dimanche 24 mai 2020

Il fallait bien que ça arrive...



Dans son insondable sagesse, l’Union Européenne, après bien des atermoiements, a pris la sage décision d’interdire toute vente de cigarettes mentholées sur son territoire à compter du 20 mai 2020. Il est difficile d’imaginer mesure plus salutaire ! En effet, en diminuant l’âcreté de la fumée le menthol permettait aux malheureux affligés d’une gorge sensible de pétuner sans trop de désagrément. Hélas, ce faisant, elle encourageait le malheureux fumeur à inhaler plus profondément et à permettre au menthol et à la fumée d’exercer des ravages plus profonds dans ses poumons. Il fallait mettre le holà au génocide mentholé ! C’est chose faite.

Mes rapports avec les cigarettes mentholées sont anciens : pour une raison qui m’échappe, c’est en 1974, alors que je vivais à Londres et qu’il me fallait parcourir des kilomètres pour trouver les Disque Bleu filtre dont j’encrassais jusque là mes poumons, que je me mis à fumer des Dunhill menthol longues. Rentré en France je passai aux Royale menthol longues et enfin aux News (toujours menthol et toujours longues). Quarante-six ans de fidélité ce n’est pas rien. La séparation ne va pas de soi. Mais quand elle est inévitable, à quoi bon pleurer une rupture ?

Or donc, hier, je me rendis pour la première fois chez mon buraliste sans savoir ce que j’allais y acheter. Sans trop y croire, je demandai au commerçant s’il ne lui restait pas des menthol d’une autre marque. La réponse fut négative. Que faire ? Conscient de mon désarroi, le bon commerçant me proposa des Winston Xsphere fresh 100’s qui, sans contenir le menthol maudit, étaient, comme leur nom l’indique, censé produire une fumée rafraîchissante. Pourquoi pas, me dis-je. Je m’enquis également de l’existence de cigarettes électroniques utilisant des capsules au goût mentholé. Il en avait . Je décidai d’essayer également.

Jusqu’ici, ça va : si la menthe intense vapotée tend à me racler la gorge, les Winston passent bien. Depuis ce matin j’alterne vapeur et fumée et les résultats sont alarmants : seulement trois cigarettes en 4 heures en lieu de place des six à huit habituelles pour ce laps de temps ! En quoi cela est-il préoccupant ? Eh bien parce que je suis un bon citoyen. Si la combinaison vapeur-tabac m’amenait à réduire ma consommation de cigarettes de moitié, la perte financière pour l’État serait importante ! Et que dire si je venais à remplacer totalement le tabac par la vapeur ?

Le calcul est simple : L’an dernier, j’ai dépensé environ 3500 Euros en cigarettes. Le montant des taxes représentant 82 % de cette somme, le manque à gagner pour l’État s’élèverait donc à 2870 Euros ! Quand à mon buraliste, la perte pour lui dépasserait les 300 Euros annuels. Bien sûr les capsules de vapotage ne sont pas exemptes de taxes et le buraliste prend sa marge, mais vu qu’une capsule est censée représenter deux paquets de cigarettes et ne coûte que 40 Euros les douze, la perte reste considérable.

La honte m’envahit : en effet, je pense qu’après 55 ans de tabagisme militant, l’essentiel des dégâts est acquis. L’incidence sur ma santé d’un arrêt serait donc minime. Il se peut même qu’en vapotant, je vive un peu plus longtemps avec les coûts de santé et de retraite que cela impliquerait. Je cesserais donc de rapporter tout en continuant de coûter ! Est-ce citoyen ?

Mais rien n’est cependant perdu : il se peut que je revienne en force à la clope. L’avenir le dira. Je l’espère pour l’État, qui prenant un soin jaloux de ma santé, s’est tiré une balle dans le pied.

11 commentaires:

  1. no stress... restez "KOOL"...!

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. La mère d'un copain fumait des Kool quand j'étais au collège. Ça ne nous rajeunit pas.

      Supprimer
  2. Vous m'avez fait peur, Oncle Jacques, lisant votre titre sur une blogroll amie, j'ai un instant cru que vous aviez attrapé notre fameux virus !
    Heureusement qu'il n'en est rien. Je ne peux que vous encourager à enfumer la covid du mieux que vous pouvez. Je me suis laissé dire que le vapotage était une alternative intéressante à la cigarette.
    Hold on, old chap !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. @ Mildred : Désolé de vous avoir inquiétée.
      @ Fredi : Ayant fumé jusqu'à 3 paquets par jour à un certain moment et fumant régulièrement depuis 55 ans, je pense être un vrai et vieux fumeur également. On verra bien si je me lasserai vite ou pas.

      Supprimer
    2. Combien de fois faudra-t-il le répéter : une alternative suppose le choix entre deux solutions. On écrira donc : reste une alternative, vapoter ou ne plus fumer. Boire ou fumer. Parler ou se taire. Ecrire ou dormir.

      Supprimer
  3. Un petit voyage en Suisse ou en Serbie s'impose !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Je crains que votre suggestion ne soit très coûteuse !

      Supprimer
  4. Par moments, entre ceux qui boivent comme des trous et ceux qui fument comme des pompiers, on se sent soulagé de ne pas avoir à connaître ces blogueurs in vivo !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Vous avez tort, Mildred : fumeurs et buveurs sont gens d'agréable compagnie...

      Supprimer
  5. Cet interdiction est dans l'air depuis des années. Je me souviens que Feu le chancelier Helmut Schmidt avait provisionné des dizaines de cartouches pour avoir la paix jusqu'à sa mort (2015).

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En fait, le chancelier avait stocké suffisamment de cigarettes mentholées pour tenir jusqu'à ses cent ans (âge qu'il avait jugé raisonnable pour arrêter de fumer, je suppose). Hélas, une mort prématurée le frappa peu avant son 97e anniversaire. Un ami astucieux me suggéra alors de racheter le stock restant à sa famille...

      Supprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.