mercredi 8 janvier 2014

Pourquoi parler de politique ?



Pour être honnête, je n’attends rien  des politiques ni de la politique. J'ai toujours été un individualiste. Le meilleur ami de ma jeunesse, en bon communiste,  m’en faisait le reproche, même si à l’époque je me croyais de gauche. Ce qui est paradoxal : s’il est aisé d’être Persan à qui naît et vit en Perse, la question se pose : comment peut-on à la fois être individualiste et de gauche ?

Je ne sais si cette tendance profonde vient de mon éducation, de mon histoire personnelle ou des deux. En fait, plutôt qu’attendre une amélioration de mon sort financier de je ne sais quelle mesure gouvernementale, j’ai toujours choisi de travailler plus pour gagner plus. Ça aura toujours eu le mérite de me procurer les joies enivrantes que connaissent le peintre en serre, le cueilleur de pomme, le valet de ferme, le barman, l’ouvrier d’une usine de charcuterie, le facteur, le garçon de courses, le commerçant non sédentaire, l’employé de bureau ou le formateur en langues étrangères, toutes professions qu’il m’arriva un temps d’exercer en plus de mon métier courant ou de mes études.  Si malgré ça, je pus en ma prime jeunesse soutenir des « mouvements sociaux », et même militer dans un syndicat, c’était basé sur l’illusion que plutôt que de promouvoir des revendications catégorielles celui-ci se battait pour « améliorer » le sort de tous. L’expérience me montra l’erreur d’une telle conception : je rencontrai plus de corporatisme que d’idéalisme et me détournai bien vite de tout ce qui de près ou de loin se réclamait du soi-disant « idéal » de la gauche.

Et plus ça va, moins ça s’arrange. Mon goût des solitudes (et de la solitude) va grandissant. Je suis heureux d’habiter un village isolé où le seul équipement public est une salle des fêtes récemment remise à neuf où je n’ai jamais mis les pieds. Notre maire me paraît, malgré cette extravagance, un homme de bon sens dont j’ai pu apprécier le profond scepticisme vis-à-vis des réglementations et de leur pointilleuse mise en œuvre. N’ayant ni les moyens ni un désir forcené de se lancer dans ces inutiles investissements qui font le prestige des édiles et forcent l’estime de l’électeur de base, ce maire peut compter sur ma voix : en faire le moins possible a le double mérite de combler mes attentes et de maintenir mes impôts locaux à un niveau acceptable.

N’attendant pas grand-chose de la collectivité, on serait tenté de se demander pourquoi je m’intéresse de temps à autre à la politique. Je me suis posé la question. Et je suis arrivé à des conclusions.  Pour commencer, au risque de me répéter, je n’attends pas MON bonheur (ni mon malheur) de la société. Quoi qu’il arrive, il me faudra bien faire avec. Ce que j’ai toujours fait. Si les retraites venaient à baisser, il me faudrait réduire mes dépenses. Je doute qu’aller marcher dans les rues en réclamant « justice » crée les richesses nécessaires au renflouement des caisses. Toute « victoire » en un tel cas ne pourrait qu’amener à déshabiller Pierre pour habiller Paul et partant ne pourrait être acquise que sur un gouvernement pusillanime plus apte à faire migrer les « injustices » qu’à maintenir un cap et gérer le pays.

Le souci du bien être de ma descendance qui, jusqu’à nouvel ordre, se réduit à une seule personne pourrait m’animer : il n’en est rien. Parce que ceux qui nous suivent sont nés et ont grandi dans un monde différent du nôtre et qu’ils y sont mieux adaptés que leurs devanciers. Vouloir les faire vivre dans un monde d’avant, de plus largement idéalisé, me paraît ipso facto illusoire.

La vérité est que, si je m’exprime sur tel ou tel sujet (de préférence plus sociétal que social) c’est que les idées et les projets de la gauche et de la droite gauchisante semblent à l’individualiste que je suis de graves atteintes à ce en quoi je crois et promeuvent ce que je déteste le plus à savoir la primauté du collectif sur l’individuel. De plus en plus de lois, de règlements, de normes viennent asservir l’individu et visent à en faire un clone jusque dans ses pensées (politiquement corrigées). Peu tenté par cette normalisation, j’exprime mes refus. Et ça s’arrête là : point question de viser à remplacer une norme par une autre. Cette attitude sera, je le crains, toujours ultra-minoritaire tant le goût de s’intégrer au troupeau est répandu.

