dimanche 23 octobre 2011

J'aime bien les jeunes


J'en ai un peu honte, je sais que ça ne se fait pas, il me faut pourtant le reconnaître : j'aime bien les jeunes. Pour des tas de raisons. Ils sont l'avenir, ils ont de l'énergie, des certitudes à revendre. De ces certitudes dont ils riront plus tard, une fois que, comme le disait Romain Gary, "les camions de la vie leur auront roulé sur la gueule". Ou dont ils ne riront pas, car parfois, souvent même, l'homme se fossilise vite. Il reste attaché, ou feint de le rester, aux "valeurs de sa jeunesse". Bien sûr, il les aménage en passant de petits compromis avec la réalité : ainsi le trotskyste se fait socialo et chante encore l'Internationale quand l'occasion se présente tout en sachant pertinemment que ce n'est pas demain que du passé on fera table rase et que "L'internationa-a-a-a-le sera le genre humain" le jour où les poules auront des dents.

J'aime bien les jeunes parce qu'aussi curieux que ça puisse paraître j'ai, il y a longtemps, été jeune moi-même. Ayant encore un rien de mémoire, me reviennent les enthousiasmes, les colères, les mépris, les révoltes, les intransigeances  de mes jeunes années voire leurs amours compliquées. Je me les remémore avec un rien d'étonnement, tant leur intensité et leur objet me paraissent curieux. Pourtant ils ont été. Ils sont parties de moi. Je ne vois donc aucune raison de reprocher aux jeunes de maintenant de ressembler au gamin que j'étais.

Bien sûr, il est parfois agaçant de se faire traiter de vieux con par de jeunes coquelets qui vous attaquent tous ergots dehors et semblent croire que leurs assauts vont vous déchiqueter alors qu'au fond ils ne vous mettent pas plus en question qu'une mouche importune qui bourdonne à vos oreilles. Et c'est peut-être ça le pire :  quelque part, le jeune agressif réalise qu'il fonce tête baissée contre un mur de certitudes et de morgue qu'il ne risque aucunement d'ébranler. Dans le fond, plutôt que de provoquer une  bienveillance un rien paternaliste, le jeune aimerait qu'on le prenne au sérieux, qu'on voit en lui un redoutable adversaire...

Certains se verraient bien "gardes rouges" de je ne sais quelle révolution sans réaliser que les jeunes chinois,  alors que dans un bain de sang et par leur ferveur iconoclaste ils pensaient créer un monde nouveau, n'étaient que les pions dont se servait un vieillard sanguinaire pour récupérer un pouvoir qui lui échappait...

Alexandre Sanguinetti répondit un jour qu'on lui parlait des problèmes de la jeunesse que la jeunesse n'était pas un problème, vu qu'on était sûr qu'elle passerait. Ma mère disait qu'il faudrait être vieux avant d'être jeune, histoire d'éviter les erreurs... Tu parles ! Comme si les erreurs ne faisaient pas partie intégrante et indispensable de la construction d'une personne !

Ce qui déséquilibre les rapports inter-générationnels c'est une injustice fondamentale : les vieux ont TOUS été jeunes (même ceux qui refusent de l'admettre) mais les jeunes n'ont JAMAIS été vieux.

15 commentaires:

  1. Il me semble comprendre à qui, entre autres vieux jeunots, vous faites allusion.

    Vous avez parfaitement raison et moi qui suis entre deux âges, je ne me souviens pas avoir été aussi méprisante et d'aussi courte vue que celui auquel je pense.

    Cracher sur les gens d'expérience, sur les profs, sur les livres en bois, sur les cours (magistraux ou non), sur l'école (le concept) ne me paraît pas être un signe de bonne santé. Et éructer sur ceux qui apportent un plus à notre savoir, bien que n'étant pas l'apanage des "jeunes", me semble un gage de militante débilité.

    RépondreSupprimer
  2. Nous nous comprenons, Carine...

    Mais répondre à ce jeune homme serait perdre son temps, tant ses éructations sont pitoyables. Cela dit, sauf à se fossiliser prématurément, on peut espérer qu'il finira par changer. Après tout, il est plus touchant que nuisible...

    RépondreSupprimer
  3. Proverbe africain:

    " Quand un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui brûle".

    Il y a aussi:

    " On devient vieux quand on insulte les autres de jeunes cons".

    Nous étions jeunes et nos parents nous trouvaient insupportables, la roue tournant, nous jugeons nos enfants comme des perturbateurs et eux le feront avec les leurs.

    RépondreSupprimer
  4. Un vieillard qui meurt, c'est une bibliothèque qui brûle
    Je pense que c'est un faux proverbe africain forgé par les antiracistes, car cela signifierait que le mot bibliothèque existe dans une société sans bibliothèque, justement...

    RépondreSupprimer
  5. Modernoeud ne semble pas toujours de gauche :

    un cours magistral donné par un vieux s'est révélé chiant.
    donc un cours magistral donné par un vieux est toujours chiant.
    donc les vieux sont toujours chiants.
    et les cours sont toujours chiants.
    donc internet c'est mieux que les cours (et les livres ), et en plus il y a des coms.
    et donc les jeunes sont moins chiants que les vieux, et moins cons.
    Par exemple Aristide, il est sur internet alors il devrait ne pas être chiant ..et bien il l'est quand même... mais c'est parce qu'il est plus vieux que d'autres, et qu'il parle de livres.
    Donc seuls les trucs écrits SUR Internet ET par des gens pas vieux ne sont pas chiants.
    C'est pourquoi j'ai les solutions à tous les problèmes de l'éducation nationale.
    XXL

    Anonyme :
    Ah, et les trucs sur Internet écrits pas des jeunes cons on en fait quoi ?

    XXL :
    Oh, fait chier !

