jeudi 3 janvier 2019

Débats : le grand absent

Il m'arrive de regarder certains talk-shows (émissions de débats, pour les francophones). Parmi ceux-ci, mon préféré, et de loin, le seul en fait que j'apprécie vraiment et que je suis avec régularité est celui de M. Pascal Praud intitulé L'Heure des pros que propose Cnews en semaine entre 9 h et 10 h 30. Son grand avantage est qu'il réunit des gens de toutes sortes représentant à peu près toutes les nuances politiques existant dans le pays. Souvent, le ton monte, tout le monde parle en même temps, on s’interrompt et ça tourne au bazar. Mais l'un dans l'autre ça reste intéressant.

Cependant, et malgré toute la bonne volonté du maître de céans, il n'en demeure pas moins qu'on constate une absence criante : celle des indifférents. Car les participants, quelles que soient leurs préférences politiques, ont toujours un avis sur les sujets traités. Je n'ai jamais entendu un seul dire qu'il ou elle s'en foutait complètement, n'en avait rien à cirer, rien à battre, rien à foutre, qu'il s'en battait les couilles ou s'en tamponnait le coquillard.

Et c'est bien dommage car une partie importante de la population n'est, de ce fait, pas représentée. Cette absence a de graves conséquences : en effet, n'entendant jamais la voix de leurs semblables, les indifférents, les j'm'en foutistes, se sentent seuls, pensent que personne ne partage leur profond désintérêt. Du coup, quand on les sonde, ils se sentent obligés de prendre parti et le font en fonction de ce qu'ils pensent correct de penser, histoire de ne pas trop passer pour des cons. Ils se voient contraints de paraître préoccupés par les problèmes à la mode. Alors qu'en réalité la faim dans le monde, le chômage, le réchauffement global, l'affaire Benalla, les gilets jaunes, le référendum d'initiative populaire, la dette publique, l'extinction annoncée du boutiflard à pattes bleues et bien d'autres questions, ils s'en foutent comme de l'an quarante. S'ils exprimaient le fond de leur pensée, ils passeraient pour des monstres alliant une totale insensibilité à une regrettable superficialité.

La conséquence ultime de cette absence est que les politiciens passent leur temps à s'occuper de problèmes qui n'intéressent pas grand monde et que le peuple finit par se persuader que son bonheur ou son simple bien-être sont liés à la solution par les dirigeants de questions auxquelles, en réalité, ils portent un intérêt très relatif.

19 commentaires:

  1. Au moins chez vous on peut le dire. Rien à cirer !

    RépondreSupprimer
  2. Je suppose qu'il y a une sélection au départ où ceux qui n'en ont rien à foutre sont éliminés d'office. Au cas où ils s'assoupiraient sur le plateau.
    Orage

    RépondreSupprimer
  3. J'écoute moi aussi l'heure des pros en différé sur YouTube, curieusement ça m'aide à me concentrer sur mon travail en m'évitant de batifoler sur internet. Je pense que les indifférents ne correspondent pas du tout à notre époque où tout le monde est censé avoir un avis sur tout. Ce qui me choque le plus c'est que personne ne dise jamais " je suis désolée, je n'y connais rien", d'autant que les thèmes de cette émission sont choisis en réaction à l'actualité et que personne n'a eu le temps d'y réfléchir beaucoup

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. " je suis désolé, je n'y connais rien".
      Magnifique!
      Ma devise préférée que je ne mets pas souvent en pratique,faute d'humilité ;-)
      Je précise que lorsque je la sors au filles,elles tombent comme des mouches.
      Les voies de la séduction sont impénétrables...

      Bonne année 2019 à tous...

      Vendémiaire.

      Supprimer
    2. @ Vendémiaire : merci pour les vœux.

      @ Athena : Nous vivons dans un monde où les Pic de la Mirandole abondent...

      Supprimer
  4. Ah! Mais si,l'extinction du boutiflard à pattes bleues c'est un enjeu crucial pour l'humanité.
    Avez vous des informations récentes à ce sujet?
    (puisque vous en parlez)

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En fait, il semblerait qu'un chasseur écolo-conscient, en voyant le dernier couple ait généreusement épargné le mâle.

