mercredi 8 avril 2015

Traitre certes, mais surtout créateur



Comme je le disais il y a quelque temps, j’ai récupéré ma traduction de Snuff Fiction de Robert Rankin. Depuis, je lui fais subir une révision complète, comparant l’original à ma version, phrase à phrase. Cela me permet de reformuler certaines passage, de corriger quelques erreurs, de remédier à des oublis, de préciser certaines approximations. Dans cette tâche, Internet s’avère un outil utile en ce que la multiplication des dictionnaires en ligne permet de mieux cerner le sens d’une expression ignorée par le Happap’s unabridged edition bien qu’il tende à l’exhaustivité.

La célèbre formule « Traduttore, traditore », tend à présenter le traducteur comme un traitre au texte original. Comment pourrait-il en aller autrement ? La véritable fidélité consisterait à ne pas traduire. Ce qui réduirait le public de toute œuvre aux seuls locuteurs-lecteurs de sa langue d’origine. Aussi près qu’il tente de rester du texte, le traducteur ne peut aucunement rendre une foultitude de connotations, de jeux de mots, de références culturelles plus ou moins évidentes pour son lectorat d’origine qui pour être comprises nécessiteraient de lassantes notes de bas de page, etc. De plus toute langue a ses caractéristiques propres. Toute traduction de l’anglais en français a pour conséquence d’augmenter de manière conséquente (20 à 30 %) le volume de l’écrit. Malgré toutes ses qualités insignes, notre belle langue manque de concision, ce qui la rend moins « percutante » (traduction peu satisfaisante de « punchy »).

Un des obstacles majeurs à la fidélité est le jeu de mot. Un autre est la connotation. Tenter de les contourner mène soit à une perte de sens, soit à des contorsions acrobatiques et parfois pathétiques. Ainsi ai-je (provisoirement ?) renoncé à traduire le titre« Snuff Fiction ». Car s’il est question dans le roman de tabac à priser (snuff), il existe un genre de films pornographiques nommé « Snuff movies » au cours desquels un participant est réellement assassiné (de l’américain snuff : buter, zigouiller). Comment rendre cette connotation qui bordaille au jeu de mot ? La solution choisie face à ce genre de problèmes est de pousser les balayures sous le tapis en choisissant un titre n’ayant rien à voir avec l’original…

Si l’on écarte la possibilité d’’une totale fidélité, que fait le traducteur ? A mon sens, il crée une nouvelle œuvre, inspirée, plus ou moins rigidement guidée par le texte d’origine mais quelque chose de totalement nouveau et qui devient à tous les sens du terme étrangère à son auteur. Traduire est aussi  un exercice enrichissant pour qui se mêle d’écrire. C’est d’ailleurs dans le but de perfectionner mon écriture que je m’étais lancé le défi de traduire un roman de Pratchett. J’avais alors le vague projet d’écrire un roman. J’ai abandonné l’idée. Écrire des billets de blog me suffit. Si la fantaisie de traduire me reprend, ce sera dans le seul but d’occuper de manière agréable les interminables moments de loisir qu’impose la mauvaise saison.

9 commentaires:

  1. "Happap’s unabridged edition"?? Allons, cher Jacques, vous ne vous relisez pas? C'est Harraps bien entendu.
    Quelle est la date de la première publication de "Snuff fiction"? Je n'ai pas réussi à la trouver. Car si vous avez traduit ce livre il y a longtemps, les snuff movies n'existaient peut-être pas encore à l'époque.
    Le dictionnaire en ligne qui m'amuse le plus (je suis moi-même en train de traduire un livre du français en anglais), c'est le Linguee: ses exemples semblent tirés exclusivement d'instances comme le parlement européen. Sans grand intérêt pratique.

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    1. Désolé, chère Orage mais il s'agit à l'origine d'un dictionnaire publié par une maison d'édition créée en 1901 par M. George Godfrey Harrap. Cet ouvrage est donc le Harrap's (Le Harrap's Standard en 4 volumes fut publié pour la première fois par cette maison en 1934).

      Snuff Fiction a été publié par les éditions Doubleday en 1999, époque où ce genre existait déjà. Il est raisonnable d'y voir un clin d'oeil du facétieux Robert...

      Linguee est intéressant pour les termes économiques. Ce qui m'intéresse sur le Net ce sont les dictionnaire anglais, ceux qui expliquent les expressions courantes ou populaires.

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    2. Linguee est intéressant quand on a à lire ou exploiter des textes communautaires ou réglementaires justement. Pour les termes techniques il y a granddictionnaire.com, mon sauveur; il faut seulement vérifier les canadianismes.

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  2. L'autre solution serait de garder le titre original anglais, comme le cinéma l'a fait pour "Pulp fiction",et que les lecteurs fassent comme vous et qu'ils se débrouillent avec leurs différents dictionnaires.
    Moi, j'ai trouvé dans mon "Harrap's shorter" : tabac à priser, moucher une chandelle, clamecer, passer l'arme à gauche, et j'en passe.

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    1. Je pense que ne pas traduire serait une bonne solution. La référence à Pulp fiction" par Rankin me paraît assez claire vue l'antériorité (1994) et le succès de ce film (déjanté lui aussi).

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  3. Autant les traductions sont justifiables et donc leurs traducteurs justifiés, autant les interprétations et réinterprétations de chansons me semblent superfétatoires et donc dignes d'interdiction totale !...

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  4. La traduction c'est souvent La Joconde en macramé! On prend une œuvre d'art et on en fait autre chose,
    il arrive parfois que l'autre chose soit aussi une œuvre d'art mais dans ces cas-là la fidélité en prend un
    coup : personnellement je ne suis pas plus à l'aise en lisant une traduction qu'en regardant un film
    étranger doublé. Forcément ça n'est pas ça....
    Amitiés.

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  5. Je me sers de thefreedictionary.com, de dictionary.reference.com et de wordreference.com
    Si vous en connaissez d'autres, pourriez-vous me les citer?

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  6. Une anecdote me revient à l'esprit: un prof de fac nous avait dit en ricanant que Victor Hugo avait traduit the Firth of Forth par "le premier des quatre".

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