lundi 21 octobre 2013

Autopsie d’un non événement



Dans quelques jours, on n’en parlera plus. Et pourtant le buzz est tellement monté en puissance qu’un personnage aussi éminent que le président de la République Française s’est senti contraint de lui consacrer une intervention télévisée qui lui offrit  l’occasion de mécontenter tout  le monde. Ce qui n’est pas très grave, vu que cela, comme tout le reste, tombera bientôt dans l’oubli.

Ce qui me paraîtrait intéressant serait d’étudier les mécanismes qui ont permis à ce rien d’aller jusqu’à sembler faire vaciller le trône ne fusse qu’un instant.

Les faits sont assez faciles à établir grâce à l’intéressant rapport établi par l’IGA. Ce document de 24 pages est on ne peut plus instructif en ce qu’il relate en détails le déroulement de l’ « affaire ».  On y apprend que tout s’est passé de manière aussi harmonieuse que possible et qu’il faudrait beaucoup d’imagination pour envisager que l’opération ait pu créer le moindre trouble à l’ordre public. Pour reprendre les termes des inspecteurs, « Par ailleurs, les témoignages sont unanimes pour souligner qu’aucune contrainte physique n’a été exercée à l’encontre de Leonarda DIBRANI, que la police aux frontières a accédé sans difficulté aux requêtes qui lui étaient faites (demande des accompagnants ou soutiens de la famille à pouvoir entrer dans le centre d’accueil et l’appartement de la famille DIBRANI ; mise à l’écart de la jeune Leonarda pour la préparer à son départ vers le centre d’accueil), que toute l’opération s’est déroulée avec le plus grand calme, malgré la tension qui peut exister dans ce genre de cas, que personne n’a résisté ni fait obstacle et qu’il n’a jamais été nécessaire de faire usage de la force. »

Pourtant l’IGA note qu’ « Essentiellement focalisés sur l’objectif de parvenir à regrouper la famille et de ramener la jeune fille auprès de sa mère, l’attention des forces de l’ordre n’a pas été éveillée par le fait que Leonarda DIBRANI se trouve dans un bus dans le cadre d’une sortie scolaire. Elles n’ont pas pris la mesure des enjeux que représenterait une intervention pour interrompre cette sortie. Elles n’ont pas considéré être dans le cadre des instructions interdisant toute interpellation dans des établissements scolaires ou à proximité de ceux-ci. En ce sens, elles n’ont pas fait preuve du discernement nécessaire. » avant d’ajouter « Les intervenants n’ont pas évalué les conséquences possibles de leur intervention ».

Ces deux extraits posent deux questions : peut-on considérer qu’une fois qu’on est descendu sans problème d’un car et s’en être éloigné, on se trouve dans un établissement scolaire ou à proximité ? Comment les policiers auraient-ils pu imaginer, sauf à être doués de dons surnaturels « évaluer les conséquences possibles de leur intervention » ?

C’est justement la genèse et le développement  de ces conséquences qu’il serait utile de clarifier. Et plus précisément comment s’est mise en marche la machine infernale qui allait transformer un rien en affaire d’état.

Il est évident qu’à l’origine du trouble se trouvent deux enseignantes du collège André Malraux « fréquenté » (avec le taux d’absentéisme impressionnant que l’on peut constater p. 17)  par Leonarda. Il est expliqué p. 14 comment, comment après avoir envoyé un message de protestation à la préfecture, une collègue de l’enseignante accompagnatrice, Mme Giaccoma,  pousse cette dernière à relater les faits auxquels elle a assisté et participé sur le blog d’RESF (Réseau Éducation Sans Frontières), collectif très marqué à Gauche dont le slogan est « Laissez-les grandir ici ! ». Vous trouverez ce récit ici où il fut publié en date du 14 octobre. Il est intéressant de constater que le dit blog est hébergé par Médiapart dont l’objectivité et le professionnalisme ne sont plus à démontrer. Si l’on compare l’article de blog au rapport, on est  frappé par de légères différences d’appréciation sur la situation de la famille Dibrani et son désir d’intégration, mais qu’importe.

