Je dois le confesser, j’ai longtemps voté FN. Plus de vingt-cinq ans en tout cas, ce
qui, en termes de lurettes en fait une de belle taille. Comment, s’offusqueront
certains, vous, un homme si posé, si sage, si cultivé, si plaisant en faits et
en dits, si tout ça et le reste (certains sont bougrement flatteurs !),
vous mêlez votre bulletin à celui des 25 % d’abrutis bas du front, que leurs
échecs en tout domaine ont emplis d’aigreur de peur et de haine qui s’en
prennent à d’autres malheureux, victimes comme eux d’une société injuste, et
dont le manque total de clairvoyance nous feront revivre Les Heures Les Plus Sombres De Notre Histoire™ si un sursaut
citoyen ne venait démocratiquement leur ratatiner la gueule à coups de barres à
mines? Je répondrai catégoriquement : NON. Je n’ai pas voté aux
européennes : j’étais en vacances. En revanche, j’ai voté pour ce parti
plus ou moins régulièrement auparavant.
Dans un premier temps, je répondrai aux inévitables
questionnements qu’un tel aveu ne peut manquer de soulever. Seriez-vous raciste ?
Non. Je ne crois aucunement en la supériorité d’une race sur une autre. Seriez-vous
antisémite ? Non. Je ne suis pas plus antisémite que philosémite, en fait,
toujours par absence de racisme, j’ai tendance à m’intéresser davantage aux
qualités des individus qu’à leur appartenance à une ethnie, une religion ou à
une communauté. Êtes- vous fasciste ? Non. Le fascisme entre autres défauts capitaux donne un trop grand
rôle à l’état et je me vois mal défiler en uniforme en acclamant un quelconque
chef (de plus j’ai une sainte horreur de la foule, quelle qu’elle soit). Êtes-vous
xénophobe ? Non. Ayant vécu nombre
d’année à l’étranger, je n’ai jamais agressé
de locaux et y ai même cultivé des amitiés (et plus dans certains cas d’affinités).
Êtes-vous un ennemi de la démocratie ? Il m’arrive de trouver bien des
défauts à ce système, notamment en réalisant que les fans de foot, les
carnavaleux de Dunkerque ou les plus gros mangeurs de tripes ou de boudin ont
eux aussi le droit de vote, mais comme disait Sir Winston, « La démocratie est le pire système de
gouvernement, à l'exception de tous les autres qui ont pu être expérimentés
dans l'histoire. »…
Ces détails éliminés, qu’est-ce qui
peut bien pousser un homme ayant plus de
passé que d’avenir, peu de penchant pour la haine, disposant de ressources
suffisantes à combler ses modestes besoins, vivant dans un cadre paisible et très
agréable (du moins pour lui), doté d’un relatif sens de l’humour, de beaucoup
de recul vis-à-vis des passions et qui s’adonne à de paisibles passe-temps à
soutenir l’insoutenable ? La
réponse est très simple : J’aime la France. Pas un simple territoire, pas
un pays porteur d’un message universel autant que filandreux, non j’aime le pays dont j’ai hérité la langue, la
culture et que j’aimerais bien transmettre, non pas intact mais si possible
amélioré ou au pire pas trop abîmé à ceux qui me suivront.
Or il me semble que l’immigration de
masse que nous continuons de connaître, alliée à la promotion du communautarisme et du
multiculturalisme, rendra un tel
transfert impossible. Il me semble également que le progressisme, l’égalitarisme,
et plus généralement tout ce dont la gauche se réclame est éminemment
mortifère. Ces deux raisons m’ont amené
à soutenir M. Le Pen, qui, qu’on le veuille ou non et malgré son goût de la
provocation, était le seul à s’élever clairement ainsi qu’avec quelque succès contre les errances gauchistes et une immigration
de masse que nul ne songeait plus à assimiler. Est-ce à dire que je souhaitais (ou
croyais en) sa victoire ? Aucunement, je voyais simplement dans le vote FN
un moyen d’aiguillonner une droite virant au centrisme, à la faire se
préoccuper des sujets qui m’intéressaient. Sarkozy nous a fait, en 2007, le
coup du « Je vous ai compris ». J’ai voté pour lui des deux mains,
aux deux tours. Je me souviens de la joie partagée avec mon père et ma fille le
soir de son élection. Et puis, passée la fête, adieu le saint : rien n’a
suivi. Il a retenté le même coup en 2012, mais c’est plus par défaut, pour
barrer la route au clown d’aujourd’hui que j’ai voté pour lui au deuxième tour.
Maintenant, où en sommes-nous ? Le Rassemblement Bleu Marine se veut un
mouvement ramasse tout, adopte un programme de gauche, tente de séduire les
modérés de tout bord ; l’UMP est tellement hétérogène qu’une vache n’y
retrouverait pas son veau. Nous voilà
donc dans de beaux draps (oui, oui, je sais, Céline, LHLPSDNH et tout ça) ! J’avoue qu’entre un ventre mou, un
nationalisme socialiste et un socialisme
progressivement délirant, je n’ai que l’embarras du refus. Après tout,
peut-être devrais-je m’en foutre complètement, regarder pousser mes légumes, s’épanouir
mes fleurs et espérer que le déluge ne viendra qu’après nous…
C’était pourtant un sacrément beau pays !