..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

mercredi 3 mars 2021

De l’enracinement et de l’identité

J’ai, dans mon précédent article, exprimé mon scepticisme sur la valeur des notion de racines et celle de fleuve chère au bon Maurizio Bettini. En filant la métaphore des racines ne pouvant se concevoir que comme la partie de l’arbre qu’elles nourrissent. Cependant, l’enracinement est ou plutôt a été une réalité. J’en veux pour preuve les recherches généalogique faites par un membre de la famille de mon ex et défunte épouse qui montraient que du XVIIe siècle au début du XXe tous leurs ancêtres avaient vécu près de Luçon, en Vendée. Dans la première moitié du siècle dernier, pour une raison que j’ignore le grand-père de mon ex-femme vint s’installer comme métayer dans le département voisin de la Vienne où trois de ses cinq enfants demeurèrent également. Jusque relativement récemment donc, on pouvait considérer que cette famille de petits paysans était enracinée dans son terroir vendéen, parlant le patois local et vivant ou survivant grosso-modo de la même manière, en dehors des périodes de troubles civils, dans une société stable . Seulement, le grand-père, probablement doté d’un esprit aventureux, rompit cette chaîne et devint un déraciné en s'installant comme métayer dans le département voisin de la Vienne, certains de ses enfants n'y retèrent pas et ses petits enfants s’éparpillèrent encore davantage…

De mon côté, bien que n’ayant fait aucune recherche généalogique, je suppose qu’il en alla de même pour mes ancêtres maternels et paternels vivant dans le Trégor. Si je croyais aux racines, je devrais donc me considérer comme Breton. Mes parents, parlant la langue, considérant leur exil francilien de trente et quelques années comme une parenthèse, retournèrent dès que mon père prit sa retraite au pays. Ce fut pour ma mère une source de désillusion, la Bretagne réelle ne ressemblant plus vraiment à la Bretagne idéalisée de sa jeunesse. Quant à moi, mis à part une mise en nourrice dans le pays de ma mère jusqu’à deux ans et demi et bien qu’ayant vécu jusqu’à 18 ans en Île-de-France, je ne me sens pas pas plus Breton que Francilien. Plutôt qu’à des « petites patries » je me sens appartenir à une plus grande : la France. Si j’ai une identité, celle-ci est Française et rien d’autre.

Le Larousse donne entre autres définitions du mot "identité" la suivante : « Caractère permanent et fondamental de quelqu’un, d’un groupe, qui fait son individualité, sa singularité : Personne qui cherche son identité. Identité nationale. ». Pourtant, le terme « permanent » mérite d’être précisé. Rien n’est immuable, tout évolue. Bien qu’indéniablement et fondamentalement Français, les paysans du XVIIe siècle que j’évoquais plus haut, étaient bien différents de moi. Ils s’en distinguaient par la langue ou le patois, le mode de vie, un rapport différent à la religion, un manque de mobilité, de moyens de communication, des accoutrements différents, etc. De même, à soixante-dix ans, je ne suis plus ce que j’étais à vingt ni même à quarante ans. Des influences, des expériences sont venus me modifier cependant je n’ai pas pour autant perdu mon identité personnelle. Pour ce qui est de mon identité nationale, il en va de même. La France de 2020 n’est pas celle de 1970 ou de 1990 je ne lui demeure cependant pas moins viscéralement attaché. C’est, je crois, la durabilité de cet attachement qui fait la permanence de mon identité française. Je me sens Français, en ce que j’appartiens à la communauté française et que je ne saurais appartenir à aucune autre.

