mardi 30 avril 2013

Graves questions



Deux faits m’ont récemment plongé dans des abîmes de réflexion : L’affaire du « mur des cons » du Syndicat de la Magistrature et la lecture dans un billet de blog de cette phrase perturbante : « Il y a une dose d'intelligence à ne pas dépasser. » L’auteur de cette dernière phrase expliquait ainsi le refus de l’émission C dans l’air de passer ses SMS.

Certains esprits chagrins ont déploré dans la fameuse affaire du mur le biais politique que pouvait laisser supposer cette « blague potache » comme il est de bon ton de la nommer à gauche. Admettons, comme je l’ai fait que le juge soit bon enfant et de nature rieuse. Il n’en demeure  pas moins que l’affichage de telle ou telle personnalité ou parent de victime sur le dit mur ne peut se justifier que si les gens concernés sont de VRAIS cons. Au cas contraire, plus qu’un biais politique, ma foi tout à fait pardonnable, cela indiquerait de la part des magistrats farceurs un défaut de jugement ce qui, avouons-le, constitue un grave défaut pour qui fait profession de juger.  Ce serait même rédhibitoire.

La phrase sur les excès d’intelligence qui a retenu mon attention est sur la forme tout à fait acceptable et justifie pleinement l’attitude de ceux qui refusent  les SMS en question : infliger au téléspectateur une overdose d’intelligence peut présenter des risques. Le principe de précaution impose donc de l’éviter. Maintenant, on pourrait imaginer que le refus passer ces questions à l’antenne soit dû à tout autre chose : il est possible qu’on ne les ait pas jugées pertinentes voire totalement cons.

Ces deux exemples posent le problème de l’appréciation de l’intelligence et de la connerie.  La question est en effet délicate : elle laisse supposer qu’existent de grandes inégalités en ce domaine, ce qui est en soi scandaleux. Certains seraient très intelligents (et même parfois trop, comme cette blogueuse) et d’autres irrémédiablement cons. Irrémédiablement car l’intelligence ne peut rien pour le con. Elle peut tenir à ce dernier des discours littéralement dégoulinants d’intelligence mais c’est en pure perte vu que le con n’est ni en mesure de les comprendre ni capable d’en apprécier la valeur. C’est pourquoi si intelligent soit on, on est fatalement  le con d’un autre.

Mais nous vivons au XXIe siècle, en France, pays des droits de l’homme.  Ne serait-il pas  temps que ce triste état de fait cesse ?  Ne pourrait-on pas envisager la création d’un organisme officiel chargé d’évaluer scientifiquement le degré de connerie ou d’intelligence des discours et de leurs prémisses ?  L’évaluation des prémisses est en effet primordial dans la mesure où un discours apparemment intelligent, charpenté, argumenté et logique ne peut mener qu’à des conneries s’il se base sur des prémisses stupides.

Le problème de la nomination des membres de cet organisme serait bien évidemment délicat à résoudre. On peut même raisonnablement penser qu’il serait insoluble. En effet, s’ils devaient être nommés sur des critères objectifs de capacité, qui, en dehors d’un comité similaire, serait en mesure de décider qu’ils les remplissent ? Le serpent se mord la queue…

Nous pourrons donc en toute impunité continuer d’affirmer la connerie des autres du haut de notre sublime intelligence et peut-être même en raison inverse de l’une et de l’autre.

lundi 29 avril 2013

Blagounette du soir, espoir !



Lorsque Dieu créa le monde, il décida de concéder deux vertus aux hommes de chaque peuple afin qu'ils prospèrent. Par exemple il rendit les Suisses précis et pacifistes, les Anglais flegmatiques et ironiques, les Japonais travailleurs et réalistes et les Italiens joyeux et humanistes.

Quant aux Français, il dit : les Français seront intelligents, honnêtes et socialistes.

Lorsque le monde fut achevé, l'ange qui avait été chargé de la distribution des vertus demanda à Dieu : Seigneur, tu as dit que tu octroyais deux vertus à chaque peuple, mais les Français en ont trois. Est-ce pour cela qu'ils se placent au-dessus des autres ?

En vérité, je te le dis, chaque peuple a deux vertus y compris les Français, car chacun d'entre eux ne pourra en posséder que deux à la fois. Ce qui veut dire que : si un Français est socialiste et honnête, il ne sera pas intelligent, s’il est socialiste et intelligent, il ne sera pas honnête, s’il est intelligent et honnête, il ne peut pas être socialiste.

Ah ! La République !



