Ce qui fait le prodigieux intérêt de
ce modeste blog est la diversité des sujets qu'on y aborde et du ton
sur lequel on les traite. En effet, si le sérieux est de mise pour
les véritables sujets d'inquiétude que connaît notre France du
XXIe siècle (piéride du chou, scandale des crevettes,
réintroduction du loup dans Paris intra muros, etc.), c'est sur un
ton plus enjoué qu'on y évoque les futilités politiques et
insurrectionnelles qui provoquent comme un clapotis dans le verre
d'eau politico-médiatique. Je vais aujourd'hui confirmer cette
diversité de ton et de thèmes en vous entretenant de l'ouvrage que
je lis en ce moment après avoir, dans mon précédent billet, évoqué
une grave question.
Il s'agit de CROIS OU MEURS Histoire
incorrecte de la révolution française de
M. Claude Quetel que les éditions Tallandier/Perrin ont offert à la
concupiscence des lecteurs en mars de cette année et qui semble
connaître un certain succès, vu qu'il se classe premier de sa
catégorie chez M. Amazon.
En quoi l'incorrection revendiquée
par l'auteur consiste-t-elle ? Eh bien parce qu'elle s'attaque
au mythe des deux révolutions. L'une, gentille et sympathique en
diable qui en 1789 offre au bon peuple, jusqu'ici opprimé sous le
joug conjugué de la noblesse et du clergé, tous les droits dont il
pouvait rêver et qui a fait de notre beau pays une sorte de paradis
et de modèle pour l'humanité toute entière. L'autre, celle des
années 1793-1794 où une Terreur auto-proclamée envoya par milliers
des suspects voir si on se sentait plus léger une fois séparé de
sa tête, celle où les colonnes infernales pacifièrent la Vendée
en employant des méthodes qui feraient passer la division Das
Reich qui, en juin 1944, sévit en mon cher Limousin pour une
troupe d'humanistes sourcilleux.
Pour M. Quétel, il n'en est rien. On
trouve en germe dès 1789 la violence, l'intolérance, l'incompétence
et l'idéalisme sanguinaire qui mèneront logiquement à la Terreur.
Le coupage de têtes et autres joyeusetés citoyennes, par un
glissement continu de la modération à l'extrémisme, passeront du
stade artisanal à l'échelon industriel après élimination des
diverses vagues de radicalisation par celle qui leur succède pour
arriver à la dictature de Robespierre et autres Saint-Just dont la
chute n'est due qu'à un complot de personnages dont les mains sont
aussi ensanglantés que les leurs mais qui se débarrassent de ces
monstres avant qu'ils ne les dévorent .
Cette vision n'a rien d'original me
direz-vous. Toute révolution plus ou moins réussie est dès son
départ violente. Exploitant la colère populaire, des idéologues se
proclamant animés d'intention généreuses, poussent un mélange de
racailles et d'exaltés sincères à renverser le régime et à
bouleverser l'ordre établi. Loin de résoudre les problèmes du bon
peuple que les idéologues veulent transformer en une humanité
meilleure, les nouveaux dirigeants ne parviennent qu'à accroître
misère et disette, provoquent des guerres civiles et les plus forts
ou les plus habiles d'entre eux ne parviennent, après élimination
physique de leurs rivaux, à se maintenir au pouvoir que par
l'instauration d'une dictature sanguinaire bien entendue établie au
nom de la liberté, de la justice et de la lutte contre la tyrannie.
Ce qui, plus que toute autre chose,
fait l'intérêt de ce livre est le talent avec lequel l'auteur
traite son sujet, campe ses personnage suggère leur incapacité, leur folie ou leur
rouerie. Ce livre d'histoire de plus de 400 pages se lit comme un
excellent roman : on est pressé d'en connaître la suite tout
en regrettant qu'inévitablement toute suite mène à une fin. Ce qui
est d'autant plus méritoire que toute personne un tant soit peu
intéressé par l'histoire en connaît déjà les épisodes et le dénouement.
Maintenant, si vous pensez que la violence révolutionnaire est une
inévitable source de progrès et qu'en coupant quelques têtes on
peut résoudre certains, voire tous les problèmes, NE LISEZ PAS
CE LIVRE !