..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

mardi 17 décembre 2013

Banques, ministères, etc. (2)



Un siège de grande banque, c’est trois parties bien distinctes : un hall, l’étage de la direction et les salles de marchés. Le hall se doit d’être monumental et impressionnant. C’est le premier contact qu’a le visiteur important avec l’établissement (et même celui sans importance dont on se fout totalement mais on ne peut pas toujours faire une entrée spéciale loquedus) : il faut donc qu’il en impose et lui laisse une impression de puissance, de richesse, de beauté, d’élégance.  L’étage de la direction, c’est pareil : calme, luxe et volupté. En revanche, les salles de marchés sont des open spaces où l’on s’étonne toujours de ne pas voir, en leur centre, grimpé sur un podium, un homme muni d’un fouet chargé de stimuler l’enthousiasme des galériens de la finance collés comme berniques à leurs écrans. Ne nous méprenons pas : cette chiourme n’est pas misérable : elle est bien et, suivant son poste, parfois même très bien payée. Mais elle évolue dans un espace déshumanisé et oppressant.

Le formateur en Langues Étrangères pénètre donc, attaché-case à la main dans le hall, et sauf lors de sa première visite,  ne s’émerveille pas plus que ça de ses dimensions pharaoniques ni des cascades artificielles et de la profusion d’immenses plantes vertes et d’éléments de décoration divers qui font sa majesté. Il se rend au bureau de la réception et annonce à l’appariteur son rendez-vous avec Mr.  X.  Plus Mr X ; est important, plus l’employé se montre déférent. Du moins la première fois. Une fois qu’il vous aura identifié comme un médiocre, son respect  baissera d’un cran, vous plaçant entre le garçon de courses et le visiteur de marque. Après vous avoir fait décliner votre nom et celui de votre société, il demande à un collègue de vous accompagner jusqu’au salon d’attente tandis que l’on prévient Mr X de l’arrivée de son rendez-vous. Le salon est cossu. Après quelques minutes, selon l’importance de X, il descendra lui-même vous chercher ou chargera un appariteur de vous accompagner.

A la L*****  Bros & Co Ltd., banque d’affaires Franco-Américaine mondialement réputée (New-York, Paris et Londres), je donnais des cours à un associé-gérant. C’est donc un appariteur qui venait me chercher, appelait pour moi l’ascenseur, m’en ouvrait obligeamment la porte, et à l’aide de sa clé magique nous faisait monter à l’étage-qui-n’existe-pas.  Car, et ça se comprend aisément, ces messieurs de la direction ne souhaitant pas être dérangés par quelque employé ou visiteur distrait, occupaient un étage qu’aucun bouton ne signalait et au niveau duquel ne pouvaient accéder que les possesseurs de la clé magique. M’ouvrant avec déférence (surtout la première fois) les nombreuses portes du couloir, mon ange gardien me menait soit au bureau de monsieur X soit dans une salle de réunion. Endroits toujours coquets aux murs lambrissés d’acajou ou autres bois précieux et ornés de tableaux que je soupçonnais fort d’être originaux. Mr X arrivait, tout rayonnant de fausse bonhommie, s’enquerrait de la santé de son cher Jacques et la séance pouvait commencer.  Ce cher X, cultivait avec un rare bonheur l’art d’être désagréable.  C’était un Indien. Il semblait qu’il mît un point d’honneur à bien faire sentir sa supériorité au gens de moindre étoffe qu’il rencontrait. C’était un jeu subtil, cependant : toujours poli, il s’arrangeait, par exemple,  pour amener dans la conversation le club prestigieux dont il était membre puis pour vous demander si vous-même en fréquentiez un similaire. Ou bien évoquant la récente acquisition de quelque voiture de luxe, il vous demandait ce que vous pensiez du modèle… J’avais envie de lui dire que ce n’était pas avec le maigre salaire que je me faisais à écouter ses âneries que j’aurais pu me permettre de telles fantaisies mais je me contentais d’être mal à l’aise.

