..Toi qui entres ici, abandonne tout espoir de trouver un contenu sérieux. Ici, on dérise, on batifole, on plaisante, on ricane.

dimanche 10 novembre 2013

Langage populaire



L’autre jour après avoir mis  sur le compte d’un apéritif de la veille un peu copieux le manque d’énergie que révélait ma voix, ma fille me conseilla de prendre un verre pour arranger ça. Je lui répondis qu’en effet, pour reprendre du poil de la bête…  

 Pour moi, cette expression qui veut couramment dire « aller mieux après avoir été malade » a été contaminée par son équivalent anglais « To have a hair of the dog that bit you », qui signifie littéralement « prendre un poil du chien qui vous a mordu » et dont le sens courant est « prendre un verre de ce qu’on a trop bu la veille (afin d’en palier les effets) ». C’est alors que ma fille utilisa une expression appropriée que je ne connaissais pas « Un p’tit coup pour r’mett’ le facteur sul’vélo ». J’en fus ravi !  Les facteurs ne vont plus à vélo, ils ne s’arrêtent plus tous les trois quatre maison pour se désaltérer mais filent au volant de leur voiture et leurs haltes chez les vieilles personnes isolées sont devenues un service facturé par la poste.

L’ « alcoolisme mondain » du facteur rural appartient donc au passé.  Le préposé actuel devra donc trouver un autre prétexte que la cirrhose pour quitter cette vallée de larmes. Mais je crains qu’il ne soit pas le seul à évoluer vers une vie plus aseptisée et qu’une autre victime de la vie moderne ne soit le langage populaire.  Si le bon Malherbe, lorsqu’il conseillait d’écrire une poésie compréhensible par les crocheteurs du port au Foin, n’allait pas jusqu’à dire qu’il fallait employer leur langage, plus tard d’autres ont emprunté au langage populaire des expressions colorées et vigoureuses. Car le peuple avait une langue vivace et riche.

Je me souviendrai toujours de ma logeuse, la bonne Mme Plateau, ancienne fermière dans le Perche, me disant alors que je lui parlais, voilà plus de quarante ans,  de je ne sais plus quel politicien : « Ah, ça, on peut dire qu’il parle mieux qu’un lièvre » et terminant  par cette réserve : « mais il court pas si vite ! ». De tels petits bijoux rencontrés autant à la campagne qu’en ville, je fais la collection et la trouvaille d’un nouveau me réjouit profondément.

Étant né et ayant grandi en banlieue parisienne, ma récolte fut d’emblée fructueuse. Le « titi » gouailleur  était alors espèce commune. Existe-t-il encore ? Quand on voit ce qu’est devenue la population banlieusarde, quand on l’entend s’exprimer  on est en droit de s’interroger sur sa survie et sur la richesse du langage faubourien…

Faudra-t-il, dans ce domaine encore,  parler de la France d’avant ?

samedi 9 novembre 2013

T’en va pas, François, t’en va pas !



« O felix culpa quae talem et tantum meruit habere redemptorem »
Et si l’élection de François hollande s’avérait l’heureuse faute qui nous valait la rédemption ? Si son mandat calamiteux était l’occasion de voir les cerveaux français lavés des idées mortifères  dont la bienpensance les a pollués depuis des lustres ? Et si, ainsi régénérés, nos concitoyens finissaient par réaliser que la meilleure façon de marcher n’est pas sur la tête ?

J’entends ici et là des « Hollande démission ! » A part nous changer un peu des « Sarkozy démission ! » de naguère qui nous ont conduits aux déconvenues actuelles quel est l’intérêt de ce slogan ? Et surtout à quoi servirait-il qu’il soit suivi d’effets ?

Admettons que, à l’écoute des Français comme il se déclare, le brave François entende dès demain ces clameurs, quitte son poste et abandonne la politique au profit du macramé et de la pâte à modeler. Que ce passerait-il ? De nouvelles élections opposant M. ou Mme Trucmuche à Mme ou M. Machin. Un de ces deux personnages sera forcément élu, non pas en fonction d’un programme susceptible de redresser la France mais en fonction du niveau de rejet de son adversaire. Car qu’on le veuille ou non, en dehors peut-être de M. Valls, aucun candidat potentiel ne dispose d’une popularité suffisante pour éviter d’être à son tour rejeté à la moindre alerte économique, sociale ou sociétale.

A part jeter le pays dans davantage de chaos, ce départ ne servirait à rien.