J’ai pris conscience de cette appartenance au cours de plusieurs séjours prolongés à l’étranger, d’abord au Sénégal puis par deux fois en Angleterre. Il est évident qu’il était plus facile de me sentir davantage d’affinités avec les Anglais que les Sénégalais. Cependant je n’aurais à aucun prix pu devenir Anglais malgré toute l’affection que je peux porter à cette nation et les liens forts que j’ai pu, un temps, y nouer. Je n’ai, malgré les années que j’y ai passé, pu sentir la moindre appartenance à ce pays. Sentiment d’ailleurs réciproque vu que, sans que mon accent puisse me faire identifier comme Français, j’y étais considéré comme étranger. C’est à dire qu’à la différence de certains Cockneys, Jordies ou Glaswegians, que leurs accents respectifs rendent difficilement compréhensibles mais dont personne ne remettrait en cause l’appartenance à la communauté anglaise ou britannique, je n’y étais qu’un élément allogène.

Cela dit, tenter de donner une liste des éléments constitutifs de l’identité française ou de toute autre identité nationale me paraît illusoire. Pour une simple et bonne raison qui est la diversité de toute population. On pourrait commencer par éliminer des critères non pertinents comme par exemple, la couleur de peau, la religion, l’adhésion à un système politique, des traits de caractère et de manière générale tout critère que seraient censés partager l’unanimité des Français. Même la connaissance de la langue si elle est devenue une condition nécessaire de l’appartenance à la communauté nationale n’est pas une condition suffisante vu qu’on peut très bien en avoir une maîtrise supérieure à celle de bien des Français sans pour autant être Français. Considérer que posséder une culture commune serait nécessaire me paraît également erroné, tout individu n’en possédant qu’une partie voire de simples bribes.

Plus qu’un ensemble de caractéristiques généralement partagées qui seraient censés constituer l’identité française, il me semble qu’il serait plus sage de se borner à une sorte de plus petit dénominateur commun qui fait qu’en dehors de la classe sociale, du niveau d’éducation, de la race, de l’origine, de la région etc., on se sent chez soi en France et qu’on est certain d’appartenir à la communauté française. Je serais bien en mal d’en décrire avec exactitude les composantes. Toutefois, il est certain que ce PPCD existe et qu’il est ressenti par une majorité de Français.

Une autre évidence est que des forces sont en œuvre pour détruire ce fond commun et faire primer l’individuel sur le collectif afin d’atomiser les nations et de mieux les amener à se dissoudre dans une sorte de gloubi-boulga humain (ou Matière Humaine Indifférenciée pour reprendre l’expression de Renaud Camus), la « citoyenneté du monde » notion aussi vague qu’inexistante devenant, du moins pour certains membres des sociétés occidentales, l’idéal à atteindre. Malheureusement, il ne semble pas que cet idéal enthousiasme le reste de la planète… J’y reviendrai.




dimanche 28 février 2021

Du fleuve et des racines

 Avertissement : j'ai décidé après mure réflexion de  fermer les commentaires de ce blog, lassé que je suis d'avoir à jouer au chat et au cloporte (à la souris serait flatteur pour l'individu en question) avec un énergumène qui m'importune depuis des années et me fait perdre mon temps à censurer ses cloporteries. J'espère que mes commentateurs fidèles et les autres comprendront cette décision que je ne prends pas de gaité de coeur. Elle risque fort d'être définitive vu que les cons ne prennent jamais de vacances.

Un ami Facebook vanta récemment les mérites d’un livre d’un certain Maurizio Bettini intitulé Contre les racines. Si j’ai bien compris d’après la discussion qui s’ensuivit, le bon Maurizio semblait préférer la métaphore du fleuve à celle des racines. Les racines seraient immuables autant qu’imaginaires tandis que le fleuve est en mouvement et sans cesse alimenté par des affluents qui le grossissent et l’enrichissent.


Point n’est besoin d’être grand clerc pour deviner que M. Bettini, par sa métaphore ne fait que défendre la vieille balançoire des progressistes qui tendent à nous persuader que tout change depuis tout temps, que la sagesse veut que nous nous laissions emporter par le courant, enrichir par les apports des affluents et que s’accrocher à une illusion identitaire est un leurre.


Sans compter qu’évidemment cette aspiration identitaire ne saurait que nous ramener à la barbarie qu’a entraînée certaine idéologie du siècle dernier avec les terribles conséquences que l’on sait.


