Sur l’attestation de déplacement
dérogatoire il y en a très peu qui peuvent me concerner vu que je
suis retraité, que je ne pratique aucun sport, que je n’aime pas
me promener, que je n’ai aucun animal de compagnie, que mes chers
parents sont décédés depuis belle lurette, que je n’ai, du moins
pour l’instant, aucun problème avec la justice ou toute autre
administration et que je ne vois pas de quelle utilité je pourrais
être dans une quelconque mission d’intérêt public.
Seuls
les achats de première nécessité et les soins des patients
atteints d’une affection de longue durée me concernent. Pour ce
dernier motif, voyant mon médecin traitant une fois tous les trois
mois afin qu’elle renouvelle mon ordonnance et que je l’ai vue
début mars, je suis tranquille jusqu’à début juin. La seule
occasion de sortie dans ce cadre c’est pour, une fois par mois
aller chercher mes médicaments à la pharmacie.
Restent
donc les achats de première nécessité. Les tabacs ayant été
autorisés à rester ouverts, il est raisonnable de penser que c’est
afin qu’ils vendent du tabac et qu’en allant, tous les dix jours
acheter une cartouche de cigarettes je ne risque aucunement de
connaître les foudres de la loi et cela d’autant moins que je
m’arrange pour en faire l’emplette en même temps que d’autres
achats.
Mais
il y a le reste. On lit ça et là que des personnes ont été
verbalisées par les forces de l’ordre sous le prétexte qu’elles
avaient, entre autres denrées acheté qui des paquets de gâteaux,
qui une teinture pour les cheveux, qui des tampons périodiques etc.
Bref, des articles que, dans leur grande sagesse, les zélés
représentants de l’ordre n’avaient pas jugé être de
« première nécessité ». Mais qu’est-ce qui
l’est au juste ? Où peut-on consulter une liste exhaustive
et précise de ces dits achats ? Existe-t-elle seulement ?
La réponse à ces questions est que c’est difficile à déterminer
et que la liste n’en est pas dressée.
La
conséquence en est que vous êtes livré pieds
et poings liés à l’arbitraire
du policier. S’il estime que, quand
vous avez acheté un paquet de nouilles en plus d’un paquet de riz,
l’un des deux perd de son absolue nécessité : il peut vous
verbaliser. La viande, le poisson, les œufs, les produits laitiers
font-ils partie des
achats de première nécessité ? Les végans prouvent que non :
amende. En admettant que l’on
puisse acheter des produits provenant d’animaux. Lesquels sont
vraiment indispensables ?
Pas ceux provenant du cochon, vu que les musulmans vivent (parfois)
très bien en n’en mangeant pas. Saucisse=contravention. On vit en
absurdie.
Que
faire ? Doit-on interdire à la vente tout produit
n’apparaissant pas dans une liste dressée par les autorités
compétentes (si elles existent) ? Dans ce cas, les commerçants
devraient logiquement supprimer de leurs rayons tout article n’y
figurant pas, ce qui, en plus de rendre la plupart des magasins aussi
bien approvisionnés que ceux de la regrettée URSS, aurait pour
conséquence de les mener à la faillite.
De
plus, j’aimerais qu’on m’explique en quoi le fait que j’achète
en plus d’achats nécessaires, un paquet de lames de rasoir ou de
rasoirs jetables (produits dont la première nécessité est
contestable, vu que je pourrais très bien porter la barbe sans que
ma vie ne soit menacée) met en danger la santé, voire la vie
d’autrui et fait de moi un délinquant.
Ne
pourrait-on pas recommander aux policier de faire preuve sinon de
bienveillance du moins d’un peu de bon sens et, comme le disait si
bien M. Pompidou, d’« arrêter d’emmerder les Français » ?