Les commentaires sont un des attraits que l’on peut trouver à tenir un blog. Ils vous donnent l’impression, autant sinon plus que les statistiques de visites, que l’on ne poursuit pas un monologue logorrhéique face au néant. Ça rassure.
Parmi les commentateurs, il en est de toute sorte. La régularité et la fidélité de certains font qu’au fil du temps on finirait par les considérer comme faisant partie de la famille au point de s’inquiéter de leur santé si par aventure ils vous faisaient faux-bond. On apprécie également le retour d’autres moins réguliers. Et puis il y a les trolls. Qui viennent s’indigner dans des endroits où ce sont généralement eux qui indignent. J’en ai un, voire deux (que je dois à l’honnêteté reconnaître partager avec Didier Goux). Il est rare que des polémiques s’installent parce que le ton de mes billets s’y prête peu. Enfin il y a l’ (les) anonyme(s) de tendance généralement trollesque dont on ne sait s’il est unique ou légion.
L’autre jour, je m’entretenais gentiment avec un anonyme tout en me plaignant de son statut. Je lui signifiais que, alors que j’utilise ma véritable identité pour rédiger mes billets, je trouvais son manque de visibilité un rien gênant. Sa réaction fut étonnante :
« Allons, vous n'êtes pas aussi naïf. Vous avez sans doute aussi une famille que certains de vos écrits pourraient déranger. »
Il est vrai que j’ai une famille. Pas très nombreuse, mais quand même. J’ai également quelques amis. Curieusement, les membres de cet entourage se doutent, allez savoir pourquoi, que mon gauchisme est modéré. Ma fille me lit régulièrement, il arrive que mon frère aîné le fasse. Ce dernier, de gôche bon teint, m’a même dit me trouver « moins cynique » que dans la « vraie vie ».
Si l’on suit la logique de mon anonyme commentateur, je devrais adopter dans la vie un profil bas, faire semblant de m’enthousiasmer pour MM. Hollande, Mélenchon, Poutou ou Mme Arthaud et le soir venu, volets clos, porte fermée, verrous tirés, caché sous un impénétrable pseudonyme, bien à l’abri derrière (ou plutôt devant) mon petit écran, laisser libre cours à ma mauvaise nature, dégoisant « mes rancœurs et mes haines ». Car, pour une belle âme, certaines opinions ne peuvent être que le fait d’être falots, rancis dans leur médiocrité et prenant une pathétique revanche sur leur triste vie par le truchement de messages innommables.
Curieusement, il ne viendrait pas à l’idée de mon aimable conseil de mettre en garde les gentils MM. Mélenchon, ou Poutou ni même la douce Mme Arthaud contre la gêne que pourraient occasionner l’expression de leurs opinions parmi leurs proches. Pas plus qu’il ne leur conseillerait d’organiser leurs meetings sous un faux nom et affublés de masques. Il faut croire que ces braves gens ne disent rien qui soit susceptible de choquer quiconque…
Un peu plus tard, mon anonyme correspondant revint à la charge. Comme j’avais nommé mes parents, il me lança un cinglant : « Sont-ils très fiers d'être nommés dans un blog de ce genre ? » La honte qu’en ressentiraient ces chers disparus m’apparaît un rien spéculative. J’admire par ailleurs l’expression « un blog de ce genre ». On en frémit !
Une lecture attentive de mon blog devrait permettre à ce brave garçon de voir qu’il n’y a rien qui puisse en lui tomber sous le coup de la loi. Du moins en l’état présent de la législation. Fais-je l’apologie du racisme ? Lancé-je de quelconques appels au meurtre ou à la simple haine ? Que nenni !
Seulement, suite à des décennies de lavage de cerveau, des êtres simples en viennent à considérer que le fait de ne pas hurler avec les loups de gôche est en soi un délit. Ce faisant, alors qu’ils voient du fascisme partout , ils ne se rendent pas compte que la soi-disant bonté qui les anime mène plus surement aux camps et au goulags divers que la prétendue méchanceté de ceux qui choquent leurs nobles sentiments.