C’est vrai, notre cher président n’a qu’un seul adversaire :
le monde de la finance. Costaud comme il est, je n’aimerais pas être à la place
de ce monde-là. Je n’ai pas sa chance. En tant que jardinier, j’ai des tas d’ennemis.
Parmi eux, j’ai déjà évoqué la piéride, le campagnol, la fourmi, le merle, la
taupe. Et voilà que la liste s’allonge…
Depuis quelque temps, je m’inquiétais de la lenteur que
mettaient à lever mes flageolets. Semés peu après les haricots verts, ils ne
montraient aucun empressement à sortir leurs cotylédons de terre alors que les
premiers grandissaient en taille et en beauté. N’y tenant plus, je décidai de prendre le
taureau par les cornes. Je grattai donc la terre en suivant le rang et je m’aperçus
qu’aucun grain, germé ou pas n’y restait de mon semis. "Dieu me shampouine, m’interrogeai-je,
aurais-je été victime d’un grainetier escroc ?" Question sans grand intérêt
car le jardinier est homme d’action : plutôt qu’à ressasser ses échecs
passés, il concentre ses efforts sur les succès futurs. J’avais un plan B. L’an
dernier j’avais récolté des haricots que j’avais laissé sécher. Extraits du
bocal de verre où je les avais entreposés, ils deviendraient la moisson future
de mes sillons hugolai-je in petto !
Je m’en fus donc quérir ledit bocal en vue d’un nouvel
emblavage. C’est alors qu’un frisson glacé parcourut mon échine : en
retirant le couvercle du bocal, je vis qu’il était habité par nombre de ces
choses immondes :
Le répugnant coléoptère ne mesure en réalité que 3 ou 4 mm.
« Des charançons, puisqu’il faut les appeler par leur
nom, lafontainai-je ! » Ces
hontes de la création qui n’ont pour but que de ruiner les féculents que le
trop confiant humain entrepose en ses maigres réserves ! Ces animalcules, que leur nature chafouine
poussent à se dissimuler sous des pseudos divers comme le pseudo-aristocratique
« Bruche du Haricot » ou le pédant « Acanthoscelides obtectus ». Ces suppôts du malin dont les parents
pondent sur les cosses, dont les larves s’introduisent subrepticement dans la
légumineuse, en dévorent l’intérieur et n’en sortent qu’adultes afin de
perpétuer cet infernal cycle ne laissant de vos haricots qu’une enveloppe
trouée emplie de leurs déjections.
Allais-je laisser
le désespoir m’envahir ? Devrais-je descendre en toute hâte au bourg
voisin afin d’y acquérir de nouvelles semences ? C’eût été oublier que le matois collinicole a
toujours un plan en réserve (sinon comment survivrait-il à la rudesse de son
environnement ?). Le plan C fut immédiatement mis en œuvre : des
profondeurs du buffet, un verre contenant d’autres graines non charançonnées
fut prestement extrait. Ces graines avaient été à l’origine du succès insigne
de ma récolte de 2013 et provenaient de celle de 2012. En priant pour que leur
ardeur germinative n’ait point été amenuisée par le temps, je les semai.
Voilà où nous en
sommes.