Aguichés par un article du journal local, nous prîmes hier la
route de Brécey afin d’y visiter un petit château. Arrivé en ce glorieux chef
lieu de canton, du château convoité nous ne vîmes aucun panneau indiquant la
direction. En revanche, un autre était signalisé. Nous suivîmes les flèches et
parvînmes à une superbe demeure où nous
demandâmes à une charmante vieille dame arrivée en même temps que nous si elle connaissait
l’objet de notre quête. Elle fut incapable de nous renseigner clairement mais
nous annonça que ladite demeure était également ouverte à la visite et nous
proposa gentiment de nous guider.
Visiblement, la brave
vieille dame était passionnée par ce monument construit au début du règne de Louis
XIII mais dont le granite laissait mal deviner les quatre siècles d’âge. Nous
découvrîmes un splendide escalier, de vastes salles, un tunnel de fuite, de
belles voûtes dont l’enduit disparu laissait voir la brique. Il ne restait que
le logis central, les deux ailes d’origine ayant servi de carrière, comme il se
doit, lors de la révolution. De sa gloire passée ne restait que ce qu’avaient
daigné en laisser les vandales de 1793. Toutefois, je fus touché par le
dévouement de notre guide à qui le grand âge rendait la marche difficile mais
qui malgré tout mettait un point d’honneur à transmettre sa passion. Après des
remerciements et un symbolique don, nous quittâmes l’endroit et finîmes par
trouver le château qui nous avait attiré là.
La demeure était bien plus modeste. Il s’agissait plus d’un
manoir de hobereau que du palais de grand seigneur que nous venions de découvrir.
La visite était assurée par la propriétaire qui nous expliqua comment son mari
et elle étaient parvenus à rendre du lustre à ce que les fermiers qui l’occupaient
il y a plus de vingt ans avaient fait de
la demeure. Restauration de la tour, récupération d’un escalier d’époque, modifié pour desservir les étages,
restauration des sols, abattage de cloisons pour rendre aux pièces leur
grandeur passée… Plus de deux décennies d’efforts, de sacrifices, de choix coûteux
autant que douloureux entre telle ou telle rénovation…
Ainsi des gens, que ce soit en tant que membres d’association
ou de propriétaires tombés amoureux d’une bâtisse au point de tout lui
sacrifier, transmettent tant bien que mal l’amour du patrimoine. Cela
continuera-t-il ? Le fameux
métissage dont on nous bassine et qu’on nous décrit inéluctable sera-t-il en
mesure de produire de telles personnes et des amateurs pour apprécier leurs
efforts ? J’avoue ne pas en être
certain.