Hier, dans un commentaire par ailleurs édifiant, Suzanne a inséré un lien vers un article
du Nouvel Obs faisant écho aux propos de Jean-Jacques Hazan, le président de la
Fédération des conseils de parents d'élèves
selon lequel "L'orientation
choisie par les élèves avec leurs parents doit être respectée". Pour ce
brave homme, l’orientation n’est qu’une sélection et la sélection, si on veut
rester poli, mieux vaut ne pas dire ce qu’il est correct d’en penser.
Que l’orientation des jeunes ne soit pas parfaite est
certain. De là à respecter les vœux émis par les élèves en concertation avec
leurs géniteurs, il y a un grand pas difficile à franchir. La tendance des
parents à surestimer les capacités de leur progéniture semble aller
grandissant, de façon inversement proportionnelle à la confiance qu’ils accordent
aux enseignants. Tenir un minimum compte
des capacités de l’élève me semble souhaitable. Faire faire des études
littéraires à un illettré ou des études scientifiques à qui ne comprend rien
aux maths mène dans le mur. Et puis que l’on aime ou pas la sélection arrive un jour où d’une manière
ou d’une autre elle s’opère.
Les propos de cet éminent représentant de parents d’élèves
(sa fédération est majoritaire) me rappelle une anecdote.
Un de mes collègues instituteur avait un élève qui lui
posait de gros problèmes. Ayant doublé son CP, en Cours Élémentaire ses
capacités de lecture demeuraient nulles et ses aptitudes à calculer étaient du
même niveau. Il lui semblait que l’élève relevait d’un enseignement spécialisé.
Pour en parler, il convoqua donc les parents. Le père vint. Il avait une
opinion sur les aptitudes de son gamin plutôt différente. On en ferait un
ingénieur ! D’abord désarçonné par tant d’assurance, mon collègue se ressaisit
et tenta de ramener l’homme à une vision plus réaliste. A force d’arguments, il
parvint à faire comprendre au parent déçu qu’il valait mieux abandonner ses
rêves d’ingéniorat. Résigné, en partant, il déclara à l’enseignant médusé, « Si on
ne peut pas en faire un ingénieur, on en fera toujours un petit instituteur comme vous… »
S’il est souhaitable de tenir davantage compte des motivations
profondes de l’élève quand elles existent, respecter les vœux de parents chez
qui l’affection l’emporte sur la raison risquerait de mener à bien des
déceptions…
Mais qui suis-je pour oser contredire si grand seigneur que
M. Hazan ?