    Anonyme (il insiste ce con) :
    eh, mais eh, et le blog de Didier Goux, qui est vieux..., vous n'allez pas nous dire qu'il est chiant.

    XXL :
    Vous n'avez RIEN compris (salope !)

    RépondreSupprimer
  6. Brassens le disait si brièvement et avec tant d'élégance : "Le temps ne fait rien à l'affaire, quand on est con, on est con". Dans le même panier, cons caducs et cons débutants.
    Le jeune prétentieux qui se veut brillant mais qui n'est que verni n'a pas compris ça... On peut espérer pour lui que l'âge révèlera qu'il se trompait, juste une fois, la vue trompée par les hormones. Le plus vraisemblable, devant une pareille bouffissure orgueilleuse, c'est qu'une fois le verni râclé par la vie il se révèlera tel qu'il est sous la pellicule : terne con.

    RépondreSupprimer
  7. Jazzman,

    Renseignement pris dans mon livre des proverbes africains, il ne figurait pas.

    C'est une citation prononcée par HAMPATHE BA écrivain et ethnologue malien;à la tribune de l' UNESCO suite à un échange verbal avec un sénateur BENTON.. La voici:

    «Messieurs celui qui est devant vous n 'est pas un universitaire, il n'a pour tout titre qu'un certificat d'étude primaire indigène. Je vais vous parler en tant qu'Africain. Le sénateur BENTON est monté à cette tribune. Honorable sénateur, vous n'avez pas compris la jeunesse africaine. Les jeunes sont montés, ils ont chahuté, dit des méchancetés, dépassé les bornes, vous les avez traités d'ingrats et d'analphabètes. Je concède que nous sommes des analphabètes, mais je ne vous concède pas que nous soyions des ignorants. Vous confondez à ce que je vois, l'écriture et le savoir. Pour nous, l'écriture est une photographie du savoir.
    L'Ecriture que vous apprenez c’est la science d'un autre, elle n'est pas intuitive, c'est comme un puit qui reçoit ses eaux du dehors. Apprenez honorable sénateur, que dans mon pays chaque fois qu'un vieillard meurt, c'est une bibliothèque qui a brûlé ».

    Je ne pense pas que ce monsieur était un anti-raciste.

    RépondreSupprimer
  8. Il fallait lire était : "n'était pas un anti-raciste"; il faudrait que je me relise, trop fainéant pour ça.

    RépondreSupprimer
  9. Alors pour faire court, disons que nous, nous avons des vieillards et des bibliothèques.

    RépondreSupprimer
  10. Grandpas, merci de me remémorer ce proverbe. Jazzman, merci de l'éclairer ainsi. Quoi qu'il en soit, il serait temps de changer le proverbe. Quand un vieillard meurt en Afrique, c'est toute une foultitude d'ouvrages, de documents et de banques de données numériques qui s'effacent. Soyons modernes, bordel !

    dxdiag, vous ne semblez pas convaincu par XXL. Votre mauvaise foi vous perdra.

    Pakounta, vos deux hypothèses sont vraisemblables. je n'aurai pas le pessimisme de penser que la dernière est plus probable.

    Grandpas, on ne peut considérer que la bibliothèque vivante que constitue chaque vieillard a brûlé qu'à condition que le bonhomme n'ait transmis son savoir à personne...

    Jazzman, en effet nous avons les deux. Et en plus nous avons des vieillards en plus grand nombre...

    RépondreSupprimer
  11. C'est bien ici le cimetière des éléphants?
    Ah, merci. Faites moi une petite place voulez-vous?
    Eh oui, à consulter mon état civil je me serais cru encore assez éloigné de la vieillesse, presque jeune même, mais j'ai bien compris que l'âge n'attend pas le nombre des années. Que voulez-vous, quand vous êtes moisi de l'intérieur il ne vous reste plus qu'à tirer votre révérence.
    Je vais donc me coucher ici et attendre.
    Mais je vois que je suis en bonne compagnie. On se tiendra chaud.

    RépondreSupprimer
  12. Entre ici, Aristide, avec ton terrible cortège. Avec ceux qui ont lu des grimoires poussiéreux et ce qui est peut-être plus atroce on fait des études supérieures. Avec tous les pelés et tous les tondus de l’Éducation Nationale, avec le dernier corps trébuchant des universitaires débiles et ennuyeux, enfin tombés sous les assauts de le culture numérique. Avec les milliers d'érudits français, avec la dernière femme capable d'écrire trois mots sans faire dix fautes. Entre avec le peuple né de l'ombre et disparu avec elle — nos frères dans l'ordre de la barbarie pré-numérique.

    Oui, tu as ta place ici !

    RépondreSupprimer
  13. Si le jeune dont on parle est celui que je viens de lire, c'est juste un triste imbécile sans culture et sans éducation. .. Il récoltera ce qu'il a semé : manque de respect et insulte. Geargies.

    RépondreSupprimer
  14. Good morning Jacques-Etienne,

    Nous avons de vieillards en grand nombre, un seul soucis, nous mettons de en plus nos anciens dans de grande bibliothèque où pratiquement personne ne les consulte.

    A propos de l' Afrique et des bibliothèques, il y en avait une celle d' Alexandrie brûlée par les conquérants arabes qui aussi déplacèrent la capitale de l' Egypte d' Alexandrie au Caire plus prés de leurs sables du désert.

    RépondreSupprimer
  15. Pour le plaisir,

    Deux proverbes africains sur la vieillesse:

    Ce que le vieillard voit en étant assis, le jeune homme qui est debout ne le voit pas.(Malinké/Sénégal)

    Ce qui a été mouillé par la pluie ne saurait plus l'être par la brume(Obimboundu/Angola)

    Bonne journée.

    RépondreSupprimer

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.