samedi 30 mars 2013

Noir c’est noir !



Il faisait un peu sombre quand je suis arrivé. Les manèges installés sur la place m’avaient empêché de me garer  en face de chez moi. J’arrivai donc à pied, mon sac de voyage à la main. Je notai quelques morceaux d’ardoise sur le trottoir mais n’y prêtai que peu d’attention. Ce qui me turlupina, c’est que les volets du rez-de-chaussée étaient fermés. Je me dis qu’en ce jour de foire un imbécile avait peut-être cassé un carreau et que mon fidèle plombier, qui avait la clé,  avait pris la sage décision de les clore. J’ouvris la porte du couloir et  ne notai rien de spécial. La surprise fut donc totale quand, la porte du salon ouverte, une odeur âcre m’assaillit les narines tandis que je découvrais un tas de gravats au sol provenant d’un large trou au plafond.  Des flaques d’eau aussi, sur le  parquet devenu inégal. Pas besoin d’un dessin : il y avait eu incendie.

Un pompier resté dans le secteur pour s’assurer que tout était fini vint vite me rejoindre armé d’une lampe torche. Nous montâmes à l’étage. Dans la chambre, devenue  d’un noir soutenu, plus de lit mais à sa place un trou béant. Sur la commode disjointe le téléviseur avait fondu se transformant en une sorte d’œuvre d’art façon montres molles. Dans la salle d’eau la cabine de douche s’était effondrée sur elle-même. Tout était comme peint en noir.

Nous redescendîmes. Le voisin m’invita à  entrer. Il m’expliqua ce qui s’était passé. Dimanche matin, un forain voyant de la fumée s’échapper du toit avait alerté les pompiers du village. Craignant une explosion, ceux-ci firent appel à leurs collègues de Châteaudun. Plusieurs dizaines d’entre eux intervinrent. On boucla le quartier. On évacua la foule des manèges et de la brocante qui se tenaient sur la place. Mécontents d’être privés de manèges, de bonnes affaires et du spectacle toujours appréciable d’un bel incendie, certains s’en prirent aux forces de l’ordre qui les en tenaient éloignés. Une brève  échauffourée s’en suivit. On pouvait dire que j’avais provoqué un beau bordel !

Comment cela s’était-il produit ? Plus de trois ans plus tard, je suis encore incapable de le dire. Le vendredi matin, j’avais comme d’habitude préparé mon sac avant de partir pour le  collège. Cela me permettait  de quitter le travail pour la Normandie où je passais mes week-ends  sans avoir à repasser.  Si, comme le conclut l’expert, cet incendie était dû à un mégot mal éteint, le feu avait donc couvé  plus de deux jours.  Visiblement, c’est la combustion lente du matelas en Bultex qui avait tout noirci, tandis que les gaz qui firent craindre l’explosion aux pompiers  s’accumulaient. Pour leur permettre de s’échapper, les soldats du feu avaient pratiqué une brèche dans le toit. Ainsi s’expliquaient les fragments d’ardoise.

De chez le voisin, j’appelai l’assistance de mon assurance qui prit en charge l’hôtel où je dormirais. Ensuite, j’annonçai la nouvelle à ma compagne et à ma fille.

Je vous passerai les détails de ce qui suivit. L’expert, brave homme très sympathique, évalua les dégâts à quarante et quelques milliers d’Euros. Je passai huit jours à l’hôtel où ma compagne était venue me rejoindre avant de trouver un appartement à Châteaudun. Tout ça aux frais de l’assurance. De plus, ma maison étant en vente et les travaux devant durer plusieurs mois, je me vis contraint de repousser d’un an mon départ en retraite.  La maison serait remise à neuf, mais était-ce bien nécessaire vu que je venais de finir de la rénover ? 

Finalement, tout s’arrangea : La banque, vues les circonstances,  renouvela mon crédit relais, la salle d’eau, agrandie et équipée de neuf,  fit flasher une acheteuse, je vendis la maison et  finis par partir en retraite le cœur léger.

N’empêche que, allez savoir pourquoi, il m’est devenu impossible de quitter  ma maison ne serait-ce que pour quelques jours, sans qu’une angoisse intense ne m’envahisse.

3 commentaires:

  1. Heureusement que j'ai vite compris que cette histoire ne datait pas d'hier.
    Quand on a subi un cambriolage c'est pareil : on ne quitte plus sa maison sans appréhension.
    Joyeuses Pâques à tous !

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  2. Ce sont des aventures qui laissent des traces pour toute la vie. Mais bon, quand ça finit bien, on se fait une raison.
    Amitiés.

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  3. Pour les aventures comment êtes-vous digne d'être vécue et le risque de temps en temps. Depuis que j'ai un rêve matelas Bultex beaucoup plus qu'avant.

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