Il est évident que la parution sur un média de renommée nationale d’une version idéalisée de ce fait minime lui donne une visibilité infiniment supérieure à celle qu’aurait eue  un entrefilet dans la PQR.  Mais de là à faire le buzz… Il faut donc croire que pour une raison ou pour une autre (surtout pour une) la presse ait jugé opportun de reprendre ce fait. Sans être un ardent partisan de la théorie du complot, on serait tenté de penser que certaine presse de gauche s’est emparée de l’ « affaire » en ce qu’elle pouvait aider son combat contre un ministre de l’intérieur dont l’attitude « sécuritaire » et « anti-immigration » n’a pas l’heur de lui plaire. On peut également supposer qu’histoire de ne pas être en reste une presse moins idéologiquement marquée lui ait emboité le pas et que de fil en aiguille ce pet dans la toundra se soit transformé en conflagration  nucléaire.

Malheureusement, il semblerait que finalement la machine à détruire M. Valls se soit transformée en simple piège dans lequel le président a sauté à pieds joints. Une majorité de Français (selon les sondages du moins) a soutenu le ministre, L’IGA n’a pu formuler que de timides critiques, bref, les gauchos ont raté leur coup. A moins que leur vrai but n’ait été de fragiliser davantage un président qui n’en avait aucunement besoin.

24 commentaires:

  1. Dans quelques jours on parlera d'autre chose, mais je ne crois pas que ce sera oublié.
    Il y a des événements qui marquent et vous collent ensuite aux doigts comme le sparadrad du capitaine Haddock.
    Souvenez-vous de l'affaire du Fouquet's pour Sarkozy, ou bien de l'histoire de l'EPAD. En 2012 ce n'était pas oublié.
    Hollande s'est ridiculisé devant la France entière, et a ridiculisé la France. Il s'est montré en pleine lumière pour l'apparatchik médiocre qu'il a toujours été mais qu'il avait parfois réussi à dissimuler.
    Je vous fiche mon billet que ce ne sera pas oublié. Trente ans après on en parlera encore.
    Comme les diamants de Giscard.
    A mon avis il ne s'en relèvera pas.

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    1. C'est quand même un tout petit peu plus gros que le Fouquet's ou l'EPAD, quand même, non ? En revanche, nos médias ne manqueront pas de le faire oublier, contrairement à ce qu'ils relayèrent pour les événements pré-cités. L'avenir nous le dira...

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    2. Oh que oui, c'est plus gros. Raison de plus.
      Trop gros pour que l'omerta des médias suffise (et puis n'oubliez pas qu'internet à brisé leur monopole sur l'information).

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    3. Gros ou pas gros je suis de l'avis d'Al : les journaleux éviteront d'en trop parler. N'importe comment, je fais entièrement confiance à notre cher président pour nous pondre une connerie encore plus grosse très bientôt. Un clou chasse l'autre mais l'impression générale demeure...

      Et on ne s'ennuie jamais au Hollande's Circus : pas de temps morts !

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  2. Ce que nous venons de vivre est tout à fait surréaliste. Dans quel pays voit-on un Président foutre en l'air son W-E, renoncer à ses RTT, pour commenter une décision de justice parfaitement régulière elle?
    Et ça a donné ça:
    -Léonarda ma chérie, si tu reviens j'annule tout. Mais seule hein ! Sans ta famille que ce ne sont rien que des affreux vilains pas beaux.
    Et elle de répondre:
    -Fuck yourself ! C'est mort Ta proposition pourrie on en veut pas nardinamouk ! (la petite Esméralda aux traits confits du Président parle un Espéranto corsé, assez cru.) Ta mère sa race!! Lundi à l'heure des croissants nous serons sur les Champs ! C'est moi qui fait la loi !
    Faut dire qu'elle n'a pas tort Esméralda: entre deux solutions les socialistes choisissent toujours la troisième, la plus tordue. Et l'on se demande de quel cerveau malade à jailli l'idée de proposer à une gamine de quinze ans de laisser tomber frères et sœurs, parents, pour atterrir dans une famille d'accueil....
    On est tombé bien bas ce W-E....

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  3. Moi, j'ai découvert toute la vérité sur cette affaire, et la révèle généreusement à mes lecteurs.
    Et je ne dis pas où pour ne pas avoir l'air de faire le Rom en allant piquer du public à M. Etienne...

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    1. J'avoue qu'après vos révélation, j'ai comme l'impression d'avoir perdu mon temps (et mes octets !).

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  4. Moi, ce qui m'épate c'est que cette gauche laïcarde ait décidé de transformer l'école laïque en sanctuaire c'est-à-dire en un lieu fermé consacré par la religion.