Si on écoute ceux qui causent, nous devons tout à la République. Hors d’elle point de salut. On nous bassine tellement avec ses mérites depuis notre plus tendre enfance que ça finit par être une vérité incontestable. Il y a avant elle et depuis. Avant c’était très mal : un système féodal avec à sa tête un roi sanguinaire secondé idéologiquement  par une église corrompue jusqu’à l’os faisait régner l’arbitraire. De honteux privilèges dus à la naissance ôtaient tout espoir d’évolution personnelle. Le peuple était saigné à blanc par un système fiscal injuste et confiscatoire ayant pour seul but de permettre au monarque de guerroyer ici et là sous le moindre prétexte, de se payer de ruineuses maîtresses et d’entretenir autour de lui une foule de parasites constituant sa cour.

Et puis est venue la Grande Révolution qui mena à la République et au bonheur qu’entraînent  fatalement la Liberté, l’Égalité, la Fraternité et les Droits de l’Homme. Il fallut pourtant près de cent ans pour que la république commence à s’installer durablement. Parce qu’un régime aussi merveilleux mécontente forcément les méchants. Mais bon, depuis la fin du XIXe siècle, mise à part la parenthèse vichyste, la République est  là et bien là. Et nous lui devons tout.  On se demande d’ailleurs ce qui se serait passé si nous n’en avions pas bénéficié. Peut-être aurions nous connu des guerres, des castes dominant économiquement et politiquement l’état, des taux d’imposition incroyables ?

Ce qui me pose question c’est qu’il existe sur notre vieux continent des pays qui n’ont pas eu notre chance : Sans compter les confettis, liechtensteinois, monégasque et andorran, il existe tout de même sept autres monarchies en Europe occidentale. Y règne-t-il l’arbitraire, les privilèges, la gabegie,  y guerroie-t-on tant et plus, le peuple y est-il écrasé d’impôts ? Force est de constater que non ou du moins pas plus qu’ailleurs. Certains de nos très républicains dirigeants vont même jusqu’à donner certaines d’entre elles comme des exemples. Au Royaume du Danemark, tout n’est pas pourri : on y pratique la flexisécurité. Quant à la Norvège ou la Suède ce sont des pays que nous devrions rêver d’égaler.

Pour prendre un exemple récent au niveau des mœurs, des huit pays qui nous avaient montré la voie à suivre sur la question du mariage homosexuel six étaient  des monarchies.

Comment expliquer que des pays qui n’ont pas la chance de vivre en république puissent être largement aussi décadents progressistes que nous ? Peut-être parce que les mêmes causes produisant les mêmes effets des pays connaissant des niveaux de développement économique et de délabrement d’évolution culturelle  comparables ont tendance à répondre aux appels des mêmes sirènes.

Où voulez-vous en venir ? Plaideriez-vous pour le rétablissement de la monarchie ? Que nenni, chers lecteurs. J’aimerais simplement que l’on arrête de nous bassiner avec les mérites incomparables d’un régime qui n’est pas meilleur qu’un autre.

Les seuls avantages que je trouverais à une monarchie, c’est que ça nous permettrait l’économie des élections présidentielles et que ça renforcerait les pouvoirs d’un parlement auquel le gouvernement devrait tout. A part ça, je doute que ça empêche le navire de couler voguer.

samedi 27 avril 2013

D’un roman de Daniel Boulanger




Je viens de terminer la lecture du roman de Daniel Boulanger  La mer à cheval.  Ce curieux ouvrage me laisse une impression pour le moins mitigée. Si vous rêvez d’action, de péripéties échevelées, vous serez bien déçu : Charles, un gentleman plus ou moins farmer qui exploite les bois qui entourent son château et élève des faisans constate la fugue de sa femme, Jeanne.   Celle-ci finit par revenir avant de disparaître à nouveau…  Ajoutez à cela un fermier voisin qui rêve de s’approprier les terres de Charles, une vieille domestique qui veille sur lui comme ferait une mère bougonne, la curieuse manie qu’a le châtelain d’attraper des insectes qu’il retient prisonniers sous divers verres, de longues promenades en compagnie d’un Bas-rouge et d’étranges dialogues entre un mari et sa femme retrouvée : pas de quoi inspirer Hollywood !

Le roman n’étant plus disponible que d’occasion, il ne dut pas rencontrer un succès fabuleux. Et ça se comprend. Le problème avec Boulanger c’est la richesse de son style. Richesse qui confine à l’obscur. Prenons une phrase au hasard : « Les arbres sont d’un grand secours à l’âme feuille. » Ouais, je veux bien. Si jamais je me sens l’âme feuille, il faudra que j’aille vérifier auprès des arbres la taille du secours qu’ils procurent.  En fait bien des passages me sont resté hermétiquement clos. Ne l’oublions pas, Boulanger est un poète, et c’est peut-être ce qui gène : un langage poétique est-il bien adapté à une longue œuvre de genre narratif ?  J’ai eu comme une impression d’indigestion, du genre qu’on ressentirait  à manger une portion surabondante de nourriture trop riche.

