…selon le grand philosophe Eddy Constantine (ou Heigegger,
je confonds toujours les deux) « nous laissent groggys et nous rendent
tous cinglés ». Eh bien, pour une fois je ne suis pas d’accord avec lui.
On peut dire que ma journée d’hier a été placée sous le signe de ces trois
éléments nocifs. En effet, profitant d’une exceptionnelle absence de
précipitations, nous nous rendîmes au col d’Ibardin où nos amis espagnols, dont on ne louera jamais assez l’obligeance,
offrent dans nombre de ventas quantité de produits à notre concupiscence et cela
à des tarifs TRÈS compétitifs au point que les dix cartouches de cigarettes et
les neuf litres d’alcools forts que j’en
ai ramené sont en mesure d’effacer la dépense que m’occasionna le carburant
nécessaire au trajet Manche-Espagne. Nous en profitâmes pour déjeuner sur place
dans un restaurant avec vue imprenable
sur la chaîne des Pyrénées et cela pour un prix modique.
Et que viennent foutre les petites pépées là-dedans, s’inquiétera
le lecteur attentif ? Rien. Ce n’est qu’au retour qu’une d’elles, ou
plutôt elle, intervînt. Ma fidèle Nicole à qui j’avais signalé les désirs
répétés de jeunes et jolies filles de devenir mes amies sur Facebook, m’avait
raconté avoir vu à la télé une émission sur le sujet où était expliqué qu’il s’agissait
d’arnaques venues d’Afrique. De braves garçons créaient un profil de super nana
sur FB puis proposaient son amitié à des hommes souvent d’âge mûr. Il arrivait
que la sauce prît et que le brave homme tombât, enamouré, dans les rets de la « belle ».
Cette dernière, alors qu’elle disait s’apprêter à rejoindre l’amour de sa vie
afin de lui prouver que le feu qui la consumait ne se bornait pas à son âme,
grâce au billet de train que son fiancé venait de lui payer (la pauvre n’ayant
que son cul pour toute fortune), tombait soudain malade. C’est vraiment pas de
pot. Surtout qu’à la suite de scandaleuses erreurs administratives la sécu
venait de la radier ou ne trouvait plus
trace d’elle. Avant que son appendicite ne se transforme péritonite, il était
donc urgent d’envoyer de l’oseille sous forme d’un fort mandat Western Union.
Et, au cas où l’amoureux ne reniflait toujours pas l’embrouille, les malheurs
pouvaient continuer jusqu’à l’épuisement financier du gogo… Nicole me suggéra,
lors d’une nouvelle demande de l’accepter, histoire de voir.
C’est ainsi qu’avant-hier soir j’acceptai la demande de la
belle Sandra. Quelques secondes plus tard, je reçus un message de la mignonne qui s’enquérait de
ma forme après m’avoir informé du côté olympique de la sienne. Je la déclarai moyenne : ma femme m’emmerdait et en plus
elle se demandait ce que je pouvais bien fabriquer sur FB. L’échange s’arrêta là. Je la crus découragée.
Alors qu’hier soir je parcourais mon journal, je reçus un nouveau message s’enquérant
de ce que j’avais fait de ma journée. Poli, je lui retournai la question. Elle
m’annonça être restée couchée chez elle à regarder la télé, vu qu’elle était
célibataire. « Célibataire, une belle fille comme vous, voilà qui m’étonne,
lui déclarai-je » Mon étonnement l’intrigua. Je l’expliquai par le fait qu’habituellement
les jolies filles, allez savoir pourquoi, tendaient à être recherchées… C’est
alors que Sandra me dévoila le douloureux secret de son cœur : son amour l’avait
abandonnée pour, je vous le donne en mille : sa meilleure amie ! Du
coup, elle avait perdu toute confiance en les hommes et son cœur était brisé. Devant
telle félonie comment aurait-il pu en aller autrement, franchement ? Elle me demanda ce qu’était ma situation
amoureuse. Je lui répondis, désabusé, qu’à mon âge, n’est-ce pas … C’est alors
que la mutine coquine me posa une question un peu surprenante, vu le contexte
général : « N’aurais-je pas envie d’une relation amoureuse avec elle ? ».
Je lui rappelai son cœur brisé et la nouveauté de notre relation… Certes,
répliqua-t-elle, mais son malheur datait de trois ans. Trois ans ? Tout s’expliquait !
Après une telle période de deuil abstinent,
je comprenais qu’elle se ruât sur le premier venu. Je lui fis cependant
observer que la différence d’âge, la distance (elle disait habiter Nice) et une
femme jalouse pouvaient constituer de menus obstacles, la fantaisie nous prendrait-elle
de concrétiser cette affection naissante… Sandra, balaya d’un revers de main
mes réticences. J’ajoutai à la liste de mes problèmes une santé vacillante. En
vain : Sandra n’est pas de celles qu’un rien arrête. Elle se montra
compatissante pour celui qu’elle appela « son ange » (on m’a traité
de bien des choses dans ma chienne de vie, mais d’ange, c’est bien la première
fois)…
Tout cela était bel et bon mais le temps tournait et malgré
l’hilarité que provoquaient en moi ces échanges, je tombais de sommeil. Après
lui avoir signalé que tout cela méritait qu’on laissât passer une nuit de
réflexion, je souhaitai une nuit reposante à la belle et la rayai de ma liste d’amis,
bien conscient de la déception qu’une telle action provoquerait chez un honnête
africain en quête de subsides. Mais, que voulez-vous, je n’ai pas de cœur,
brisé ou pas…