lundi 14 novembre 2022

De la décadence alimentaire

 


Il y a de plus en plus de végans, de végétaliens ou de végétariens en France. Non que ces régimes alimentaires favorisent la procréation, avec pour conséquence une explosion démographique mais plutôt suite à des conversions à ces  tendances venues des U. S. of A. d’où ne nous viennent que d’admirables  idées comme Halloween, la culture woke, les études de genre, le féminisme rabique pour ne citer que les plus divertissantes. Si le taux général d’anti-viandes serait dans la population française de 2 %, il atteindrait 13 % dans notre belle jeunesse, un âge, comme chacun se doit de l’admettre, par définition porteur d’un avenir radieux (Cf. Les jeunesses hitlériennes ou les Gardes Rouges dont nous gardons de si bons souvenirs) .  

Qu’est-ce qui peut bien pousser nos  contemporains à préférer le tofu, le steak de soja,  ou le lait d’avoine à des produits d’origine animale ? Ayant partagé la vie d’une végétalienne 3 ans durant (Comment ai-je pu? C’est un des mystères de ma vie !) sans me convertir à sa religion, j’ai été à même de goûter ces produits (la curiosité est un vilain défaut!) et en suis arrivé à la conclusion que ce n’était pas leur goût que je qualifierais de carrément dégueulasse. C’est plutôt dans l’idéologie qu’il faudrait chercher.

Les partisans du tout végétal peuvent être inspirés par l’antispécisme et/ou le désir de sauver la planète. M. Larousse définit ainsi l’antispécisme : Vision du monde qui récuse la notion de hiérarchie entre les espèces animales et, particulièrement, la supériorité de l’être humain sur les animaux. (Accordant à tous les individus, indépendamment de l’espèce à laquelle ils appartiennent, un même statut moral, l’antispécisme combat toutes les formes de maltraitance et d’exploitation animales.). 

Sans la partager, j’avoue que cette opinion se défend. Mon expérience de la fréquentation de l’espèce  humaine  m’amène parfois à penser qu’elle n’est en général pas beaucoup plus intéressante que les autres. Il se trouve cependant que j’appartiens à l’humaine et que force est de constater qu’au niveau de la littérature, de l’architecture, et de bien d’autres domaines culturels les réalisations de certains hommes sont nettement supérieures à celles des autres espèces, vertébrées ou non. Comme il se trouve que ces domaines m’intéressent, je ne peux donc qu’établir une hiérarchie. 

Pour ce qui est de la sauvegarde de la planète, certains reprochent par exemple aux bovins de nécessiter des quantités industrielles d’eau pour nous fournir un kilo de bidoche. En tenant compte de l’eau de pluie tombant sur les prés où ils paissent et non de l’eau qu’ils consomment, certains hurluberlus arrivent au chiffre de 15 000 litres par kilo ! Une remarque cependant : si, au lieu d’y engraisser des bœufs, on ne mettait aucun animal dans le pré, et qu’il ne produisait donc rien du tout, la consommation d’eau du pré resterait la même et l’« impact écologique » du rien du tout serait énorme. Il n’empêche que tout bien-pensant, s’empresse de déclarer que parmi ses actions héroïques pour sauver la planète, la réduction de sa consommation de viande n’est pas la moindre.

Ce qui me paraît la cause la plus fondamentale de ce que je considère comme une décadence alimentaire est la rupture de plus en plus grande entre les citadins et ce qui est considéré comme la « nature » mais qui n’est en nos pays de vieille civilisation que le résultat d’une interaction entre nature et culture. Nous ne connaissons plus que des campagnes ou des forêts profondément modifiées  par l’homme et sa culture. On m’a enseigné que l’homme était omnivore. Si sa consommation de viande s’est grandement accrue c’est grâce aux progrès de l’élevage. Le campagnard quand il tuait son cochon, n’avait aucunement l’impression de sacrifier une frère. Il voyait plutôt lorsqu’il le saignait et le dépeçait, les jambons, les côtelettes et les diverses charcuteries qui, par leur apport en protéines, lui donneraient la force d’accomplir ses tâches. Ainsi, dans la culture traditionnelle donner la mort à un quelconque mammifère était chose habituelle autant qu’indispensable. Les enfants assistaient et même participaient dans la mesure de leurs moyens au « sacrifice » sans se poser de questions métaphysiques sur la confection des boudins. Ce lien rompu, la sensiblerie éloigne de la « nature » ceux qui s’en disent les défenseurs. 

Ainsi les végans et autres plaisantins parviennent à impressionner nos décadents en déclarant que manger de la viande, c’est manger du cadavre. Je leur répondrais qu’il en va de même de leurs carottes et que manger des animaux vivants ne serait guère plus mignon que quand on les abat  auparavant.

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