Je suppose que, logiquement, se laisser porter par le courant du fleuve et la force que lui ajoutent ses affluents ne saurait selon ce grand philosophe que nous mener à un océan de félicité.


Posé ainsi, la controverse qui oppose fleuve et racines ne saurait se résoudre que par une victoire totale des « fleuvistes ».


Seulement, si belle soit-elle, une métaphore n’est qu’une métaphore et avant de l’adopter, il serait bon de préciser en quoi elle est adaptée à la réalité qu’elle est censée illustrer.


La métaphore du fleuve est certes tentante. Au départ, ce n’est qu’un ru que viennent peu à peu grossir des affluents, c’est à dire des cours d’eau moins importants que lui, lesquels se trouvent relégués au rang de ru,de ruisseau ou de rivière. Il arrive que par erreur on mésestime le débit de l’affluent et que l’on désigne comme fleuve l’affluent. C’est le cas de la Seine qui à son confluent avec l’Yonne à Montereau-Fault-Yonne en Seine-et-Marne n’a qu’un débit moyen de 80 m3/seconde quand celui de l’Yonne est de 93m3/seconde. Si l’on corrigeait cette erreur séculaire, nous devrions changer le nom de plusieurs départements, de l’Yonne-et-Marne à l’Yonne-Maritime en passant par les Hauts-d’Yonne et L’Yonne-Saint-Denis. Sans compter que pour maintenir le mètre des vers des poèmes et autres chansons consacrés à la Seine, on serait contraint à opérer une diérèse : « Car l’Y-yonne est une amante et son amant, c’est Paris » aurait dû chanter le grand Maurice Chevalier.


Mais, dans le fond, que le fleuve soit nommé Yonne ou Seine ne change rien au cours d’eau, ses deux constituants se fondant en un seul cours homogène par le mélange de leurs eaux. Peut-on en dire autant des apports culturels des « affluents » à une société préexistante ? Oui, en cas d’assimilation de la minorité à la majorité. Si cette assimilation n’a pas lieu, qu’elle amène à la simple juxtaposition de multiples minorités, qu’elle amène à terme une minorité à surpasser en nombre l’ancienne majorité sans fusionner avec elle ou encore qu’une minorité pour une raison ou pour une autre en vienne à dominer la majorité ou les autres minorités, la métaphore du fleuve est totalement inadaptée. Il suffit de voir ce que la non-assimilation a pu produire et produit encore aux USA ou en Afrique du Sud.


Venons-en aux racines, lesquelles laissent supposer qu’elles sont métaphoriquement celles d’un arbre qu’elles nourrissent en s’enfonçant dans un terroir. Là encore, certains problèmes se posent. En effet, sans intervention extérieure un arbre donnera toujours les mêmes fruits, c’est même à ça qu’on le juge. Seule la technique de la greffe peut y changer quelque chose. En implantant un rameau venu d’un arbre donnant de meilleurs fruits sur le tronc ou la branche d’un arbre vigoureux, on obtient de bons fruits. Toutefois, pour que la greffe fonctionne il faut que celle-ci soit d’une espèce semblable ou proche de celle du tronc. Greffer un pommier sur un tronc de cerisier ne donnera rien. J’ai, chez un ami Eurélien, pu constater qu’une greffe de poirier sur pommier était possible : un ancien propriétaire s’étant aventuré à pratiquer ce genre de greffes, une branche donnait des poires tandis que sur les autres se développaient des pommes. Toutefois, ne s’opérait aucun mélange… La métaphore « racinaire » est donc très limitée pour décrire les interactions culturelles humaines.


En conclusion, il me semble que les deux métaphores sont inapte à rendre compte des apports que peuvent apporter des éléments exogènes à une identité culturelle. L’une par un optimisme exagéré, l’autre en ne permettant que des changements marginaux.


Reste à savoir, si elle existe, en quoi consiste une identité culturelle, comment elle s'acquiert ou on en hérite. J’y reviendrai.

lundi 15 février 2021

Voyage en terre inconnue



J’ai commis une erreur sur Facebook. Croyant avoir à faire à un article partagé par un ami, suite à un de ses commentaires je me suis laissé aller à en déposer un. Malheureusement, je ne m’étais pas rendu compte que j’étais sur la page du Figaro. Le nombre de réactions et de commentaires me mit la puce à l’oreille et je découvris mon erreur.


