samedi 4 mai 2019

Images




Quand j'étais au Cours Préparatoire et que j'avais fait quelque chose de bien on me donnait un bon point. Avec vingt bon point, j'obtenais une image de Benjamin Rabier et j'étais tout content. Pas spécialement à cause de la beauté ou de la drôlerie de ladite image mais parce qu'il existait, entre les bons élèves dont j'étais, une compétition. Celui qui avait le plus d'images faisait la fierté de ses parents et l'envie de ses rivaux.

Je ne sais pas si un tel système perdure. Je serais tenté de penser que non, vu le traumatisme que constituerait pour les cancres le fait de n'avoir que très peu de bons points et encore moins d'images.

Les images, aujourd'hui, on les offre aux adultes sous formes de vidéos. C'est bien, une vidéo : c'est la réalité, c'est difficile à truquer. Les réseaux sociaux en regorgent. Elles rassurent et confortent les braves gens souffrant de préjugés. Celles qui montrent des violences policières sont prisées des ennemis de la « dictature macronienne », qu'ils se disent de droite ou de gauche. Celles qui montrent des Black Blocs tabassant un flic ou vandalisant un magasin rassérènent les autres. Tout le monde est content !

Le problème est qu'une vidéo, une image ou même une scène à laquelle on assiste ne prennent leur véritable sens que replacées dans un contexte qu'on s'empresse de ne pas montrer ou qu'on ignore. Un CRS gifle ou bouscule un manifestant : c'est pô bien. Seulement que s'est-il passé avant ? Mystère ! L'anti-flic ne se le demande jamais ou ne veut pas le savoir. Il a reçu son image, il en est rose de plaisir (ou vert d'indignation mais au fond ça revient au même).

Je citerai deux anecdote auxquelles le contexte donne un nouvel éclairage. Une nuit que j'étais aux urgence de l'hôpital de Chartres en train de goûter aux joies d'une colique hépatique qui eut pour conséquence ultime de me priver de vésicule biliaire, j'entendis une jeune infirmière reprocher aux nervis de la police de lui présenter un blessé menotté. Il lui fut répondu que le gars que leur malheureux prisonnier venait de poignarder et qui se trouvait au bloc chirurgical pourrait lui expliquer cette précaution.

Autre petite histoire : suite à une manifestation du National Front, la presse anglaise publia la photo d'une pauvre petite vieille au visage ensanglanté réputée avoir été victime de la violence de ces brutes fascistes. Hélas, quelque jours plus tard, la bonne grand mère reparut pour déclarer qu'elle était en fait une militante du NF, victime d'une chute suite à une action des contre-manifestants.

Comme quoi, ce qu'on voit...

Remarquez, je dis ça, je dis rien. Je n'ai aucune illusion quant au fait que les gens continueront de voir ce qui leur plaît et d’interpréter les images de la manière qui convient le mieux à leurs préjugés ou à leurs détestations quitte à mêler leur voix au concert d'autres qui sont à leur extrême opposé sur l'échiquier politique. Pour eux, les ennemis de leurs ennemis sont leurs amis. Pas pour moi.

14 commentaires:

  1. Vous choisissez mal vos images, on trouve de tout si on cherche.
    J'en avais de plus drôles mais Twitter semble atteint d'une frénésie de censure qui touche des comptes qui ne sont même pas politiques, juste "de mauvais goût" (selon eux) on est bien partis...

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    1. Je e souviens avoir reçu cette image de Benjamin Rabier au CP. D'où ce choix.

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  2. Notre brave ministre de l'intérieur, qui semble sorti tout droit d'un film de Sergio Leone pour la dégaine, s'est égaré en politique: il aurait dû rester à une table de poker ou continuer à ne se raser qu'une fois par semaine, ce qui lui aurait évité d'enfiler les perles.
    Remarquez, Madame Loiseau pourrait lui tenir compagnie, il feraient du tricot ensemble...
    Bon, bon, bon, tout ce que vous écrivez là est loin d'être faux mais sans être un anti-flic primaire, je me pose tout de même des questions comme celle-ci : pourquoi si peu de black blocs à faire les frais des matraquages ou à être arrêtés ?
    Pourquoi remettent-ils ainsi le couvert samedi après samedi sans en être au moins empêchés en amont ?
    Parce qu'ils courent trop vite et sont rompus à la guerilla urbaine pour se laisser enfermer dans des nasses où échouent des manifestants inexpérimentés, proies faciles pour les flics ?

    Les préjugés des braves gens, c'est étrange mais je ne les vois pas au même endroit que vous.
    C'est plutôt dans l'électorat traditionnel de Macron, ces braves gens qui détestent la chienlit, applaudissent quand on fout sur la gueule des gueux et revoteront Macron quoi qu'il arrive et malgré qu'ils en aient, qu'on a de bonnes chances de les rencontrer.
    Je le sais, j'ai quelques oiseaux du genre CSP + dans mon entourage qui pensent ainsi, à la virgule près...

    Vendémiaire.

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    1. Qu'est-ce que vous voulez que je vous dise ? Que Macron laisse faire les BB pour discréditer les GJ ? Mais ce soit-disant complot est vieux comme le monde et ne ma convainc pas.

      Ne fréquentant pas d'électeurs de Macron, je ne sais si vous avez raison. Personnellement je n'en suis pas mais la chienlit m'agace au plus haut point.

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  3. "Le journalisme consiste à rechercher, vérifier, situer dans son contexte, hiérarchiser, mettre en forme, commenter et publier une information de qualité ; il ne peut se confondre avec la communication. Son exercice demande du temps et des moyens, quel que soit le support. Il ne peut y avoir de respect des règles déontologiques sans mise en œuvre des conditions d’exercice qu’elles nécessitent."
    Ce petit extrait de la charte des journalistes (il y en a plein d'autres intéressants)
    bien suivi permettrait de mieux comprendre les évènements.
    Reste à trouver des journalistes...

    Le Page.

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    1. Le problème est que les journalistes appartiennent à des chapelles et, comme le citoyen lambda, ne voient que ce qu'ils ont envie de voir.

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  4. On peut faire dire beaucoup de choses aux images même l'expression de la simple réalité.

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  5. "Une nuit que j'étais aux urgence…" rhôôô … Mais bon, qu'importe le flacon… l'article n'est pas faux (dirait Perceval)

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    1. Je pourrais décrire la scène sur un ton geignard, mais je préfère l'humour.

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  6. Je ne comprends pas en quoi être "CSP +" serait une caution morale et/ou référence intellectuelle absolue ...

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    1. Moi non plus. CSP+ ne veut pas dire cultivé ou intelligent.

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  7. Mon propos était en réponse à Vendémiaire, mais hélas les mystères de l'informatique, tels le furet, sont passés par là ...

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