Nos conversations (émaillées de précisions grammaticales) ayant lieu durant sa pause déjeuner, il arrivait qu’en proie à une petite faim, il me conviât à partager un en-cas que nous apportait prestement un appariteur. Saumon fumé, viandes froides, salades et autres pâtisseries qu'on nous servait étaient d’excellente qualité, un vin fin les accompagnait. Du coup, j’hésitais, même si mon estomac le réclamait à m’offrir un sandwich avant la séance… 

Plus le temps passait, plus l’animosité qu’il m’inspirait allait grandissante. Parallèlement, il semblait me trouver de plus en  plus sympathique et me complimentait sur mes connaissances et mon professionnalisme… J’aurais juré qu’il le faisait exprès pour me donner  mauvaise conscience…

lundi 16 décembre 2013

Banques, ministères, etc. (1)



Être formateur en Français-Langue-Étrangère, si ça ne rapporte pas grand-chose présente au moins l’avantage de faire découvrir des milieux et des endroits  que l’on aurait sinon ignorés. Rencontrer des gens de toutes sortes est un des attraits de la vie. 

Un an durant, j’occupai cette fonction à Londres. Ça avait plutôt bien commencé. Ayant envoyé mon C.V. à divers instituts ou écoles je fus souvent convié à des entretiens qui ne menèrent à rien. Et puis un jour je rencontrai  M. Tous Langages, un Français,  qui sembla on ne peut plus intéressé par  ma candidature. Quand étais-je prêt à commencer ? Les conditions me convenaient elles ? Bref on était dans le concret. En tant que chômeur non indemnisé, j’avais hâte de cesser de vivre aux crochets de ma compagne : tout me convint donc à merveille et ma disponibilité fut totale.  Il me fut demandé si entre autres missions, j’accepterais de donner des cours d’initiation au français, en août, à de jeunes enfants d’une banlieue huppée. Tu parles que j’accepterais ! Prêt-à-tout était mon deuxième prénom ! Je préparai donc un cours en ce sens. Ça se passa super-bien. Parents, enfants, M. Tous Langages et son associé furent ravis et impressionnés par les merveilleux résultats obtenus en si peu de temps. M. T.L. en personne me convoqua pour un entretien.

J’en sortis abasourdi. Malgré mes immenses mérites si souvent reconnus (humour !) je crois n’avoir jamais reçu autant de compliments  et, qui mieux est, m’être vu ouvrir de perspectives aussi alléchantes. M. T.L. débordait d’enthousiasme à mon endroit. Il me fit miroiter des voyages à Paris en compagnie d’hommes d’affaires ou de politiciens importants à qui je servirais d’interprète à raison de plusieurs centaines de livres la journée, des missions de traduction grassement payées. Un brin mélancolique, il se déclara plus tout jeune, il fallait penser à l’avenir… Bientôt viendrait le temps où la fatigue des ans (- Allons, M. T.L ., vous êtes frais comme l’œil !) nécessiterait qu’il ait à ses côtés quelqu’un sur qui se reposer (en tout bien tout honneur, va sans dire, car le bougre en était un !). En fin d’entretien, il me demanda si je serais également  intéressé par m’occuper de cours aux enfants sur une base pérenne. Il ne me demandait pas une réponse immédiate, simplement d’y réfléchir. Je le quittai un peu étonné qu’il ne m’ait pas demandé huit jours de délai pour débarrasser son bureau des affaires personnelles dont il l’encombrait afin que je m’y installasse. Un oubli, probablement…

Je réfléchis donc à sa proposition et arrivai à la conclusion que je n’avais pas quitté le noble métier de professeur pour recommencer à me coltiner des morpions. Quelque temps plus tard, je lui signifiai ma préférence pour l’interprétariat, la traduction et les cours aux adultes. C’était la MAUVAISE réponse.  Du coup, il ne fut plus question de voyages, de traductions et encore moins de sous-direction.  On ne me confia plus que quelques heures de cours de ci-de là et mon salaire se fit bien maigre…

N’empêche ça me permit de découvrir de nouveaux univers comme la banque et les ministères…

dimanche 15 décembre 2013

Inversion des valeurs !