      Supprimer
  5. Je déplore également l'absence d'un bouton "Je m'en tape le cul par terre" sous "Oui" et "Non" dans la grande majorité des sondages proposés par la presse en ligne. Je pense que je l'utiliserais souvent. Dernier exemple dans Le Figaro: "Croyez-vous que le gouvernement parviendra à faire payer des impôts aux géants américains du numérique ?"

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. C'est pas bien, Rupert ! il faut leur faire rendre gorge. D'ailleurs, ils ne demandent que ça.

      Supprimer
  6. Merci de vos bons vœux, j'ai complètement zappé les vœux cette année il n'empêche que j'aimerais que tout se passe bien pour tout le monde quoique ce soit difficile : le bonheur de l'assassin est souvent opposé à celui de sa victime.

    Je ne dirai pas que TOUS les sujets m'indiffèrent, loin de là mais par exemple, la soi-disant affaire Benalla, je m'en bats le coquillard.

    RépondreSupprimer
  7. De Montesquieu :

    "Ne faisant partie ni des dix personnes qui à Paris connaissent ces questions, ni des cent-mille qui prétendent les connaître, on se gardera bien d'arbitrer cette querelle d'érudits, on laissera aux lecteurs le soin de se faire une idée"

    Dominique

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Les lecteurs seront-ils en mesure de se faire une opinion raisonnable ?

      Supprimer
  8. "l'extinction annoncée du boutiflard à pattes bleues", sans oublier le mouflard à crête mauve, la capistrole chauve, le trifougnard visqueux, le Nyctamère bouffon, le tire-chevillette, la bobinette chéra, le glapion rieur, le pantouflard à burnes rousses et la bouzinette caqueteuse, espèces que vous aviez répertoriées à propos du barrage de Sivens.
    Orage

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Tout cela est bien triste, vous avez raison de le rappeler. Mais il y a plus triste encore : la disparition d'espèces avant même qu'on ne les ait découvertes !

      Supprimer
  9. Bonne année, Oncle Jacques ! Eh bien je crois que vous allez être servi cette année : en effet depuis le début de l'année, on n'entend plus que des caqueteurs-teuses qui ne savent pas comment les choses vont tourner, pour le Président, pour le gouvernement, pour le Parlement, pour les Gilets Jaunes, pour vous, et pour moi, en un mot pour la France ! Un vrai régal : plus personne ne sait plus rien !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Merci de vos vœux et veuillez accepter les miens.

      La situation est si inquiétante que j'en suis à me demander si je ne ferais pas bien d'annuler tous les prélèvements faits sur mon compte en banque vu l'imminent écroulement du système.

      Supprimer
  10. Depuis quelque temps, j'ai cru remarquer que la plupart des gens autour de moi ont des opinions sur de très nombreux sujets. Et ces opinions se ressemblent beaucoup entre elles. Il est très rare qu'un sujet arrive et que, justement, quelqu'un n'ait rien à en dire. J'ai découvert il y a peu l'explication à cette soudaine "conscience politique" de mes contemporains. J'étais à l'hôtel et je zappais (il faut préciser que je n'ai plus de télé depuis 25 ans au bas mot, et que voir une télé est toujours pour moi une redécouverte); Que vis-je? des dizaines de plateaux où trois ou quatre guignols abordent, traitent, ressassent indéfiniment les mêmes sujets; on a beau zapper, on n'échappe plus aux sujets du jour, bientôt chassés par les sujets du lendemain ! Et ça parle de Benalla, et ça s'étend, ça reprend le sujet par tous les angles, ça enquête sur son copain du CM2 qui est devenu pizzaïolo, ça trouve des scoops sur ses préférences en matières de bottines, ça bouscule des certitudes, ça renverse des paradigmes, ça encule les moucherons que c'est une horreur ! J'en ai tiré une certitude : si les gens me semblent si bêtes, c'est qu'ils regardent trop ces shows indifférenciés et ne sont plus capables de se foutre de rien. Le citoyen concerné, voilà l'enfer !

    RépondreSupprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.