Depuis quelque temps, on voit apparaître dans les débats de Cnews de nouveaux intervenants. Ils ont en commun leur jeunesse et aussi un niveau culturel élevé et un bagout phénoménal. Des sortes de modernes Pic de Mirandole bavards. Agrégés, désagrégés, suragrégés, on sent bien que leur savoir dépasse largement leur spécialité. Qu’ils soient philosophes ou historiens, aucun sujet ne leur est étranger. Qu’il s’agisse de politique intérieure ou extérieure, d’immunologie, d’épidémiologie, de politique sanitaire, de psychiatrie poutinienne, de stratégie, d’armement ou de technique du bilboquet, rien n’échappe à leur encyclopédique savoir. Du coup, M. Praud reste comme deux ronds de flan face à ces petits génies. Il faut dire que la nature a doté le bon Pascal d’une glande admirative surdimensionnée : qu’on soit de Gaulle, Mitterrand, BHL, la Mère Denis, Mbappé, Zelensky, Bernard Tapie, Delon, Gabriel Attal ou sa crémière c’est avec peine qu’on échappe à son admiration, quitte à se voir voué aux gémonies quelque temps plus tard. C’est son côté ravi de la crèche.
Eh bien moi, dont cette glande est un atrophiée, je ne partage pas son enthousiasme. Ces jeunes gens ne sont certes pas dépourvus de talent mais il leur manque, à mes yeux un savoir fondamental, celui qu’engendre l’expérience, à savoir la capacité à mettre les événement en perspective. Ils sont « docti cum libris » mais, justement, ils ont passé l’essentiel de leur temps dans les livres. C’est le problème qu’ont bien des universitaires qui ont cependant généralement la sagesse de se cantonner à leur domaine d’excellence. Ce que ne font pas nos jeunes débatteurs.
On pourra m’objecter qu’ils apportent un sang nouveau dans des débats où sévissent couramment de vieux birbes ou des birbes d’âge moyen (si tant est qu’un birbe comme une ganache puisse n’être que quadra- ou quinquagénaire). Qu’ils apportent avec eux l’enthousiasme (et le dogmatisme pur sucre ) de leurs convictions qui manquent souvent aux vieux routiers du commentaire qui en ont vu bien d’autres dans leur (chienne de) vie et ne prennent pas tout pour argent comptant.
C’est justement cet enthousiasme et ces convictions que je reproche à ces jeunes gens. J’ai, par exemple, tendance à faire davantage confiance, en matière de stratégie ou d’armement à un vieux général blanchi sous le harnois qu’à un gamin n’ayant pour toute connaissance de la guerre que les récits de son père, ancien combattant de mai 68 et quelques lectures. A mes yeux, comme disent les Anglais, « ils sont encore un peu humides derrière les oreilles » ou comme on dit en bon français « On leur presserait le nez, il en sortirait du lait ».
Mais bon, nous vivons une époque moderne où il faut que toute catégorie et donc la jeunesse soit représentée. Au risque présenter des têtes à claques comme de grands sages.