Au contraire, laissons le temps à M. Hollande et à son équipe de finir de discréditer le socialisme, qu’il soit de gauche ou de droite. Laissons le temps à ses idéologues de mettre en œuvre leurs idées stupides jusqu’à ce qu’elles inspirent aux Français un salutaire dégoût.  Laissons le temps aux peu de sectaires qui continuent de le soutenir de montrer, leur rage montant, le vrai visage de leur intolérance. Nous n’avons qu’à y gagner !

Imaginons que M. Valls soit bientôt nommé premier ministre : ça lui permettrait  de  se discréditer et de perdre la confiance qu’on lui accorde à tort. Admettons que la réforme judiciaire de Mme Taubira porte ses fruits et entraîne une explosion des récidives : ça permettra aux braves gens  de mieux chasser de leurs esprits les tentations bisounoursiques.  Nous n’avons qu’à y gagner sur le moyen (voire le long) terme…

Et puis SURTOUT nous pourrions mettre à profit le temps ainsi imparti pour faire s’enraciner des opinions de simple bon sens. Surtout que, faute d’un HOMME ou d’une FEMME D’ÉTAT (pas du genre de celle de Michel Desgranges) capable d’incarner les valeurs de la droite et d’entraîner l’adhésion aucun changement réel ne serait possible. Or cet homme (ou cette femme) où est-i(ou elle) ? Vous le (ou la) voyez, vous ?  Ces personnes n’émergent qu’aux moments de grande tourmente. Ils existent bien avant mais les circonstances ne permettent pas qu’ils donnent leur mesure. 

Il se peut donc, pour reprendre les termes de Saint Augustin qu’une faute ait pour conséquence  la  rédemption. Laquelle ne saurait être l’œuvre d’un homme mais de tous. Ah oui ? Et si personne n’émerge ? Et si les idées mortifères continuent de régner ? Eh bien rien de nouveau sous le soleil : nous continuerons de gentiment sombrer. Avec ou sans Hollande.

vendredi 8 novembre 2013

Au bonheur des ogres



Je viens de terminer ce livre de M. Daniel Pennac.  Je l’avais bien entendu lu il y a longtemps, mais mon amnésie sélective ne m’en avait laissé aucun souvenir si ce n’est que son personnage principal se nommait Malaussène. Ce qui, reconnaissons-le, laisse beaucoup de place à la (re) découverte.

C’est donc une œil neuf que je posai sur ce roman. Daniel Pennac bénéficiait cependant auprès de moi d’un a priori favorable suite à son plaidoyer en faveur de la lecture à haute voix et à sa Charte des droits imprescriptibles du lecteur qu’il exposa dans son essai Comme un roman.  Depuis le temps ancien où le bon M. Régnault, médiocre pédagogue mais excellent lecteur,  terminait chaque trimestre par deux ou trois semaines de lectures enthousiastes de pièces de Berthold Brecht (eh, oui, j’aimais bien…), j’ai toujours apprécié cet exercice dont je fis bénéficier plus tard mes élèves, pour leur plus grand plaisir comme il me fut souvent rapporté.

La lecture fut agréable. Le seul reproche que je ferais à son style léger et fluide que rehausse un humour de bon aloi serait un usage un peu exagéré de la parenthèse ( Et toi, tu n’en abuses pas, pomme à l’eau ?). Sinon, M. Malaussène, jeune homme chargé par une mère fugueuse d’une fratrie nombreuse et originale, est employé comme souffre-douleur dans un grand magasin. Curieuse fonction vous direz vous ! Voici en quoi elle consiste : sous le titre ronflant de Responsable du service  du Contrôle Technique, il est convoqué au bureau des réclamations chaque fois qu’un client vient se plaindre d’un article défectueux. S’ensuit, en présence du plaignant, une engueulade en bonne et due forme où lui est reprochée sa totale incompétence. N’osant mot dire, il se voit traité de manière injurieuse, traîné dans la boue, humilié. Au point que le client vient à son secours, retire sa plainte et blâme le responsable des réclamations. Ceci permet de régler les contentieux de manière amiable et peu onéreuse.  Seulement, ça ne fait pas une histoire…

Il se passe de bien curieuses choses dans ce magasin : une première bombe y explose, faisant une victime. La seconde, plus efficace en fera deux. La troisième placée dans un photomaton reviendra à l’unité. Curieusement, Malaussène se trouve à chaque fois dans le voisinage immédiat de l’explosion. Témoin privilégié, il devient bien vite suspect…

Je ne vous dirai rien de plus quant à l’intrigue. Si je vous ai mis l’eau à la bouche, allez en découvrir le dénouement.

