vendredi 5 mars 2021

Des déconstructeurs

Comme j’ai pu l’exposer dans mes deux articles précédents il est difficile de cerner la notion d’identité française et beaucoup plus simple de dire ce qu’elle n’est pas. Quiconque tend en définir avec précision les composantes s’expose aux critiques fondées des déconstructeurs* auxquels il est facile de montrer que TOUS les Français ne possèdent pas ces caractéristiques et partant que cette identité n’existe pas.

Si on parle de l’existence d’un substrat catholique dans notre pays, il est aisé de dire que des minorités juives y ont toujours (ou presque) résidé. Pour le Professeur Djamel Debbouz, de l’Université de Trappes, l’Islam serait même présent en Europe depuis trois mille ans**. Dans certaines régions, et malgré les guerres de religion et les persécutions subséquentes demeurent des communautés protestantes. A partir de ces constats, les déconstructeurs s’empressent d’en tirer la conclusions que ce substrat catholique n’est pas une composante pertinente de la culture et de l’identité du pays. Curieuse conclusion si l’on considère que le moindre village possède une église et que le nom d’environ 12 % des communes françaises commence par « Saint- » ou « Sainte- ».

La démarche de déconstruction est simple : pour elle, la moindre exception infirme la règle au lieu de la confirmer. Les phénomènes les plus marginaux se trouvent de ce fait hissés à la hauteur des majoritaires et tout est d’égale importance. La méthode a pour but d’exalter le particulier aux dépens du général et de fractionner la société.

Si la méthode est contestable, le but en est limpide : il s’agit de faire passer toute identité nationale pour illusoire afin de laisser la place à un multiculturalisme présenté comme aussi ancien qu’incontestable. Les défenseurs de l’identité sont non seulement d’incorrigibles rêveurs mais de dangereux rétrogrades désireux de nous ramener aux heures les plus sombres de notre histoire car le sentiment d’appartenir à une nation ne peut logiquement que mener au nationalisme et inéluctablement au nazisme. Cette reductio ad hitlerum si ridicule soit-elle, véhiculée par des « élites » auto-proclamées et perpétuées par la cooptation, continue de trouver un certain écho dans l’opinion et même, hélas, un écho certain.

Face à l’enfer identitaire et au repli sur soi le multiculturalisme propose le paradis divers et ouvert du « vivre ensemble » non seulement avec les éléments allogènes déjà présents mais avec tous ceux que l’envie saisirait de venir les rejoindre. Dans ce nouvel Eden, les multiples minorités vivraient en harmonie dans le respect mutuel et l’amour. Ça fait envie !

Sauf que…

Une des conséquence du refus de l’identité et de l’exaltation des minorités s’oppose à l’assimilation de ces dernières vu que, si on suit les déconstructeurs, il n’existe rien à quoi s’assimiler. Tout minoritaire doit donc conserver ses caractéristiques propres que, curieusement, on néglige de lui contester. Parallèlement et paradoxalement, alors les races n’existent pas, ces mêmes progressistes attribuent aux blancs (qui n’existent pas) en général et aux Français en particulier, des caractéristiques peu flatteuses : ils sont tous racistes, colonialistes, esclavagistes, la voilà leur véritable identité ! Ayant martyrisé des siècles durant le reste du monde comment pourrait-on s’attendre à ce que leurs malheureuses victimes qui, « chassées par la misère », viennent s’installer sur leur sol ne leur en veulent pas un tout petit peu ? Suivant l’argument imparable du loup de La Fontaine, on dit au français du XXIe siècle : « si ce n’est toi, c’est donc ton trisaïeul ou bien quelque autre ancêtre ». Tu dois donc expier ses fautes jusqu’à la énième génération.

C’est ainsi que nous voyons fleurir des mouvements de défense des Noirs ou décoloniaux qui tiennent à l’encontre des blancs (notez l’absence d’une majuscule que selon certains ils ne sauraient mériter) des discours de haine que l’observateur distrait pourrait juger à la limite du racisme. On les voit organiser des manifestations où ils défilent bras dessus, bras dessous avec les déconstructeurs. Bref, il devient incertain que l’harmonie rêvée du paradis multiculturaliste soit aussi harmonieuse qu’on essaie de nous la vendre…

En encourageant le ressentiment des immigrés contre le pays qui les accueille plutôt qu’en les incitant à s’assimiler, il me semble qu’on prépare mal le monde merveilleux de demain. On m’opposera que ce ressentiment est le fruit non seulement de l’histoire mais de la mauvaise qualité de l’accueil qui leur est réservé. Le problème est de savoir si nous sommes en mesure d’en offrir un meilleur à ceux que les apprentis-sorciers déconstructeurs sont si impatients, dans leur fausse générosité, d’héberger. J’y reviendrai.

* Par déconstructeurs j'entends tous ceux qui, dotés d'une âme généreuse autant que belle et animés par de nobles idéologies consacrent toute leur énergie à  mettre en cause ce autour de quoi pourraient se rassembler les Français afin de constituer une société plus ou moins homogène.

**Présence d’autant plus méritoire que nous n’en sommes aujourd’hui qu’à l’an 1442 de l’Égire.

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