L’article en question était consacré aux déclarations d’une certaine Pomme*, chanteuse de son état. Je vous en donne le début : «  «J'ai décidé de ne plus laisser régner la peur». Portée par l'élan MusicToo, un mouvement qui dénonce les violences sexuelles perpétrées au sein de l'industrie musicale, la chanteuse Pomme s'est exprimée dans une lettre ouverte publiée sur le site de Mediapart, le jeudi 11 février. »


La pauvre enfant aurait été victime, lorsqu’elle avait 16 ans, d’un  adulte de 30 ans lequel aurait fait d’elle un objet. Tout ça est bien triste. Seulement, en dehors du traumatisme qu’avait pu en ressentir cette jeune femme, une chose m’avait frappé : l’existence d’un mouvement nommé MusicToo dénonçant « les violences sexuelles perpétrées au sein de l’industrie musicale ».. Ironiquement, j’écrivis donc, en guise de commentaire, «Attendez vous à de terribles révélations des mouvements « TriperieToo » et « PoissonerieToo » ! »  histoire de souligner que l’émergence de ces « TrucmachinsToo » était d’un ridicule achevé tant  il est évident qu’aucun milieu professionnel n’est à l’abri de ce genre de problèmes.


Si les soixante et quelques réactions que provoqua cette phrase furent en très large majorité favorables, (amusement, appréciation) il n’en demeure pas moins que certaines furent hostiles. Quant à la vingtaine de réponses qu’elle occasionna, elles me laissèrent pantois. S’y mélangeaient à de rares appréciations, des insultes à mon égard (pervers, sociopathe, etc.), des accusation de rire du malheur des femmes, des délires anti-masculins exprimés dans un français pour le moins approximatif, des débats plutôt hystériques entre commentatrices et des remarques dont le sens m’échappa totalement.


Cette excursion involontaire me confirme dans mon attitude vis-à-vis de Facebook à savoir de n’y exprimer mes opinions qu’à des amis triés sur le volet selon des critères bien précis comme leur sens de l’humour, leurs opinions politiques proches des miennes ou compatibles avec elles, leur capacité à s’exprimer en bon français, et surtout des personnes ayant suffisamment de recul critique pour ne pas s’engager dans des polémiques aussi vaines que violentes.  Moyennant quoi j’y passe d’agréables moments.


*La Pomme en question aurait été récompensée peu après ses déclarations fracassantes lors des Victoires de la Musique (et non de la Music). Me foutant complètement des victoires comme des défaites de la musique, je n’ai cependant pas pu m’empêcher de penser que ses propos héroïques n’étaient pas pour rien dans ce succès bien mérité. 

vendredi 12 février 2021

Des "Anti-boomers"


Il existe tout un tas de plus ou moins jeunes qui vouent aux « Boomers » une haine farouche. Pour eux, ceux qui sont nés entre 1945 et 1955 (quoique tout le monde ne s’accorde pas sur les dates exactes du phénomène) sont responsables de tous les malheurs de la France et par conséquent de la Terre, de sa banlieue et plus généralement de l’Univers. Ils auraient, sciemment, détruit tout ce que le monde d’avant, si harmonieux, portait en lui de noblesse, de beauté, d’excellence, d’harmonie, de paix, de prospérité, d’élégance, j’en passe et d’encore meilleures.



Il se trouve que, suite à une logique implacable, mes parents étant nés dans les années vingt du siècle dernier, je me trouve faire partie de la génération par eux maudite. Je n’y peux rien, c’est comme ça.



Qu’une génération s’en prenne à celle qui l’a précédé n’a rien de très original. Après tout, il faut bien trouver un objet à ses haines, faute de quoi elles tourneraient à vide. Une haine sans objet, c’est comme un policier sans topinambours ou une belle à qui il manque un rhododendron  : ça finit par ronger l’âme de celui qu’elle hante.