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    1. Ils sont très religieux. A leur manière...

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    2. Moui mais ce n'est pas tout à fait le même catéchisme.
      Faudrait voir à ne pas confondre chaude pisse et première communion : c'est pas le même cierge qui coule.

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  5. Ce qui m'effare le plus, moi, c'est le suivisme des "journalistes" qui ont tous repris en choeur le couplet de "la pauvre famille expulsée vers un pays dangereux alors qu'elle n'aspirait qu'à s'intégrer" alors qu'une simple petite enquête auprès du collège de Léonarda, des services sociaux de la mairie et des voisins de cette charmante famille aurait pu mettre à mal la version initiale : où est l'investigation ?.
    Ce qui m'insupporte le plus, c'est la complaisance avec laquelle ils ont donné la parole au père et à la fille sans s'offusquer des énormités prononcées ni même les relever ensuite en commentaires (comme si c'était normal de tricher ou de revenir en fraude puisque la loi est trop dure pour les pauvres immigrés): où est l'objectivité ?
    Ce qui me navre absolument, c'est l'indigence de la pensée politique de gauche quand être dans le camp du Bien autorise à dire et faire n'importe quoi alors qu'on a un pays au bord de la faillite et de l'explosion sociale: y a-t-il un pilote dans l'avion ?

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    1. Enquêter ? Un journaliste ? Et quoi encore ?

      Je voudrais cependant vous rassurer : il y a bel et bien un pilote dans l'avion. Le problème c'est qu'il a été formé sur ULM. Du coup, quand on lui confie un gros porteur, il est un peu désorienté...

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  6. Ce manque de discernement ne concerne pas à l'évidence les circonstances de l'interpellation de Leonarda mais la manière pourtant prévisible dont l'affaire serait exploitée et par qui elle le serait.
    J'ai apprécié la réflexion de Michel Desgranges qui remarque que tous les fonctionnaires, avocats, membres d'associations etc qui se sont occupé de la famille Dibrani, l'ont aidée dans ses démarches, ont constitué des dossiers, les ont étudiés, l'ont logée et l'ont financée , n'ont pas pu en plus de quatre ans connaître la véritable nationalité de ses membres ni le statut marital des parents.

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    1. je pense que du point de vue des "bonnes âmes", ça se comprend : leur (anti)racisme les contraint à ne rien voir.

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  7. "une collègue de l’enseignante accompagnatrice, Mme Giaccoma, pousse cette dernière à relater les faits auxquels elle a assisté et participé."
    Pour ça on peut compter sur les enseignants gauchistes!
    Je me souviens qu'à l'époque du "touche pas à mon pote", mes collègues arboraient tous la petite main jaune (pourquoi jaune d'ailleurs? Les Vietnamiens n'ont jamais emmerdé personne) et me critiquaient ouvertement parce que je n'en faisais pas autant.

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    1. Je pense que Mme Giaccoma n'a pas eu besoin d'être trop poussée. Ayant enseigné rn milieux difficile, j'ai pu constater que mes collègues avaient généralement des œillères idéologiques qui leur évitaient toute objectivité et leur permettaient de soutenir l'inacceptable..

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  8. Parfaitement judicieux, Valls n'est pas tombé dans le piège mais Culbuto s'y est précipité tête en avant comme une andouille (je dis "comme" par déférence).
    Ce "pet dans la toundra" (c'est tout à fait cela) aura juste servi a faire passer un peu plus le Président pour ce qu'il semble bien être.
    Amitiés.

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    1. Oui. On peut en pleurer ou s'en réjouir, selon son tempérament...

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  9. Le "pet dans la toundra" aura aussi servi, semble-t-il, à flinguer Harlem, Désir de son prénom.
    La lettre de cachet est prête, il ne perd rien pour attendre.
    Déjà les candidats à sa succession se pressent à la porte du PS.
    C'est du moins ce que nous apprenaient les gazettes-radio ce matin.

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    1. Ils auront du mal à trouver pire mais je leur fait confiance...

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  10. Cette histoire démontre simplement l'incompétence de ce gouvernement de pieds nickelés avec à sa tête un triste pitre.

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    1. Pour certains illuminati, peut être! Il reste 23 % de français qui croient encore ne cette guimauve de piètre qualité.

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