Je préviendrai simplement ceux de mes lecteurs qui auraient une légère tendance à être un peu réac (si, si, il y en a, je le sais…) et que cela pourrait déranger que M. Pennac appartient au camp du bien. Ainsi, notre héros vit dans un Belleville dont il apprécie grandement la bigarrure ethnique et ses méchants sont comme il se doit des gens d’extrême droite tendance nazie (pourrait-il en aller autrement d’infâmes criminels ?). Mais si on ne se polarise pas sur le message subliminal, si appuyé soit-il, on passe un  très agréable moment de lecture grâce à ce roman. Et puis, personne n’est parfait…

jeudi 7 novembre 2013

Des reporters dénonciateurs et de leurs limites


Les journalistes sont des gens merveilleux, toujours prêts à payer de leur personne pour chercher l’info. Ainsi, l’autre jour, rentrant de Vire je tombai sur l’émission de l’inénarrable Daniel Mermet. Le sujet en était Amazon. Curieusement, ce n’était pas pour en vanter les mérites. Non, l’émission était plutôt critique. Au péril de sa vie, un journaliste du Monde diplomatique s’était fait embaucher incognito comme préparateur de commandes dans un entrepôt de ladite entreprise de vente par Internet. Et qu’y découvrit-il ? Rien moins que l’enfer,  en pire ! Figurez-vous que non seulement la productivité des employés y est mesurée, mais qu’il faut que chaque employé améliore la sienne quotidiennement !  Ce qui n’a pas pour conséquence logique de réduire en permanence les effectifs (logiquement jusqu’à leur quasi-disparition) mais le départ des employés fourbus, usés, au bord de la tombe. Sans compter qu’on n’offre à ces malheureux  que des CDD en  leur faisait miroiter un éventuel CDI qui ne vient jamais ou, dans le cas rarissime où on l’obtient,  qui vous mène fourbu, usé, au bord de la tombe à démissionner au bout de quelques années. De plus les esclaves se doivent d’avoir la mentalité maison. Curieusement, l’état d’esprit CGT,  tant prisé partout ailleurs, n’y est pas recherché…

M. Amazon a donc une politique de l’emploi bien claire : il s’agit d’obtenir un turn-over maximum afin de n’avoir que des employés débutants à faible productivité. On est en droit de supposer que s’il crée des emplois c’est, comme tous les patrons, pour avoir, à terme, le plaisir de les foutre leurs titulaires à la porte (notons au passage que, bizarrement, les employés licenciés pour amuser le patron sont rarement ravis d’une décision qui les libère de l’enfer qu’ils dénonçaient naguère à grands cris).

Cette mode chez les journalistes de gauche d’aller se faire  embaucher incognito (vu qu’ils sont totalement inconnus, ça ne doit pas être trop difficile) n’est pas sans arrière-pensées : il s’agit de dénoncer les méchants capitalistes qui profitent de manière éhontée des circonstances, quelles qu’elles soient. Ces mêmes personnes qui sont pour qu’on accepte sans limites l’arrivée d’immigrés quand le chômage fait rage trouvent curieux que ces-salauds-de-patrons profitent du triste état du marché de l’emploi  pour se montrer plus exigeants vis-à-vis d’une main d’œuvre précarisée. Bonjour la logique !  Ils dévoilent à nos yeux incrédules la pénibilité du travail des gens non-qualifiés (voire de ceux dont la qualification ne mène à aucun emploi, du moins à l’intérieur du système solaire). Nous qui pensions que le travail en usine, en entrepôt ou le ménage sur les ferries était une partie de plaisir !  Comment pas la moindre coupette de champagne à l’heure de l’embauche ? Aucune limousine qui viendrait vous chercher le matin et vous ramènerait à votre vaste duplex du VIe  après une courte journée d’un travail si valorisant que, s’il n’était pas grassement payé, vous l’effectueriez pour le plaisir ?

