dimanche 6 avril 2014

Êtes-vous préfectophobe ?



Les phobies constituent  un ensemble de maladies mentales très à la mode. En fait, s’il est peu de gens pour déclarer en souffrir, légions sont ceux qui en accusent autrui. Pour être taxé d’homophobie, de xénophobie ou de gauchophobie, un simple manque  d’enthousiasme face aux homosexuels, aux étrangers ou à M. Hollande suffit. Ce qui tend à banaliser nos bonnes vieilles phobies et à les vider de leur substance. Car la phobie est, selon Bobby*, une « crainte excessive, maladive et irraisonnée de certains objets, actes, situations, ou idées »  Etant moi-même affecté de cette curieuse phobie nommée vertige je sais de quoi je parle. Quand vous vous êtes trouvé, paralysé de peur, en train de bloquer un escalier  de fer à Rocamadour tandis que des dizaines de personnes vous agonisent d’injures parce que votre incapacité de bouger les boque aux degrés inférieurs, ou quand  vous êtes resté cramponné plusieurs minutes, tremblant, à la rambarde du chemin qui fait le tour du toit de la cathédrale de Chartres sous l’œil médusé de votre fille qui se demande ce qui peut bien vous arriver, vous êtes en mesure de faire le tri entre vraies phobies et phobies supposées.

Ce blog devient au fil du temps un blog scientifique dont les domaines de prédilection sont l’entomologie (piérides), la géographie et la médecine. Fidèle à cette volonté de vulgarisation, je vais donc traiter aujourd’hui  de cette maladie plutôt rare et insidieuse qu’est la préfectophobie.

Il est essentiel de préciser d’emblée que la préfectophobie ne saurait se confondre avec la casquetteàfeuilledechênophobie. Elle n’est qu’un cas particulier de cette dernière phobie qui déclenche chez qui en est affecté un sentiment de panique irraisonnée en présence de tout officier général, préfet ou commissaire de police en grand uniforme. Le préfectophobe ne s’affole qu’en présence d’un préfet ou, dans les cas les plus graves, d’un simple sous-préfet.

Cette maladie affecte plus de gens qu’on ne croit. Seulement, on peut en souffrir sans le savoir, surtout lorsqu’on évite les inaugurations, vernissages et autres raouts ou qu’on omet, allez savoir pourquoi, de vous y inviter.  Ainsi la plupart des préfectophobes quittent-ils cette vallée de larmes sans qu’aucune crise ne les ait affectés.  Seulement, il est important de savoir si on en est ou non atteint. Car nul n’est jamais totalement à l’abri d’une rencontre fortuite ou officielle avec ce type de haut fonctionnaire. Vos efforts en faveur de la sauvegarde du Niktamère à crête mauve-burne, la valeur de vos écrits (listes de courses, pense-bêtes, commentaires sur « Vu des collines » etc.)  peuvent vous valoir de la part de la république ce merveilleux acte de reconnaissance qu’est une décoration (Légion d’honneur, Mérité agricole, ordre des Arts et Lettres ou plus rarement décoration de la chambre du petit dernier). Imaginez donc que vos mérites soient ainsi reconnus et que,  pour donner plus de relief à la cérémonie, le préfet y soit convié ou même chargé d’épingler sur votre poitrine les insignes de votre distinction. Imaginez également  que vous soyez sans le savoir l’innocente victime de cette affreuse phobie. Que se passera-t-il ? Au lieu de recevoir avec calme et dignité tandis que vos yeux s’embrument l’accolade du fonctionnaire vous pâlirez, serez saisi d’un irrépressible tremblement, de l’écume apparaîtra aux commissures de vos lèvres avant que d’une voix rendue suraigüe par la terreur vous vous mettiez à  hurler « Là ! Là ! Un préfet ! Un gros préfeeeeet ! »;des gardes du corps  vous ceintureront et  vous évacueront vers l’hôpital psychiatrique le plus proche, ce qui devait être votre jour de gloire se transformant ainsi, pour vous comme pour votre entourage, en un jour de honteuse humiliation.

