Deux faits m’ont récemment plongé
dans des abîmes de réflexion : L’affaire du « mur des cons » du
Syndicat de la Magistrature et la lecture dans un billet de blog de cette
phrase perturbante : « Il y a une dose d'intelligence à
ne pas dépasser. » L’auteur de cette dernière phrase expliquait ainsi le
refus de l’émission C dans l’air de passer ses SMS.
Certains esprits chagrins ont déploré dans la fameuse
affaire du mur le biais politique que pouvait laisser supposer cette
« blague potache » comme il est de bon ton de la nommer à gauche.
Admettons, comme je l’ai fait que le juge soit bon enfant et de nature rieuse.
Il n’en demeure pas moins que
l’affichage de telle ou telle personnalité ou parent de victime sur le dit mur
ne peut se justifier que si les gens concernés sont de VRAIS cons. Au cas
contraire, plus qu’un biais politique, ma foi tout à fait pardonnable, cela
indiquerait de la part des magistrats farceurs un défaut de jugement ce qui,
avouons-le, constitue un grave défaut pour qui fait profession de juger. Ce serait même rédhibitoire.
La phrase sur les excès d’intelligence qui a retenu mon
attention est sur la forme tout à fait acceptable et justifie pleinement
l’attitude de ceux qui refusent les SMS
en question : infliger au téléspectateur une overdose d’intelligence peut
présenter des risques. Le principe de précaution impose donc de l’éviter.
Maintenant, on pourrait imaginer que le refus passer ces questions à l’antenne
soit dû à tout autre chose : il est possible qu’on ne les ait pas jugées
pertinentes voire totalement cons.
Ces deux exemples posent le problème de l’appréciation de
l’intelligence et de la connerie. La
question est en effet délicate : elle laisse supposer qu’existent de
grandes inégalités en ce domaine, ce qui est en soi scandaleux. Certains
seraient très intelligents (et même parfois trop, comme cette blogueuse) et
d’autres irrémédiablement cons. Irrémédiablement car l’intelligence ne peut
rien pour le con. Elle peut tenir à ce dernier des discours littéralement
dégoulinants d’intelligence mais c’est en pure perte vu que le con n’est ni en
mesure de les comprendre ni capable d’en apprécier la valeur. C’est pourquoi si
intelligent soit on, on est fatalement le con d’un autre.
Mais nous vivons au XXIe siècle, en France, pays des droits
de l’homme. Ne serait-il pas temps que ce triste état de fait cesse ? Ne pourrait-on pas envisager la création d’un
organisme officiel chargé d’évaluer scientifiquement le degré de connerie ou
d’intelligence des discours et de leurs prémisses ? L’évaluation des prémisses est en effet
primordial dans la mesure où un discours apparemment intelligent, charpenté,
argumenté et logique ne peut mener qu’à des conneries s’il se base sur des
prémisses stupides.
Le problème de la nomination des membres de cet organisme
serait bien évidemment délicat à résoudre. On peut même raisonnablement penser
qu’il serait insoluble. En effet, s’ils devaient être nommés sur des critères
objectifs de capacité, qui, en dehors d’un comité similaire, serait en mesure
de décider qu’ils les remplissent ? Le serpent se mord la queue…
Nous pourrons donc en toute impunité continuer d’affirmer la
connerie des autres du haut de notre sublime intelligence et peut-être même en
raison inverse de l’une et de l’autre.