lundi 25 novembre 2019

Ma France se meurt ! Ma France est morte !




Bossuet, pour souligner la surprise que créa la mort subite de Madame Henriette d’Angleterre, épouse de Monsieur, frère du roi, duc d’Orléans, prononça au cours de l’oraison funèbre de cette princesse deux phrases célèbres qui inspirèrent mon titre.

Ce triste constat, je l’ai fait depuis longtemps, mais mon séjour à Bellac que je relatais ici avant hier en a avivé ma conscience. Si je parle de MA France et non de LA France, c’est que je ne veux parler que du pays que j’aime et ai aimé et non d’un territoire qui, sauf cataclysme général subsistera quels que soient son peuplement, sa civilisation, sa démographie.

J’ai voulu insister sur la soudaineté de cette disparition mais en fait, le processus de destruction, s’il prend moins de temps que celui de construction, n’est pas pour autant immédiat. Né en 1950, c’est peu à peu que j’ai pu voir les mentalités comme la population changer tandis que moi-même je changeais. Ce point me paraît important à souligner. Bien des « réacs » accusent les autres de tout détruire alors qu’eux-mêmes (et comment pourrait-il en aller autrement?) ont suivi le mouvement qui tendait à effacer la tradition. Par exemple, j’ai été élevé, comme encore beaucoup de ma génération dans un catholicisme plus ou moins fervent (fervent dans mon cas), j’ai ensuite, comme beaucoup d’autres, perdu toute pratique et toute foi. Ça ne m’a pas empêché de me marier à l’église et de faire baptiser ma fille qui, si elle trouve chaussure à son pied, se mariera à l’église. Mais il n’empêche que, si nous restons catholiques de culture et de tradition, nous participons de la déchristianisation. La nature ayant, comme disait l’autre, horreur du vide, comment s’étonner que d’autres croyances (religieuses ou non) s’installent ?

La France que j’aime est rurale. Seulement ses petites villes et villages se dépeuplent inexorablement, leurs commerces ferment, leur habitat se délabre, on n’y croise presque plus que des personnes âgées (dont je suis), les cloches y sonnent plus souvent pour un enterrement que pour un mariage ou un baptême. Sauf miracle ou catastrophe, ces bourgades finiront par disparaître. Qu’y peut-on ? L’emploi se concentre dans les métropoles. Le peu de jeunes qui nous restent vont y travailler. L’e-commerce présente bien des avantages de prix, de commodité comme de rapidité. Pourquoi se rendrait-on à la petite ville voisine pour y faire ses achats quand, de chez soi, on peut obtenir les mêmes produits à moindre prix et qu’ils vous sont livrés rapidement ? Les commerces ferment, les rues commerçantes dépérissent, inéluctablement. On peut toujours dessiner des moutons pour masquer la décrépitude des vitrines et distraire de celle des immeubles. C’est joli, c’est pimpant mais ça ne résout pas le problème.

On ne peut pas avoir le beurre, l’argent du beurre et le cul de la crémière comme il est impossible d’avoir les avantages du « progrès », la conservation du passé et l’idéologie d’hier. Il faut choisir. Le franchouillard se doit de singer le Suédois ou tout être aseptisé de ce genre (ce n’est pas facile avec un pied dans le passé et un autre dans le présent ou un avenir rêvé) tandis que d’autres venus d’ailleurs tout en comptant bien y rester se foutent de la Suède comme des progressistes amerloques .

Qui sait de quoi l’avenir sera fait ? Continuera-t-il sa course effrénée vers un prévisible néant ? Des catastrophes inouïes mèneront-elles à des modifications fondamentales du système apparu ces dernières décennies ? Nul ne le sait. Je mourrai probablement avant d’avoir le loisir d’observer laquelle de ces hypothèses (ou de toute autre hypothèse) se réalisera. Et je n’en suis pas triste.

18 commentaires:

  1. Qui sait de quoi l’avenir sera fait ?
    Il y en a qui pensent le savoir.

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    1. N'y aurait-il pas là complotisme sous roche ?

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    2. Pas du tout, pas du tout, la version complotiste c'est ça!

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  2. Vous ne pouvez pas parler de "Madame Henriette d'Angleterre". C'est soit "Madame" tout court, soit Henriette d'Angleterre. Ou, si vous voulez vous montrer respectueux, la princesse Henriette d'Angleterre. Ou encore, la duchesse d'Orléans. Ou, à l'extrême limite : la gravosse du pédé.

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    1. Tout le monde n'ayant pas vos connaissances sur les usages de la cour, j'ai préféré préciser qui était cette Madame dont parlait Bossuet. Certains, si je m'étais contenté de Madame, auraient pu y voir une faute de frappe et penser que Bossuet déplorait la mort de sa bourgeoise (ignorant que son statut d'évêque lui interdisait le mariage). En utilisant "la gravosse du pédé", d'autres auraient pu penser qu'il s'agissait de la princesse palatine. Bien que contraire aux usages, mon appellation prévenait ces éventuels malentendus et les gravissimes conséquences que ceux-ci eussent pu avoir.