Nos « espions » ne poussent cependant pas la témérité jusqu’à aller « enquêter » partout.  Je leur suggérerais d’aller faire quelques semaines de remplacements dans des collèges de « zone sensible », dans le 9-3, par exemple ; se faire recruter ne devrait pas être trop difficile. Ils pourraient expérimenter ce qu’est la vie d’un MA, comme il est bien rémunéré, comme il ignore la précarité, comme assurer une mission de service public auprès de charmants bambins avides de culture est gratifiant et stimulant…

Une autre suggestion : se faire embaucher chez Mermet. Si on en croit cet article, en matière de sous-paiement, d’heures supplémentaires effectuées à titre gracieux, d’humiliation et de harcèlement moral, ce brave gaucho n’a rien à envier aux négriers capitalistes qu’il dénonce à longueur d’émissions. Hélas, il y a peu de chances pour qu’il fasse écho à un article critique dédié à ses pratiques managériales. De plus, dans le cerveau de quel pigiste sourdrait l’idée de critiquer la précarité de son propre statut ? Quand on participe de manière éminente aux combats du camp du bien, on le fait sans états d’âme ni rancœurs. Ces petits journaleux devraient se voir décerné la médaille du Cocu de Combat (avec palmes).

mercredi 6 novembre 2013

Être Français



Le débat sur l’identité française (que je n’ai absolument pas suivi) aurait donné lieu à toutes sortes de dérapages aptes à déclencher la colère et l’indignation de nos amis de gauche qui ont pour ces deux activités un irrésistible penchant. Son principal mérite aura donc été de fournir à ces braves gens une occasion de pratiquer leurs hobbies.

Est-il vraiment nécessaire de définir l’identité française, à savoir d’établir une liste de ses constituants principaux ? Je pense que non. Ne serait-ce que parce qu’obtenir un consensus en la matière est absolument impossible quand pour certain ce qui prime ce sont les fameux droits de l’homme,  tandis que pour d’autres c’est la Culture (toujours avec un grand C) ou que pour d’autres encore c’est une gloire militaire passée ou toutes sortes de critères parfois totalement antagonistes.

Certains diront que c’est le hasard qui les a fait naître Français. Un peu comme s’ils étaient une âme qui aurait pu s’incarner ici ou là au gré des caprices d’un destin aveugle ou simplement espiègle. En ce qui me concerne, je dois ma nationalité à un enchaînement de causes logiques : des parents, Français tous deux et eux-mêmes de parents Français m’ont engendré et ma naissance s’est produite en France. Que ce soit par droit du sol ou droit du sang cette nationalité s’imposait donc. Il eût été curieux que, vues ces circonstances, je me sois retrouvé Ivoirien ou Guatémaltèque.

Maintenant, qu’est-ce qui me fait Français ? Je pourrais comme nombre d’andouilles de mes concitoyens me déclarer avant tout « citoyen du monde ». Comme si une telle citoyenneté existait ailleurs que dans des discours fumeux ! Mes parents, afin de parachever mon enracinement m’ont transmis non pas leur Breton natal mais la langue communément usitée en terre de France, à savoir le Français. Comme si ce n’était pas suffisant, je suivis les cours d’écoles, de lycées et de facultés où cette même langue était pratiquée. Autour de moi, la société était organisée selon des institutions françaises. Tout cela eut finalement pour effet de faire de moi un Français. C'est-à-dire quelqu’un qui se sent chez lui en France. Qui ne saurait, sauf si les circonstances l’y obligeaient, vivre durablement  et heureux en aucun autre pays. J’ai vécu plus de six années de ma vie adulte à l’étranger. Je n’ai jamais cessé de m’y sentir Français et n’ai jamais envisagé de m’y établir pour de bon.

Né Français, élevé et formé en France et en français, je me sens Français et ne vois pas comment ni par quel miracle je pourrais me sentir autre. Il se trouve que l’histoire et la géographie me font également Européen mais  l’appartenance à un continent est bien plus abstraite que celle qui nous lie à une nation composée de gens partageant  une même langue,  les mêmes institutions et plus ou moins le même mode de vie.

Ainsi, ce qui fait le Français à mes yeux est le sentiment d’appartenance à la communauté nationale française, rien de plus. Ceux qui n’ont pas ce sentiment sont soit des imbéciles de souche, soit des Français de papiers. Cela n’implique ni une adhésion inconditionnelle à tout ce qui est français, ni un sentiment de supériorité par rapport à qui n’aurait pas cette « chance ». C’est comme dans une famille : on ne considère pas nécessairement que parents, enfants, frères, sœurs, cousins et arrière-cousins  y sont tous dotés de qualités merveilleuses mais on en fait partie, à des niveaux variables selon le degré des proximité, par les liens naturels qui nous unissent à eux et que renforce une histoire commune.