Or donc, les anti-boomers reprochent à leurs aînés d’avoir mené une vie confortable, sans soucis, de s’en être fourré plein les poches et de les avoir laissés démunis dans une société sans merci. Ce qui, avouons-le ne serait pas très fair-play de leur part.



Seulement, il y a un hic dans leurs récriminations : les « boomers » ne constituent aucunement un ensemble homogène. Parmi eux, combien ont eu à abandonner leur exploitation agricole devenue trop exiguë pour être rentable ? Combien, dans la métallurgie ou le textile, ont vu leur usine fermer, les laissant sans ressources ni ressort pour simplement survivre ? Combien de petits boutiquiers ont du fermer boutique ?



Nos jeunes amis auraient-ils oublié qu’en 1973 a commencé ce qu’on a appelé une « crise » mais qui n’était que le début d’un long processus de déchéance de l’Europe qui se poursuit 57ans plus tard ?



Ils en veulent également à leurs aînés pour leurs dérives idéologiques. A croire, qu’unanimes, lesdits « boomers » ne rêvaient que de mettre le monde cul par dessus tête !



En fait, les anti-boomers, confondent une génération et son « élite ». Ils ne sont eux-mêmes qu’une « élite » aspirant à remplacer la précédente.



Pour calmer leur impatience, je leur dirai qu’ils finiront bien, si Dieu leur prête vie, par recueillir leur héritage (s’il y en a un), et qu’ils deviendront, à leur tour, des objets de haine. Comme disait Brel (qui en était un beau spécimen) « Les bourgeois, c’est comme les cochons, plus ça devient vieux plus ça devient bête ». Il en est même qui vieillissent prématurément.

mardi 9 février 2021

Niveau de vie,classe moyenne et autres foutaises

 

Ce matin j’ai lu un article de Capital intitulé « Classe moyenne » à quel niveau de revenus correspond-elle vraiment ? » . Le journaliste arrivait à la conclusion que ce revenu tournait autour des 2000 euros nets par mois. Pour y parvenir, il utilisait les statistiques de L’INSEE de 2018, selon lesquelles le revenu net médian des salariés du secteur privé se situait à 22490 € par an, soit la somme faramineuse de 1874 € nets mensuels, niveau au dessus duquel on pouvait se considérer comme jouissant d’une relative aisance et appartenant à la « classe moyenne ». De là à vivre dans le luxe, il y a une très grosse marge !


Les revenus de votre serviteur ne lui permettent pas (de peu, il est vrai), d’appartenir à cette classe de privilégiés mais cependant ils lui permettent de vivre assez confortablement. Et cela pour tout un tas de raisons. Classer les gens en fonction de leur revenu reflète une certaine réalité mais est insuffisant pour définir leur niveau de vie car cela ne tient aucun compte de leurs charges. Si, comme moi, vous êtes propriétaire de votre logement, n’avez aucun crédit à payer et aucune personne à charge, vous disposez d’un revenu disponible bien plus conséquent que d’autres qui, avec des revenus bien supérieurs seraient locataires et paieraient des crédits.


D’autres critères entrent en ligne de compte dans le niveau de vie comme le type d’habitat dont on bénéficie et le lieu où il se situe. Ainsi, je dispose d’une maison de 6 pièces avec une centaine de mètres carrés habitables et d’un jardin. Si mes goûts m’avaient poussé à acquérir un logement équivalent dans une banlieue de Paris, comme par exemple Aubervilliers (qui n’est pas des plus cossues), il m’eût fallu débourser une somme plus de cinq fois supérieure dont, malheureusement, je ne disposais pas. J’aurais donc été réduit à rester locataire d’un petit logement et à amputer mon revenu disponible de son loyer.


Si l’on néglige de prendre en considération le lieu où l’on réside, déterminer le niveau de vie sur la base des revenus n’est pas pertinent.


