Il serait de bon ton d'exprimer une
douleur ravageuse de celles qui font qu'on tique à reprendre du rab
de hachis parmentier ou d'aller faire un tour chez Noz des fois
que...
Jean-Pierre Marielle est mort. On ne
peut pas dire qu'il ait été fauché en pleine jeunesse ou victime
de la mort subite du nourrisson. Il faut bien se rendre à
l'évidence, à quatre-vingt sept ans décéder devient une des rares
expériences qu'un humain puisse découvrir. C'est toujours triste,
bien entendu, mais force est de reconnaître qu'avec le grand âge,
face à une disparition, l'effet de surprise comme le sentiment
d'injustice s'émoussent.
L'important, c'est ce qui reste et
restera peut-être de lui. Je dis peut-être parce que si
l'évolution de la société continuait à suivre le cours mortifère
que certains veulent et souvent parviennent à lui imprimer, il ne
restera plus de place pour beaucoup de ses films. Pour moi, sa
truculence de grand baratineur, son élégance, sa capacité à
prononcer sur un ton décalé des propos farfelus, sa capacité à
incarner avec distinction des beaufs plus beaufs que les beaufs, et
bien d'autres choses encore en faisait un GRAND parmi les grands. En
tête de mon hit-parade : Les Galettes de Pont-Aven,
L'Entourloupe, Calmos et j'en oublie.
Le premier de ces films cités je l'ai
vu, revu et le reverrai avec un plaisir ineffable. Parmi les
multiples raisons de cet engouement, deux scènes dominent. Celle où,
soûl comme un cochon, il se lance dans une auto-parodie de son
ex-métier de représentant en parapluies et celle où il interprète
avec la délicieuse Jeanne Goupil l'inoubliable Kénavo de
Théodore Botrel. Inoubliable au moins pour moi car il figurait en
bonne place dans le répertoire de mes parents qui le chantaient en
duo dès qu'un baptême, une communion, des fiançailles ou un
mariage leur en fournissaient l'occasion (voir ici).
De M. Marielle je garderai le souvenir
de grands moments de gaîté, moments qui pour moi sont les plus
importants d'une vie.