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    2. Dans ce cas, une simple virgule après Henriette vous eût épargné mon accès de pédanterie…

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  3. Je ne commenterai pas le fond, mais la forme : votre nouveau caractère et votre interligne serré rendent vos billets difficilement lisibles. Ne pourriez-vous pas revenir à vos anciennes habitudes ?

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    1. Cela s'explique du fait que le technicien à qui j'avais confié mon ordinateur pour qu'il le nettoyât a, pour une raison qui m'échappe, remplacé ma suite bureautique Open Office par Libre Office et cela entraîne non seulement un changement de police dans le traitement de texte mais un changement de police quand je le transfère sur Blogger. Suite à votre remarque, j'ai tenté des expériences afin de remédier à l'inconvénient que vous signalez. Mais jusqu'ici sans succès. Je ferai d'autres essais lors d'un prochain article afin de tenter de résoudre ce problème.

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    2. Pourquoi n'écrivez-vous pas directement sur Blogger ? C'est ce que je fais depuis 12 ans, sans le moindre problème.

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    3. Bonjour,
      Je n'ai pas de version française de libre Office et à défaut de trouver une solution stable essayez donc File/Preview in web browser et ensuite copiez le tout et collez dans blogger... Chez moi ça conserve la police et la mise en forme.

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  4. Je ne pourrais pas, comme vous, parler de "ma France", mais je suis loin d'être aussi pessimiste que vous sur l'avenir la France.
    Voilà plus de vingt ans que j'affirme à qui veut m'entendre que ce sont les anciens étrangers qui défendront le mieux la langue et la culture françaises.
    Et voilà ce que j'ai trouvé qui devrait vous consoler, au moins en partie :

    "En 2050, selon les projections de l'ONU établies et révisées en 2015, l'espace francophone devrait représenter 1,1 milliard d'habitants, soit toujours le 4e espace linguistique après les mêmes sus-cités, sauf si le hindi ne représente toujours que 41 % de la population de l'Inde, comme en 2001 (544 millions en 2016 (+ 6 millions entre 2015 et 2016, soit + 1,2 %) au taux de 2001 de 41,03 %, contre 542 millions pour le français en 2016 (+ 11 millions entre 2015 et 2016, soit + 2,1 %), voire jusqu'à 62 % en 2050 (égalité dans ce cas) ; à moins de ne considérer l'espace linguistique du hindi à 100 % de l'Inde (le but à terme de l’État indien)."

    Cela dit, il est vrai que ni vous ni moi, nous ne serons là pour le voir.

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    1. Il me semble que l'avenir de la Francophonie et celui de ma France ont en fait peu de rapports. Pour avoir il y aura bientôt 50 ans été conseiller pédagogique de la méthode d'enseignement du français du CLAD (Centre de Linguistique Appliquée de Dakar) j'ai pu constater qu'on avait tendance à surestimer la pratique du français au Sénégal. Je viens d'ailleurs de lire un article de Wikipédia sur la question (https://fr.wikipedia.org/wiki/Expansion_du_fran%C3%A7ais_au_S%C3%A9n%C3%A9gal ) qui fait le point sur la question. On est bien loin d'un Sénégal francophone. Quoi qu'il en soit, je crains que même s'il y avait 6 milliards de francophone dans le monde ça change grand chose à l'avenir de la France rurale à laquelle je suis attaché.

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    2. Le fait qu'on ait pu créer un mot aussi radicalement laid que "francophonie" semblerait prouver que nous sommes déjà morts.

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  5. Vous évoquez brièvement la "déchristianisation" de la société.
    Jérôme Fourquet dans son livre "L'Archipel français" en a fait une des causes principales du déclin national (et au-delà). Et ce ne sont pas seulement vous ou moi qui en sommes la cause principale : le clergé catholique s'en charge très bien (c'est un peu le sujet de mon dernier article)

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    1. @bedeau : j'ai lu votre article avec intérêt et suis assez d'accord avec vous.

      @ Fredi : Je l'ai dit : je demeure un catholique de culture sans toutefois bien reconnaître cette culture dans les propos de certain pape et de beaucoup d'évêques.

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  6. C'est même carrément à se tordre.

    Pour la voiture, elle a été réparée et m'a ramené en Normandie vendredi dernier.

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  7. Mais c'est fichu mon cher, et vous le savez bien! La paysanne faisait vivre ces villages, ces bourgs...Il y avait plus de la moitié de la population au 19eme siècle qui travaillait la terre aidée par des charrons, des forgerons, des commerces ambulants. L'administration s'installait dans les bourgs avec les médecins, les notaires, les instituteurs, les commerçants, les petits artisans... Bref le principe de la boule de neige qui grossit, qui grossit...
    Aujourd'hui elle a totalement fondue.

    Le Page.

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