Un autre donnée est l’argent dont on dispose. Avoir de l’argent devant soi, que ce soit suite à une bonne gestion de ses finances, un héritage ou un gain au loto, même si à l’heure actuelle, hors placements risqués, ça ne rapporte rien permet tout de même de profiter de promotions et de bonnes occasions quand elles se présentent. Au contraire, comme le disait si bien ma défunte mère qui passa sa vie à éviter d’être démunie, « ça coûte cher d’être pauvre ! » vu qu’on paie tout plein pot.


En résumé, baser la « prospérité » sur les rentrées en négligeant les sorties, est illusoire. Tous les conseillers en placements vous le confirmeront : certains, que leurs revenus classent parmi les pauvres, disposent de capitaux parfois considérables.


samedi 6 février 2021

Fantaisies anti-racistes

 La première fois que j’entendis l’expression Afro-Américains (en fait Afro-Americans, puisque nous devisions en anglais), C’était en 1990. Il sortait de la bouche d’une jeune collègue de l’école londonienne où, sans grand succès, j’étais employé pour tenter de faire acquérir des rudiments de français à un public aussi avide de culture qu’une grenouille peut l’être de bains de soleil. Elle me parlait de « Littérature Afro-Américaine » et à ma courte honte, je dus lui avouer ma totale ignorance de ces écrivains que je pensais être de braves Africains pratiquant leur écriture aux USA.


Ne reculant devant aucun sacrifice pour pallier cette grave lacune, elle me promit de m’en fournir une liste d’ouvrages. Le lendemain même, en jeune personne de parole, elle m’apporta un papier sur lequel étaient inscrits des titres que j’avais pour la plupart déjà lus. Je réalisai alors que ces auteurs, j’avais coutume de les appeler « Noirs Américains ». Je ne lui fis pas l’affront de contester le syntagme nominal par elle employé car vu l’intérêt que semblait me porter la jeune personne et l’attirance qu’elle m’inspirait (nous devions par la suite, trois ans durant, partager une liaison puis un concubinage parfois houleux), le temps n’était pas aux chicaneries lexicales.


Il n’empêche que le terme devenu courant aujourd’hui me parut étrange. La grande majorité de la population étasunienne étant originaire d’autres continents, je ne voyais pas pourquoi une de ses composantes serait distinguée des autres par l’adjonction de son continent d’origine à celui de sa nationalité.


La logique de cette appellation eût voulut que l’on fît de même pour les Américains d’origine différente, les Blancs devenant des Euro-Américains, le terme d’Asio-Américain désignant toute personne venue d’Asie qu’elle soit mineure, centrale ou du sud-est, tandis que les Océano-Américains regrouperaient des peuples aussi divers que les originaires des marquises, d’Indonésie ainsi que les Euro-Australiens et autres Euro-Néo-Zélandais quant à celui d'Américo-Américains il regrouperait les amérindiens de nationalité Étasunienne.


Inutile de signaler l’absurdité de tels vocables. Il est clair que le terme Afro-Américain est un euphémisme destiné à éradiquer le mot « Noir » (ou plutôt « Black ») tout en ne désignant qu’une partie des gens originaires d’Afrique, vu qu’il ne saurait s’appliquer aux Égyptiens non-Nubiens ou aux maghrébins. Les soi-disant anti-racistes ne font donc que continuer d’établir une forme de discrimination entre une catégorie d’Américains qui ne le seraient que partiellement et les autres. L’enfer étant pavé de bonnes intentions, il n’y a là rien d’étonnant.


Quittons les USA, pour notre beau pays. Le terme « Noir » pour désigner les mélanodermes, est parfois ressenti comme raciste par certains, faute de forger un Afro-Français ou un Afro-Européen il est devenu plus acceptable d’employer le mot « Black » malgré la mauvaise réputation qu’il s’est acquis aux USA. D’un autre côté, tant qu’à emprunter un terme étranger, l’anglais posait moins de problème que l’espagnol* !


