Plus j’y réfléchis, plus je me dis qu’en prenant le maquis j’ai fait le bon choix. Étant né et ayant grandi en région parisienne, j’ai, chaque fois que les circonstances me l’ont permis, décidé de vivre à la campagne. Depuis près de quarante-cinq ans j’y ai passé l’essentiel de mon temps.
Si je mets en balance les avantages de ma situation actuelle avec celle que je connaîtrais dans une ville grande ou moyenne, y’a pas photo.
Point de vue logement, alors que dispose d’une maison particulière de 100 m² habitables, dans une grande ville ou son agglomération, tout juste aurais-je pu m’offrir pour son prix un placard nommé studio Je bénéficie de plus d’un terrain qui me permet de cultiver légumes et fleurs, de cuire mes repas sur le barbecue quand le temps s’y prête et de m’y dégourdir les jambes par une tournée d’inspection le matin sans quitter mon pyjama.
Ici, on ignore les embouteillages et les problèmes de parking. Les rues sont calmes, dépourvues de ces clodos, teneurs de murs et autres fumeurs de crack qui enrichissent nos riantes cités.
Étant passé de l’isolement des collines au bourg voisin depuis quatre ans, je peux en cas de nécessité m’y rendre aux commerces à pied. L’offre est un peu restreinte mais en un quart d’heure je peux me rendre au Leclerc de Vire où le choix est plus étendu. J’ai toujours été client de la grande distri : pas de commerçants obséquieux et des prix avantageux. Je m’y rends tous les huit ou quinze jours entre midi et deux pour éviter la foule et toute attente aux caisses.
On mobjectera que les activités culturelles sont réduites, que l’offre médicale est quasi inexistante mais vues ma répugnance à me mêler à toute foule, ma sociabilité embryonnaire et vu que je passe le plus clair de mon temps en dehors des hôpitaux et des cabinets médicaux, je n’en souffre aucunement. D’autant moins que, grâce à la sage gestion de nos gouvernements successifs, il semblerait que l’offre médicale se raréfie partout.
Je suis parfaitement conscient que certains, dans un tel cadre de vie, mourraient d’ennui. La foule, les enrichisseurs et leurs aimables facéties, la promiscuité, l’insécurité, le bruit, la fureur, la pollution, les spectacles auxquels ils n’ont ni le temps ni les moyens d’assister, les élus écolos, les trotinetteurs fous et bien d’autres désagréments leur manqueraient. C’est d’ailleurs très bien comme ça. Ça évite l’envahissement.
Et ils échappent à tout ça :
bouquets frais cueillis du jardin
barbecues et repas en plein air
contemplation des fruits et légumes qui poussent et mûrissent et des fleurs qui éclosent
récolte de pommes de terre nouvelles