Dans un temps où tout change, où ce qu’on avait, au fil des siècles, établi comme des valeurs se voit ravalé au rang de fautes, il nous semble anormal que les lexies figées (ou expressions populaires) continuent de véhiculer des stéréotypes dépassés reflétant les a priori d’une civilisation moribonde dont la prochaine disparition réjouira les meilleurs d’entre nous.  Il est donc grand temps de faire subir au vocabulaire un salutaire aggiornamento.  

C’est animé par ce souci de modernité que je soumets à votre examen ces quelques expressions modifiées. N’hésitez pas à nous faire part de vos suggestions.
Rigolo comme un pape
Une jeune baderne
Une rombière d’âge moyen
Triste comme un pinson
Riche comme Job
Pauvre comme Crésus
Waterloo riante montagne
Une rébarbative soubrette
Un vieux cadre apathique
Brun comme les blés
Lent comme l’éclair
Dissimulateur comme l’or
Émacié comme une loche
Gras comme un coucou
Suave comme chicotin
Une oisiveté de romain
Être malade comme un charme
Inconnu comme le loup blanc
Noir comme un cierge
Sobre comme un cochon
Modeste comme Artaban
Lourd comme un oiseau
Faible comme un turc
Fragile comme le Pont-Neuf
Malin comme la lune
Populaire comme Hollande

samedi 14 décembre 2013

Le Père Noël est une ordure (blanche).



Je lis un article où une brave Noire Américaine (ou Afro-Américaine) s’insurge contre la blanchitude du Père Noël et propose qu’on le remplace par un pingouin. Pourquoi un pingouin ? Eh bien nous dit l’auteur de ce bel article parce que tout le monde aime les pingouins( ??!!) et que l’animal vivant dans des régions froides, il pourrait continuer de porter bottes et fourrures et se déplacer grâce aux rennes.

Excellente idée, non ? Ainsi cesserait l’humiliation que connaissent les enfants de couleur lorsqu’ils reçoivent leurs cadeaux d’un  vieux blanc.

Mouais. Raisonnement impeccable. Sauf que… Le Père Noël s’inscrit dans une tradition scandinave. Je ne vais pas vous résumer l’article de Wikipedia, si ça vous intéresse, c’est . Créature mythique d’une culture blanche, on ne voit vraiment pas pourquoi il serait jaune, vert ou bleu. Libre à qui veut de l’adopter  ou de le refuser mais en faire un pingouin me paraît stupide.  Ne serait-ce que pour des raisons étymologiques car selon certains le nom de cet  animal adoré  de tous ( ??!!) viendrait du gallois pen gwyn  qui signifie « tête blanche »  (le grand pingouin, espèce hélas disparue, avait des taches blanches près de l’œil).

L’idée d’attribuer l’origine des cadeaux à un être merveilleux est née en Europe. Si elle n’a pas surgi ailleurs, qu’y pouvons-nous ? D’ailleurs, il ne faisait pas forcément l’unanimité : de ma lointaine enfance me revient le souvenir de l’abbé Volpatto tonnant en chaire contre des chrétiens qui remplaçaient le petit Jésus, véritable dispensateur des cadeaux,  par un vieux bonhomme minable. Si « notre » Père Noël ne convient pas à certains, qu’ils trouvent autre chose…

Et puis, tout ramener à la couleur de peau est ridicule. Moi qui aime tant à citer Lao-Tseu* me plains-je de ce qu’il ait été jaune ? Demandé-je qu’on en fasse un ouistiti afin de n’en pas être traumatisé ? Devrais-je exiger que le plus grand homme de tous les temps, M. Mandela, soit leucoderme  afin de respecter ma susceptibilité ?