Comment éviter cela ? Eh bien en vérifiant de manière préventive que vous n’êtes pas atteint de cette redoutable phobie. Pour cela, procurez vous l’agenda du Préfet de votre département (quitte à arroser quelque fonctionnaire corrompu : on n’a rien sans rien). Accompagné de plusieurs robustes compagnons aptes à vous maîtriser et à vous évacuer en cas de crise,  rendez vous à une quelconque cérémonie qu’il honorera de sa présence. Si sa seule vue vous laisse de marbre,  n’en restez pas là. Car il se peut que la crise ne se déclenche que suite à un contact physique.  Toujours encadré  de vos accompagnateurs, approchez vous du préfet, et d’un air confiant  serrez lui la main en lui disant : « Alors, Lucien (vous vous êtes renseigné sur son prénom), ça boume ? Toujours dans la préfectorale à ce que je vois ! On peut pas dire que t’aies maigri, ajouterez-vous en lui tapant sur le ventre ». Si rien ne se passe, passez au test ultime : la bise que vous pratiquerez après avoir lancé un joyeux « Ah, j’suis tellement content de te r’voir que j’vais t’embrasser ». Si vous ne ressentez suite à la virile accolade, aucun symptôme, c’est que vous êtes exempt de toute préfectophobie. Vous pouvez donc attendre votre croix en toute quiétude. Dans le cas contraire, exigez qu’aucun préfet ne soit convié à votre cérémonie et continuez de vous procurer l’agenda de votre préfet afin d’éviter toute rencontre fortuite.

*C’est ainsi qu’une longue fréquentation  du Petit Robert m’a amené à le surnommer affectueusement.

16 commentaires:

  1. Quand on souffre de vertige, on évite le genre d'endroits dont vous parlez.

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    1. Le problème est que sans s'en douter on se retrouve dans des endroits qui provoquent la crise alors que rien, au départ, n'annonçait qu'on s'y trouverait : on suit un chemin qui mène à un escalier, par exemple...

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  2. Peut-on soupçonner avant l'écriture de ce billet si drôle la prise de quelques substances illicites ?

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    1. Aucune substance, licite ou non : juste une très grande rigueur scientifique.

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    2. Il se dit ici ou là que la fleur d’hortensia provoque les mêmes effets que je-ne-sais quel psychotrope.

      Je ne vois que cela.

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    3. Les hortensias n'étant pas en fleur, rien à craindre de ce côté-là.

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  3. Qu'est ce qu'un préfet?

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    1. C'est un homme si important qu'il ignore lui même les limites de ses écrasantes tâches au service de l'État.

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  4. Alors là, bravo, vous nous élargissez l'horizon!
    Si vous continuez sur cette voie il faudra bien un jour ou l'autre vous déclarer d'utilité publique...ce qui risque
    toutefois de vous placer au contact d'un préfet ou d'un truc du même genre.
    Amitiés.

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    1. Merci de vos encouragement. Faire de ce blog l'endroit où une humanité déboussolée se verra offrir les lumières qui lui manquent est, comme vous l'avez noté un de mes grands desseins.

      Je puis d'ailleurs vous assurer que si mes travaux se voyaient justement récompensés par de hautes distinctions, je saurai conserver cette modestie qui est le fait des esprits réellement supérieurs...

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  5. Le Préfet le plus honteux est sans conteste celui de l'Aisne !

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    1. ?????????????????????????
      Pas compris !

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    2. C'est un jeu de mots avec le préfet de l'aine et les maladies honteuses !

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  6. La sybaritique et insane engeance préfectorale mérite pour le moins la fosse à purin, sinon pire.

    Que penser en effet du préfet de la capitale angevine qui annonce sa ferme intention de « faire sortir les déboutés » du droit d'asile des centres qui les accueillent en Anjou, car saturés*, et qui fait patte de velours face à la dirigeante locale de France Terre d'Asile ? L'agitée prétend contrecarrer les prétendus oukases administratifs, pourquoi se gênerait-elle d'ailleurs ? La République des droits de l'homme l'y autorise, et le sait la bougresse.

    Car, il faut le savoir, il se murmure en préfecture que le préfet "apprécie beaucoup cette jeune femme rigoureuse, convaincue, professionnelle et, en même temps charmante". La réciproque est vraie. « J'ai découvert quelqu'un de super intelligent. Il s'est adouci. » Diplomate en plus, se réjouit le torchon en ligne.

    D'ici que la préfecture devienne lupanar, il n'y a qu'un pas. Peut-être déjà franchi ?

    On le voit, des raisons pour le moins objectives nous poussent à devenir préfectophobe !

    * Passé de 330 en 2007 à plus de 900 en 2009, le nombre de demandes d'asile enregistrées en préfecture est redescendu à moins de 400. (Sans commentaire).

    Source http://www.angersmag.info/Malika-Glanny-pro-du-droit-d-asile

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    1. La préfectophobie n'a rien à voir avec les attitudes, opinions ou actions de tel ou tel préfet. Autant dire que l'arachnophobie serait liée aux mérites ou défauts de telle ou telle araignée.

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  7. Ah, un compagnon d'acrophobie ! Paniquée à l'idée de descendre un escalier roulant, j'ai à leur égard la même attitude que le préfectophobe face à l'objet de son dégoût : je connais la position des ascenseurs dans tous les grands magasins que je fréquente et fais de longs détours pour trouver un escalier non mécanique dans les métros, les gares...

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