J’en suis à me demander si le roman est un format qui convient au style précieux de cet auteur. Autant j’ai pris plaisir à lire ses recueils de nouvelles, autant je sors de ce livre avec une sensation de malaise.  Comme si la mince intrigue n’eût été digne que d’un bref récit…

PS : Il semble que mon blog, comme ceux de mes amis ait recouvré aux yeux de M. Facebook sa sûreté première...

vendredi 26 avril 2013

Le juge est bon enfant !



On se fait parfois une mauvaise idée de la justice. Dire qu’un sondage CSA du 05 février 2006 pour Le Parisien/Aujourd’hui en France révélait que 65 % des français affirmaient avoir peur de la justice ! Mais ça c’était avant ! Quand on n’était pas informé.

Grâce à l’ « Affaire du mur des cons » nous avons appris à les connaître et conséquemment  à les apprécier.

Les passages en italiques qui suivront seront tirés du communiqué de presse du Syndicat de la Magistrature. 

Vous et moi avions tendance à  considérer la magistrature comme un corps sérieux frisant l’austère et pour tout dire plutôt chiant. Il n’en est rien. Les magistrats sont en fait de joyeux drilles branchés déconne. Laissons les parler : Que nous apprend Atlantico au juste ? Que certains membres du Syndicat de la magistrature pratiquent entre eux la satire et l’humour potache ? Quel scoop ! Visiblement ce syndicat a un problème de communication : le fait que certains de ses membres soient farceurs échappe parfois au grand public alors que pour eux c’est une évidence.

Toutefois, il est une chose sur laquelle nos vaillants juristes ne badinent pas : la frontière entre l’espace privé et l’espace public. Quoi de plus honteux que de divulguer des images volées dans un lieu privé ?

Il faut bien le reconnaître, ce « Mur des cons » n’est qu’un souvenir remontant aux heures les plus sombres du Sarkozisme (et par conséquent de notre histoire), il ne faut y voir que des vestiges d’un temps où la justice était sous pression permanente et où les magistrats faisaient l’objet d’attaques violentes et démagogiques. Ce temps est révolu, Dieu merci, et, si le mur subsiste, on peut certainement en faire porter la faute sur l’impéritie du service de nettoiement.

Il y a cependant un passage de ce joli communiqué qui me fait un tout petit peu tiquer : Et bien évidemment aucune atteinte à l’impartialité, les blagues drôles ou de mauvais goût des uns n’engageant pas les décisions des autres. On est en droit, vu la formulation de supposer que les uns, auteurs de blagues, ne prennent aucune décision, celles-ci étant uniquement prises par les autres qui cultivent le bon goût et évitent jusqu’à la blague drôle. Que peuvent donc bien faire les uns ? Seraient-ils abouliques ? Payés à ne rien foutre (sinon blaguer) ?

La paranoïa n’est pas de mise dans ce beau syndicat : Nous ne nous posons pas en victimes. Certains diront que ce refus s'explique par le fait que les victimes, avec eux, n'ont pas le beau rôle. Ce sont de mauvaises langues, ne les écoutons pas. Seulement, sans être victime rien n’empêche de dénoncer ses bourreaux : Est-ce bien un hasard si ce document concernant un affichage tombé en désuétude depuis plusieurs mois, a opportunément atterri sur le site d’information "Atlantico", "classé à droite", et si ce non-évenement est relayé par une certaine presse ainsi que par l’ancien secrétaire général du syndicat Synergie Police - aujourd’hui député UMP - et par l’IPJ, dont nous avons combattu avec force les idées pendant toutes ces années... Et on ne peut que leur donner raison : une INCERTAINE presse « Classée à gauche » ne serait pas allée dénoncer ces peccadilles !

Et puis l’objet du délit va disparaître : Dès lors que cette « private joke » est devenue publique, elle n’a évidemment plus lieu d’être. A croire que si  cette « private joke » (notons au passage le bilinguisme du (ou des) rédacteur(s)) était restée privée elle aurait tout lieu de continuer d’exister.


Je vous le disais, nos magistrats, ou du moins certains d’entre eux,  sont de joyeux drilles en compagnie desquels on ne s’ennuie jamais. Pas tellement à cause de leur mur des cons mais plutôt du comique involontaire de sa défense. Est-il cependant rassurant de savoir que de tels gens pourraient un jour être appelés à nous juger ?