Qu'y a-t-il de plus haïssable que la
préférence nationale (que pratiquent cependant de nombreux pays) ?
Pourtant, il est un domaine où celle-ci s'exerce éhontément :
celui des victimes du terrorisme. Cent-trente victimes en France et
le pays en est tout bouleversifié. On revoit la constitution,
l'ensemble des Français en a les larmes aux yeux (les ventes de
mouchoirs en papier ont explosé comme celles de bougies, de fleurs,
de blocs-notes de crayons de couleurs et de stylos (pour les messages
et les dessins)).
Pendant ce temps, en Syrie, en Irak, au
Nigeria, en Égypte et ailleurs, on étripe, on viole, on massacre à
tour de bras et tout ce que ça mérite c'est au mieux une rapide
mention dans les media. Ce qui laisse à penser que les vies
françaises ont une valeur supérieure à celles d'autres régions.
Et qu'on ne me parle pas d'éloignement et de proximité. Une
fusillade en Californie, état qui est plus éloigné de nous que le
Proche-Orient, a également droit à une couverture médiatique
conséquente et provoque chez nos élites, faute de réel chagrin, consternation et
questionnements.
Où voulez-vous en venir, cynique
tourterellophobe ? A rien, sinon qu'il faudrait peut-être
raison garder, ne donner aux événements hexagonaux (et occidentaux)
que la place qu'ils méritent et qu'au lieu de verser des torrents de
larmes (plus ou moins crocodilesques) tout en s'accusant d'être par
nos péchés passés et présents à leur origine il vaudrait mieux
tenter, de manière froide et déterminée, de prendre des mesures
propres à enrayer leur propagation. Ceci sans que vienne s'y opposer
d'a priori si « généreux » et « nobles »
soient-ils.
Mais dans des pays où l'opinion
préfère l'émotion à la raison, où les pleurs sont plus prisés
que l'action déterminée, les marchands de bougies ont de beaux
jours devant eux.