Ce n’est pas en se montrant obsédé par le racisme qu’on en viendra à bout. Ce n’est pas en contraignant un groupe « racial » à renier son passé ou à n’en retenir que les pages obscures que l’on résoudra quoi que ce soit. Plus qu’en pleurant sur un passé révolu ou sur un présent modérément apprécié, je crois que c’est en produisant des œuvres admirables tendant à l’universel que les « discriminés » cesseront de l’être.
 

vendredi 13 décembre 2013

Pas évident le vivre ensemble !



Que les oiseaux soient des cons, n’est pas un scoop. Le malheureux Chaval l’avait signalé dans un court mais éloquent film il y aura bientôt cinquante ans.  Hélas, le bon dessinateur s’était cantonné aux généralités. Dénoncer la connerie universelle des volatiles est certes nécessaire mais est-ce suffisant ?

Je crois venu le temps de signaler un aspect particulièrement déplorable de la connerie aviaire. Rappelons certains faits. Pour une raison qui m’échappe j’ai depuis des années pris l’habitude d’offrir à ces tristes cons, les frimas venus, des graines à profusion. A ceux qui mettraient en doute ma bonté, je répondrai par cette photo, prise en janvier de cette année, où l'on voit une mésange et pinson s’empiffrer à mes dépends.



Croyez-vous qu’ils m’en sont reconnaissants ? Que quand j’apparais, ils se ruent vers moi pour me remercier de ma munificence ? Eh bien non : si j’ouvre ma porte, si simplement je m’en approche, ils fuient à tire d’aile ! Comme si j’étais un vulgaire chat ! Ce qui prouve qu’à au moins deux niveau l’oiseau manque de jugement. Me confondre avec un chat révèle de piètres dons de physionomiste. Il n’est jamais venu à l’idée, du moins jusqu’ici, même aux gens les plus stupides, de m’offrir une soucoupe de lait, des croquettes ou de me gratter amicalement l’arrière du crâne afin de se concilier mes bonnes grâces. D'autre part, confondre bienfaiteur et prédateur relève d’une confusion mentale qu’on ne rencontre guère que chez l’électeur de gauche. L’oiseau est donc irréfutablement con.

Mais venons-en au fait. Le vivre ensemble est une des aspirations éternelles des âmes élevées. Plus on est divers, mieux on s’entend. L’histoire n’a cessé de le prouver. Eh bien, l’oiseau, ce con, n’en est pas partisan. C’est  un triste mais inévitable constat.

Depuis le début de la nouvelle campagne des restos, il semblait que les moineaux avaient monopolisé l’établissement. Peu à peu, toutefois, d’autres espèces firent leur apparition : mésanges, pinsons, tourterelles et verdiers vinrent s'y restaurer. Seulement, il y a un hic. Le moindre mouvement suspect provoquant un sauve-qui-peut général, les moineaux se replient vers ce camélia :





Toutes les autres espèces se réfugient sur ce cerisier-fleur (dont la calvitie ne s’est toujours pas arrangée) où ils se querellent avec hargne.



Comment ne pas interpréter ce comportement comme une forme de ghettoïsation voire d’apartheid ?  Une minorité (les moineaux)  s’approprie l’arbre le plus proche et le plus feuillu (soit les beaux quartiers)  et relègue  tous ceux qui ne leur ressemblent pas dans une périphérie déshéritée où ces malheureux s’entre-déchirent. N’est-ce pas désespérant ?  Quand un Madiba emplumé viendra-t-il mettre fin à ce scandale ? Je ne voudrais pas paraître pessimiste, mais ma réponse est : jamais ! Ils sont trop cons pour qu’émerge un jour une aviarité arc-en-ciel vivant en parfaite harmonie !