Certains me diront que je prêche en faveur de la diversité. Dans une certaine mesure, oui. Mais pas telle qu’on l’entend de nos jours. Cette diversité qu’on promeut n’est que la juxtaposition de groupes adhérant à des normes différentes,  voire incompatibles tandis que celle que je défends est, au sein d’une société partageant des bases culturelles aussi homogènes que possible, celle de libres individus.

10 commentaires:

  1. Pourquoi parler politique? Parce que les politiques me parlent, pardi! Et parce qu'e je trouve amusant de leur répondre. Et, comme il est très rare que leur discours me séduise et très fréquent qu'il m'irrite, je lâche la soupape.
    Je peux faire mienne la conclusion de votre billet. Individualiste sans fanatisme, libertaire sans gauchisme, n'ayant reçu que ce pour quoi j'ai travaillé, ayant donné plus que je n'ai reçu, je ne demande à la société que de m'oublier autant que faire se peut. Privilège de l'âge.

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    1. Comme dit l'autre, quand on ne s'occupe pas de la politique, c'est elle qui s'occupe de nous. Et je trouve qu'elle s'occupe BEAUCOUP TROP de nous. Voilà pourquoi je réagis parfois à certaines de ses attaques.

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  2. Je crains, Jacques, que nous ne soyions encore moins qu'ultra-minoritaires à refuser le délicieux bonheur zombiesque que l'on nous impose...

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    1. Ultra minoritaire, ce n'est déjà pas beaucoup mais moins, ça confine à la solitude...

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  3. Quand on nous parle de diversité, aujourd'hui, il est simplement question de l'immigration musulmane, nous vivons au temps de l'euphémisme et de l'ellipse mais dans le sens où vous l'entendez, le vrai, on ne peut qu'être en phase.
    Si tous ces gens là voulaient bien nous laisser être ce que nous sommes et surtout nous foutre la paix!
    Amitiés.

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    1. Comme vous, c'est surtout de paix que je rêve. Malheureusement, quelle que soit la question, il semble que tous veulent que tout soit de plus en plus réglementé... Sauf l'essentiel, bien entendu.

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  4. Bonjour,

    Beau billet d'où émane le tranquille désespoir que beaucoup d'entre nous ressentent, il me semble.

    Je crains malheureusement que vous n'ayez raison. La seule idée que le monde est trop petit et trop interconnecté pour ne pas mettre tout ça sous coupe étroitement réglée a trop d'influence aujourd'hui pour espérer épargner l'individu libre du diktat du troupeau. Fort de ce sentiment, l'homme moderne se sent légitime à intervenir dans la vie de ceux qu'il ne connaît pas.

    Je pense que comme l'ont observé les commentateurs les plus avisés, le vrai clivage aujourd'hui se situe entre ceux qui veulent de la politique et ceux qui n'en veulent pas. Mais le rapport de forces est assez déséquilibré...

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  5. Pourquoi parler politique ?

    On se le demande, celle ci est entrée dans notre vie de tous les jours par cette lucarne où tous nos pieds nickelés viennent nous abreuver de billevesées,et c 'est tout.

    Pourtant, les gens demandent qu' on les laisse tranquilles et de décider eux mêmes mais cela ne plait pas à nos caciques qui préféreraient le que nous transformions en moutons de Panurge.

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  6. Je l'avais dit que l'individualisme était la grosse "connerie"...
    Cependant, n'oublions pas - contrairement à DidierGoux - que nous sommes le fruits de millions d'années d'évolution - avec des résultats tout à fait étonnants sur le résultat. Exemple.
    Des Neuros-etc... ont réfléchi sur ce paradox : Pourquoi des sectes aux comportements peu rationnelles, du genre à suivre au pied de la lettre les commandements les moins adaptés à la situation réelle, subsistaient beaucoup mieux dans les pires milieux naturels : Une pierre dans le jardin des Darwiniens ?
    Pas du tout ! Ce comportement est stupide mais héroïque : il permet à chacun de démontrer aux autres la profondeur de son engagement, et donc d'en attendre autant des autres. Quant aux esprits faibles qui croiraient à une intervention divine, il faut rappeler que l'important est le symbole, pour le reste, ils boivent, mangent dorment et se soignent aussi bien que possible...

    Et la politique ? Pareil...
    Amike

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