Depuis quelque temps, le loup se voit
défendu bec et ongles par de braves gens qui lui trouvent toutes les
excuses : l'animal serait craintif, doux, humble et discret.
S'il lui arrive, exceptionnellement, de s'attaquer à des brebis,
c'est simplement que les bergers français font mal leur boulot,
s'équipent de chiens inadaptés, en gros sont des grosses feignasses
imbéciles contrairement à leurs homologues italiens qui non
seulement cohabitent avec ce canidé mais apprécient ses nombreuses
qualités, lesquelles sont si nombreuses qu'en dresser la liste est
une gageure que nous nous empresserons de ne pas relever.
On se demande bien pourquoi au fil des
siècles l'homme s'est ingénié à l'éradiquer. Il faut dire que
ladite éradication fut le fait de gens frustes et superstitieux plus
enclins à croire aux légendes calomnieuses qu'à la douce vérité.
Curieusement, ces êtres sans lumières se sont laissé persuader que
le loup représentait un danger pour l'activité pastorale ! Il
était temps que notre vingt-et-unième siècle naissant rétablisse
la réalité comme il a su le faire dans bien des domaines
sociétaux : le loup est l'ami de l'éleveur au même titre que
les racailles de banlieue sont ceux de la police. S'il lui arrive de
se montrer taquin envers les brebis, c'est par jeu. Certains verront
dans les rares égorgements d'ovins qu'on lui attribue (souvent à
tort) la vengeance d'un herbivore contrarié par des concurrents
déloyaux. C'est faux. En fait, en supprimant les éléments les
moins rapides ou les plus stupides d'un troupeau ce canidé participe
à une sélection naturelle et, partant, à l'amélioration de la
qualité des races ovines.
Et puis c'est bien connu, le loup ne
hante que les montagnes où ils réguleraient la prolifération des
cervidés dans les forêts ombreuses si d'inconscients pastoureaux ne
venaient les y provoquer. Certains esprits chagrins vous diront que
ces canidés ne sont pas plus montagnards de nature que ne le sont
les Druzes ou les Kurdes et que s'ils se sont trouvés réduits à
choisir cet habitat c'est que, comme les peuples du Proche-Orient
susmentionnés, les gens des plaines les y ont contraints. Ce qui
expliquerait pourquoi le terme occitan « loup » a
supplanté en pays d'Oil celui de « leu » vu qu'il fut
plus facile d'éradiquer cette pauvre bête dans les plaines du Nord
que dans les montagnes du Sud. Admettons que ce ne soit pas
entièrement faux. Ce serait une bonne nouvelle ! Ainsi on
pourrait réintroduire le loup partout.
S'il y a un endroit où le loup serait
le bienvenu, c'est en notre belle capitale : en effet, il y
compte de nombreux amis, lesquels, a la différence des paysans
abrutis des siècles passés, ont une conscience pleine et entière
des douces mœurs de la bête et lui réserveraient l'accueil
chaleureux qu'il mérite. Cette réintroduction ouvrirait la voie à
celle du vibrion cholérique et du Yersinia
pestis auxquels les
siècles ténébreux qui ont précédé nos temps de clarté ont calomnieusement attribué des ravages imaginaires.