Je finirai par une anecdote à mon sens typique de l’absurdité antiraciste. La jeune personne ci-dessus évoquée et devenue ma compagne m’annonça un jour qu’un collègue lui faisait la cour inondant son casier de courriers enflammés. La curiosité me fit m’enquérir de qui il se pouvait agir. Elle me donna un prénom qui ne me dit rien. Je lui demandai de me le décrire. Sa description ne m’éclaira pas plus. Un jour, elle me le désigna discrètement. J’en fus sidéré : par crainte de stigmatiser, elle avait négligé de me signaler que son fougueux soupirant étant le seul professeur noir de l’école !


* Ne souhaitant pas finir mes jours dans un cul de basse-fosse, je prie les non-hispanisants de m’excuser de ne pas écrire le terme en question.

mercredi 3 février 2021

Énigme résolue.

 

Le sénateur Jules Labiche, millionnaire, républicain de gauche et grand bouffeur de curés

Une chose m’a toujours intriguée : quand on se promène dans les rues du moindre bourg de quelque importance, où que ce soit en France, on est frappé d’y voir un nombre parfois conséquent d’imposantes demeures bourgeoises datant généralement du XIXe siècle. A leur vue, je ne peux m’empêcher de me demander quelle pouvait être l’origine de la fortune qui avait permis à leurs bâtisseurs d’afficher ostensiblement leur richesse.


Sourdeval, où je réside, ne fait pas exception à cette règle. D’une importance variable, on en compte plusieurs. Toutefois, quand on emprunte la route qui mène à Vire, juste à la sortie du bourg, à flanc de colline, s’en dresse une qui, par son volume, sa massive élégance néo-classique, le parc qu’elle domine, ne saurait que mériter l’appellation de château. On peut imaginer que négociants ou petits industriels enrichis aient, sous le second empire, été à l’origine des autres grandes demeures. Mais celle-là, franchement, les surclasse tant que l’on voit mal comment une réussite locale aurait pu être à son origine.


Il se trouva que, regardant les annonces immobilières dur ma commune, histoire d’en voir l’évolution, je m’aperçus qu’une d’entre-elles concernait ledit château. Pour la modique somme de 1 260 000 € (peut-être moins en barguignant un peu) vous pouvez devenir l’heureux propriétaire de ce petit bijou d’environ 750 mètres carrés habitables, dans un parc arboré de 1,6 ha . Les photos de l’annonce (cliquez, ça ne coûte rien), vous rassureront : pas ou peu de frais à envisager  car là tout n’est qu’espace, calme, luxe et volupté. À 1680 € du m², vous aurez du mal à trouver mieux à Paris voire même à Saint-Ouen.


Restait à savoir qui se trouvait à son origine. Quelques recherches me permirent de l’apprendre. En 1860, un certain Jules Labiche le fit construire. Né à Sourdeval en 1826, après des études au petit séminaire de Mortain, ce jeune homme entreprenant partit tenter sa chance dans le Nouveau-Monde. Il faut croire que la tentative fut fructueuse, car à 34 ans, après avoir fait fortune dans le négoce du coton au Mexique et aux États-Unis, il revint vivre parmi les siens le reste de son âge. D’abord élu conseiller, il devint maire puis, après deux candidatures malheureuses à l’assemblée fut élu sénateur en 1879, mandat qu’il gardera jusqu’à sa mort en 1905 le cumulant avec celui de maire et de conseiller général. Le président du Sénat, ex-premier ministre et futur président de la république, Armand Fallières, viendra prononcer une allocution lors de son enterrement. Il faut croire que le séminaire de Mortain avait réchauffé un serpent dans son sein , vu que le brave Jules en plus d’être un ardent républicain s’avéra un virulent anticlérical ! Une vie somme toute bien remplie, qui valut à celui qui se battit pour que sa ville fût desservie par le chemin de fer que la rue menant à son château porte aujourd’hui encore son nom.


Faute d’héritier direct, le château passa à son neveu puis abrita une colonie de vacances avant de devenir la propriété du bureau de bienfaisance de la commune et finalement la propriété privée de diverses familles qui, vu son état actuel ne devaient pas être privées de tout.