspirée par
je ne sais quelle charité mais d’un bon calcul. Je ne dresserai pas une liste
exhaustive des avantages que l’on pourrait tirer d’une telle initiative. Nul
doute que voyant le rejet faire place à
l’accueil, la reconnaissance de ces braves gens serait sans borne et qu’ils
mettraient cœur et talent au service de leurs amis, leur rendant de multiples quoique
menus services : entretien du jardin, amélioration du logis, etc. Bien
entendu, leur fierté leur interdirait de
se voir rémunérés. Le tout serait de ne
pas en abuser : un logement gratuit
est certes un avantage conséquent, mais dont la valeur pourrait bien vite être dépassée par celle des services
rendus si l’on omettait d’y mettre un frein.
C’est avec enthousiasme que je profiterais des avantages d’une
telle présence. Malheureusement, je vis
dans des lieux reculés où le travail est rare. L’éloignement de toute
métropole rendrait difficile l’accès des jeunes aux universités et aux grandes écoles. De plus
ma maison est petite. Je crains que pour
ces raisons accueillir une telle famille serait moralement blâmable en ce que
les avantages que j’en tirerais seraient probablement disproportionnés par rapport
à ceux, très faibles, dont je serais en mesure de la faire bénéficier.
Je dois donc me résigner à ce que d’autres, vivant dans un environnement urbain mieux
adapté, puissent profiter de cette
chance. La vie est souvent injuste !